12- Révélation sur prescription

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Je me demande où Marine en est de sa romance avec Gaétan. J'ai besoin de sérum physiologique pour Louis. Je vais naturellement passer à la pharmacie en chercher.

Marine m'accueille en personne et contourne son comptoir pour me faire la bise.

- Je peux le voir ? Demande-t-elle, avec envie.

Louis est réveillé, je le sors de la poussette et le lui tend. Elle le prend avec une infinie précaution.

- Oh mais t'es beau, toi ! Oh oui, c'est qui le beau bébé ?

Devant mon amusement, elle se reprend.

- ... Tu as de la chance.

- Et toi t'en es où avec Gaétan ?

- T'es venu me présenter Louis ou te renseigner sur ma vie amoureuse ? me taquine-t-elle.

- Les deux.

- On a emménagé ensemble. Les autres ont dû te dire, déjà. Elle respire les cheveux de mon fils avec bonheur. Il sent... la crème solaire ou l'écran total ! Non ?

- Peut-être.

- Pourquoi tu lui mets ça ? A cette saison, c'est inutile. Il a déjà bien bronzé, dis-donc.

Sentant planer une menace, je charge le sac à langer sur mon épaule.

- Bon, je vais y aller.

Elle tente de me retenir.

- J'ai dit quelque chose qui t'a dérangé ? devine-t-elle.

- Tu le trouves... bronzé ?

- Un peu oui. Tu as des origines italienne et portugaise, c'est logique. Elle me sonde en silence. Y'a un truc qui te préoccupe, toi. Viens prendre un thé de l'autre côté.

Je la suis dans l'arrière boutique avec la poussette. Fidèle à son attachement aux détails, elle remplit une boule à thé d'un mélange de feuilles en vrac puis l'arrose d'eau bouillante. Elle dispose sur la minuscule table un assortiment de pâtisseries miniatures. Il faut bien sûr des pics pour se servir.

- Je te connais assez pour deviner quand tu flippes. Allez, balance !

Cette question m'obsède chaque jour depuis le début de ma grossesse. Bientôt un an. J'ai besoin de me confier. Marine n'est peut-être pas la personne la plus adéquate en temps que cousine de Bénédicte mais je la sais capable de garder un secret.

- Je ne sais pas de Cédric ou Kévin qui est le père.

Elle ouvre d'abord de grands yeux puis tente de se reprendre. Je tente de minimiser l'impact :

- On a fait une bêtise pendant les vacances, après une soirée beaucoup trop arrosée !

Le spectacle qui se déroule devant moi est surprenant : elle saisit la boule à thé qui doit être encore bien chaude et se la fourre dans la bouche. Aïe ! Elle a du confondre avec les pâtisseries. A la tête qu'elle fait, la boule à dû s'ouvrir libérant les feuilles. Dégoûtée, elle se précipite au-dessus de la poubelle.

- Je t'ai choquée..., je tente.

Elle soupire, boit un verre d'eau qu'elle recrache dans l'évier puis nettoie consciencieusement ensuite.

- Voyons qu'est-ce qui me choque le plus : que tu aies couché avec le mari de ma cousine ou avec ton ex-demi-frère... ?

Je regrette immédiatement ma confession.

- Je n'en suis pas fière, inutile de me faire la morale. Ca ne t'ait jamais arrivé toi, de désirer quelqu'un au point que ton corps n'écoute plus ta tête ?

- Si justement. Et j'ai d'autant plus de mal à comprendre que tu le trompes.

On en revient toujours au même : sa grande romance avec Cédric. En choisissant de me confier, je n'avais pas pris en compte ce paramètre. Malgré son emménagement avec Gaétan, elle est toujours nostalgique de Cédric et défend ses intérêts.

- ... tu devrais te poser la question de tes sentiments pour Cédric, me recommande-t-elle.

- Toi aussi.

- Madame Choiseul, il y a un souci avec l'ordonnance d'une patiente... Oh ! Excusez-moi, nous interrompt une préparatrice.

Ses employées lui donnent du Madame Choiseul. On dirait que Marine n'est pas une adepte du nivellement par l'horizontalité, des relations employeurs/employés. Elle emboîte le pas de la préparatrice vers l'officine.

Je termine mon thé, plutôt bon d'ailleurs. J'enfourne une ou deux pâtisseries. Après tout, elles étaient là pour moi. Louis me rappelle que lui aussi a faim.

Après avoir éclairci les doutes de la préparatrice par un appel au généraliste, Marine revient. Elle m'observe entrain d'allaiter Louis. Son expression se détend, elle sourit presque.

- C'est agréable de donner le sein ?

- Oui assez, oui.

- Je t'envie d'avoir cette audace de vivre les choses à fond, d'aller jusqu'au bout de tes envies. A ma place, tu te serais débrouillée pour reconquérir Cédric. Moi, je ne sais pas y faire.

- Tant mieux que tu sois réservée. Ce n'est pas une bonne idée, je tranche catégoriquement. Tu ne voudrais quand même pas l'éloigner de la mère de son fils ? Je me montre très égoïste parfois.

- T'es en surpoids mais qu'est ce que t'es belle !

Sa blouse s'ouvre sur une silhouette filiforme. Dans sa bouche, le compliment est d'autant plus surprenant, il me ramène surtout à notre baiser l'année passé. Louis s'endort repus, une goutte de lait s'écoule sur son menton. Je le dépose dans la poussette, la remercie pour le thé et décide de partir.

- Tu gardes ce que je t'ai dit pour toi.

- Ne t'inquiète pas. Je suis une vraie tombe, promet-elle.

L'audacieuse Sofia Capriaglini Tome 3 : délit de fuiteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant