— Ne bouge pas, me chuchota Mato.
Il regardait dans la même direction que moi. Toute à ma frayeur, je n'avais pas remarqué que ses ronflements s'étaient tus.
Le feu semblait contenir la bête qui nous faisait face. Sous ma peau, la panthère s'agitait. Elle m'exhortait à revendiquer notre territoire, à rejeter la peur et à refouler l'impertinent qui tentait de m'impressionner.
Une seule paire d'yeux lumineux nous scrutait dans la nuit. S'il y en avait eu plusieurs, j'avoue, j'aurais paniqué. Nous étions de taille à l'affronter. Mon unique souci était de tenir, le temps que Mato se transforme. Même si j'étais dangereuse en panthère, Winnie restait le plus résistant de nous deux. D'ailleurs, il commençait déjà à se déshabiller au sol, avec des gestes lents et précautionneux. Le regard de la bête dévia dans sa direction, et je me levai pour faire diversion. L'animal se focalisa sur moi, s'avança à la lisière de notre lumière. Je distinguai vaguement une fourrure sombre, quatre pattes et des crocs luisants dans la pénombre. Je n'arrivai pas à déterminer de quelle bestiole il s'agissait, mais lorsque Mato chargea, le hurlement qu'elle poussa me fit penser à un loup.
Seuls les bruits de leur combat me parvenaient. Dans l'ombre, des formes s'agitaient, il m'était cependant impossible de savoir qui avait le dessus. J'en profitai pour rassembler nos maigres affaires. Je déchirai le bas de mon t-shirt pour emballer le reste de viande cuite et le glissai dans ma poche, tout en marmonnant dans ma barbe.
— Tu as intérêt à gagner, Winnie ! Yuutô a besoin de nous.
Soudain, le hurlement de la bête se rapprocha, suivi des grognements de Mato. Le premier pénétra dans la lumière du feu, un peu ébloui. J'avalai ma salive de travers. Il était immense ! Je n'avais jamais vu de loup de la taille d'un homme adulte au garrot. Mato faisait presque pâle figure à côté de lui, alors qu'il était aussi beaucoup plus gros qu'un ours normal.
Mon compagnon se jeta sur la bête, qui glissa dans le sang qu'il perdait. Le loup hurla de nouveau. Cette fois, il obtint une réponse : un chœur de voix lupines se joignit à lui. Mato fonça encore dans le flanc blessé de l'animal et lui asséna un coup de patte si violent que son adversaire vola pour se fracasser contre un arbre.
Le vent m'apporta l'odeur des autres loups. Le bruit de leur course fendait le silence de la nuit. Les habits de Mato sous le bras, le sac sur le dos, je lui fis signe. Mon compagnon se rapprocha de moi.
— Tu devrais te changer. On peut tenter de grimper aux arbres. On devrait réussir à tenir là-haut un moment, peut-être jusqu'à demain matin ! Ils se lasseront... Enfin, je l'espère.
Il me dévisagea un instant, comme s'il pesait le pour et le contre de ma stratégie. Finalement, il se métamorphosa et se rhabilla. Un craquement non loin m'apprit que notre premier adversaire se relevait.
— On peut aussi rester près du feu, ça a l'air de les effrayer, s'exclama Mato.
— Je ne pense pas que ça les arrêtera lorsqu'ils seront regroupés.
Il pondérait encore ma solution, quand l'écho de la meute et le grognement du loup au sol se manifestèrent, tout proches. Nous échangeâmes un regard. Je lançai les dernières branches dans le feu, et nous grimpâmes sur les deux arbres les plus proches. J'évitai au mieux la sève collante du pin. Mes paumes se couvrirent de microcoupures, mes cuisses et mes biceps chauffèrent sous l'effort. Lorsque j'atteignis un rameau capable de supporter mon poids, je fis une pause pour reprendre mon souffle. Mato me bluffa. Il gravissait le tronc d'à côté tel un singe, souple et agile.
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ParanormalQuand je me réveille dans un lieu inconnu, je m'estime chanceuse : me voilà sortie de cette fichue prison ! Je suis même avec mon frère, Yuutô, que je n'ai pas vu depuis deux ans. Malheureusement, cette joie est de courte durée, car on est loin d'êt...