chapitre 1

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Il est 21 h, la bibliothèque vient de fermer ses portes. Encore une fois, je viens y passer tout mon temps libre pour préparer au mieux mes examens qui arrivent dans quelques mois. Je sors de la bibliothèque. Il faut que je me dépêche, le dernier bus passe à 21 h 05. Je cours jusqu'à mon arrêt de bus. Il ne faut pas que je le loupe. Le chauffeur du bus me sourit.

- Bonjour Maya, je vois que tu arrives toujours quelques secondes avant moi.

- Oui toujours !

Après cette petite discussion, je pars m'installer dans le milieu du bus. C'est parti pour 40 minutes de trajet. On peut donc dire que j'ai le temps de me présenter. Je m'appelle Maya Longbord. J'ai une sœur. Nous sommes pratiquement jumelles. Elle est née une journée avant moi. Pourtant, on ne se ressemble pas du tout, que ce soit physiquement ou mentalement. Elle est blonde, je suis brune. Elle a les yeux marron, les miens sont bleu-vert. Elle est hypocrite et dépendante de l'argent de nos parents, c'est une vraie garce. Elle ne m'aime pas, ni elle ni nos parents. Selon eux, je suis une erreur de la nature et ils me le font bien savoir tous les jours. Ils la chouchoutent alors que moi, je dois travailler pour me payer ce dont j'ai envie. Mais j'en ai l'habitude maintenant.

Je ne vous ai pas dit. J'ai 19 ans. Je fais des études pour devenir styliste. Depuis mon plus jeune âge, j'aime dessiner des modèles de tenues. Peu à peu, j'ai appris à coudre. Je vends ensuite mes créations. Généralement, la personne qui a été satisfaite de mon travail revient m'en commander d'autres. Grâce à cela, j'ai pu m'acheter une machine à coudre et de nombreux rouleaux de tissu. Souvent, pendant mes trajets en bus, je dessine tout ce qui me passe par la tête. Certaines fois de bonnes idées me viennent, d'autres fois, les modèles ne conviennent absolument pas.

Après être arrivé à mon arrêt de bus, je descends. Je me dépêche de rentrer chez moi. Dans l'allée, il y a plus de voitures garées que d'habitude. Je n'y prête pas attention. Je rentre chez moi, de grandes conversations se font entendre dans le salon. Je pars déposer mon sac dans ma chambre. Je remonte en haut. Je dis bonjour à ma famille puis aux invités. Je ne les connais pas. Mais ils ont l'air d'être très importants aux yeux de mes parents et surtout ma soeur a les yeux luisants de bonheur. Ce sont sûrement les nouvelles victimes de l'hypocrisie de mes parents. D'un coup, mère lance :

"Ophélia, pour montrer tes talents en cuisine, tu devrais aller préparer le repas !"

J'ai envie de rire, mais je me retiens. Je n'ai pas envie de mourir tout de suite et encore moins empoisonnée. Je me dirige vers la cuisine. Je commence à sortir les ingrédients pour faire des lasagnes. J'en fais deux plats. Je les mets ensuite au four. Je vais récupérer des salades dans le jardin pour accompagner les lasagnes. Je récupère aussi des fraises et des figues pour le dessert. Je laisse Ophélia s'occuper de l'entrée. Je la laisse faire un mille-feuille. Je lui ai tout préparé, il ne reste plus qu'à le dresser. Je termine mon dessert. Je le mets dans le frigo. Je pars mettre la table. J'ai oublié de vous préciser, mais le potager au fond de notre jardin est à moi. C'est moi qui plante chaque fruit ou légumes. Avant, ils avaient le droit d'y venir, or depuis que certains accidents sont venus perturber mon jardin, ils n'y ont plus accès. Personne ne s'en occupe à part moi. Et c'est bien mieux comme ça.

Je pars les prévenir que le repas est prêt. L'entrée est déjà servie. Ils se lèvent tous pour venir manger.

- Il manque une assiette, fait remarquer un des invités.

- Non pas que je sache, répond froidement ma sœur.

Je sais exactement à quoi elle pense. Habituellement, je n'ai pas le droit de manger à table avec eux. Souvent, je mange quelques petites choses puis je retourne dans ma chambre pour coudre en attendant qu'ils terminent leurs repas et que je puisse débarrasser et faire leurs vaisselles.

Ces paroles semblent perturber notre invité. Il ouvre la bouche pour ajouter quelque chose. Mais je le coupe :

- En fait, c'est moi. Je ne me suis pas mis d'assiette, car j'ai déjà mangé en chemin et je suis fatiguée, mais il faut que je termine mon projet avant d'aller me coucher. Alors, je vous souhaite un bon repas et de passer une soirée agréable.

Sur ces paroles, je quitte le salon sous le regard noir de mon père. J'ai pourtant essayé de faire en sorte que ce geste devenu instinctif pour moi ne soit perçu que comme un simple oubli. Malheureusement, cela ne semble pas être au goût de ma famille. Je sens que je vais rapidement en prendre pour mon grade une fois que les invités auront quitté cette maison. Je descends dans ma chambre qui n'est autre que la cave. Au moins, elle est assez spacieuse pour que je puisse y entreposer tous mes modèles et comme pour le jardin, mes parents et ma sœur ont une interdiction formelle d'y mettre les pieds pour une quelconque raison. Et puis de toute manière, leur paresse légendaire et telle qu'ils ont fait installer une sonnette à côté de la porte de ma chambre. Comme ça, ils n'ont même pas besoin de descendre dans ma chambre.

Je sors le mannequin et les tissus ainsi que des strass et de la dentelle. J'ai deux semaines pour finir une robe de mariée. Pour l'instant, ma base est faite. Je commence à mettre de petites touches de bleu comme le souhaite ma cliente. Je rajoute ensuite quelques touches de dentelle sur le haut du corset. Ainsi que des strass que je couds de façon à ce que ça ne fasse pas trop et que cela fasse travailler. J'ai fini par le voile en dentelle. Je suis contente. Je trouve que j'ai fait du bon travail. Je prends mon téléphone et je prends une photo. J'enlève mes écouteurs, car oui, j'aime écouter de la musique en travaillant. Ça m'aide pour me concentrer et aussi quand je suis en manque d'inspiration. Je range le mannequin puis le tissu. Je pars m'allonger dans mon lit. Ce n'est qu'à ce moment-là que je remarque un des invités et ma sœur au pied de la porte. Ils me fixent tous les deux. Ma sœur me regarde avec un mélange de dégoût et de haine.

Je me lève. Je ferme la porte au nez. Je n'aime pas que l'on me fixe comme cela et encore moins qu'on envahisse mon espace comme ils l'ont fait. Je les entends remonter. Ma sœur se met à crier. Elle dit que j'ai été irrespectueuse envers son petit ami. Mais ce n'est pas ma faute s'il est malpoli et qu'il s'invite dans mon jardin secret, là où personne n'a le droit d'entrée. Là où je me réfugie quand tout va mal. Ils ont souillé le seul endroit où je peux être moi-même, où je n'ai pas besoin de faire attention au moindre geste, à la moindre parole sous peine de me prendre des coups par la suite.

Je commence à m'endormir, quand ma porte claque contre mon mur. Quelqu'un me tient par les cheveux et me tire violemment du lit.

- Tu vas voir si tu vas manquer de respect à mon fils, sale pute. Dois-je te rappeler que tu n'es absolument rien dans cette famille. Tu es tout juste assez bonne pour être la femme de ménage.

Je regarde mon père. Il rigole avec ma mère pendant que je me fais tabasser. La fille de l'homme qui me frappe essaie de l'arrêter. Je me roule en boule et attends que ce mauvais moment se termine. Il finit par me laisser. Je les entends partir avant de perdre connaissance.

De la cave à l'îleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant