Ian - 16

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Saori se leva et se laissa tomber près de Mato. Elle glissa la main dans la sienne. Il sembla tirer courage de ce contact.

— Je terminais le collège. Avec sa ridicule pension, ma grand-mère et moi, on vivait dans un quartier craignos. Notre proprio était à deux doigts de nous virer. Quand un gang m'a approché, je n'ai pas hésité. J'avais besoin d'argent, et vite. J'ai menti à ma grand-mère, en lui disant que j'avais décroché un petit boulot. J'ai pu aller au lycée grâce au fric que je me faisais en jouant les gros durs pour le chef du gang.

— Tu n'es pas tatoué, le coupa soudain Yuutô.

— J'ai toujours refusé de le faire. Ils ont tenté de m'y forcer, je les ai défoncés un bon coup. Ils ont rapidement arrêté de me faire chier avec ça.

Sa voix froide tranchait avec le tremblement de sa main libre. Je grimaçai.

— Les gangs, c'est la merde. Ils te collent aux basques.

Mato eut un sourire triste.

— À la fin de mon lycée, j'ai décidé que je voulais vivre comme il fallait. Ma grand-mère avait découvert le pot aux roses et avait failli faire une crise cardiaque. Je m'en suis tiré avec un gros passage à tabac, mais le chef m'aimait bien, alors, ils ne sont pas allés plus loin. Enfin, pas à ce moment-là. Ce que je ne savais pas, c'est que le bras droit du chef me détestait cordialement, et il a continué à me faire suivre pendant longtemps. À un moment, leur histoire de gang a dérapé, le chef est mort, et son bras droit a pris sa place. Dan avait toujours une dent contre moi.

— Pourquoi il t'en voulait à ce point-là ? lui demanda Saori. Parce que le chef t'avait laissé partir trop facilement ?

— Non, je lui avais piqué sa petite copine, ricana Mato. Il n'a pas supporté.

— Oh !

— Bien joué, Winnie, approuvai-je.

S'il n'était pas parvenu à la garder, ce Dan, c'est qu'il n'était qu'un connard. Mato inspira un grand coup.

— Bref, j'ai tenté l'école militaire. Je voulais intégrer l'armée pour pouvoir travailler rapidement et aider ma grand-mère, la changer de quartier. Malheureusement, Dan m'a tendu un piège. Un soir, alors que je fêtais ma réussite aux examens avec des potes de promo, deux membres du gang m'attendaient à la sortie de la boîte. Ils m'ont menacé et m'ont dit que Dan avait enlevé ma grand-mère : « un prêté pour un rendu ». Ils avaient une photo floue, mais j'étais un peu éméché, j'ai tout gobé et j'ai pété un plomb. Je les ai démontés, comme au bon vieux temps. Un civil s'est interposé. Je n'ai pas réussi à me contrôler et je l'ai envoyé bouler.

Yuutô émit un commentaire à voix basse qui ressemblait vaguement à « crétin de témoin envahissant », tout en se rongeant les ongles. J'approuvai silencieusement, tandis que Mato continuait son histoire.

— Le barman a appelé les flics, ils nous ont tous embarqués. Le civil et les deux autres ont porté plainte. J'ai tenté de me défendre, mais la photo était un faux, et ma grand-mère était saine et sauve. J'ai été écroué pour coups et blessures. C'est vachement moins tragique que vous deux, mais bon... j'aurais dû sortir dans six mois, il me restait deux ans de sursis.

— Putain, mec, pas de bol, soufflai-je.

Il n'aurait pas pu faire carrière dans l'armée en raison de son casier, mais au moins, il aurait été rapidement libre... s'il n'y avait pas eu ce labo de l'enfer. À présent, il était coincé dans un corps étrange, loin de chez lui, comme nous tous.

— C'est pour ta grand-mère que tu veux retourner aux États-Unis ? chuchota Saori.

Mato hocha la tête.

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