Prologue.

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Des craquements de feuilles mortes se firent entendre sur le petit sentier de la forêt en ce début du mois d'octobre.
Comme tous les matins, une petite silhouette traversée ces bois pour se rendre au village afin d'y livrer des sacs de farine confectionnés au moulin familial.
Éclairée faiblement par la lueur incandescente d'une lanterne qui guidait ses pas, cette dernière était emmitouflée dans une grosse cape noire, rapiécée à de nombreuses reprises, de laquelle s'échappaient quelques mèches de longs cheveux.
Quand le bruit sec d'un craquement d'une branche retentit non loin.
Elle se figea sur place et cacha la lumière mourante sous sa longue cape, le cœur battant à vive allure, seul l'épais nuage de vapeur s'élevant de ses lèvres charnues trahissait sa présence.
Il n'était pas rare de trouver des loups dans la région, et ils étaient particulièrement proches en cette période de fin d'année, il fallait donc être sur ses gardes à chaque instant lors d'une traversée dans une forêt comme celle-ci.
Après quelques minutes elle reprit sa route en accélérant encore le pas quand un autre bruit, plus près encore, lui glaça le sang.
Un rugissement, pas celui d'un loup mais d'un prédateur sûrement plus dangereux encore et beaucoup plus imposant que ce dernier, au moment où elle ce mit à regarder en arrière, elle faillit trébucher sur une racine qui traverser le sentier mais, une main à la poigne solide la retenue de justesse, l'empêchant de renverser les précieux sacs de farine.

Elle releva la tête, laissant échapper de longues mèches de cheveux de sa capuche, et regarda en direction de son sauveur qui se tenait devant elle.
C'était un jeune homme de grande taille, enveloppé dans un long manteau, portant un tricorne de cuir usé et sombre duquel dépassait une épaisse tignasse de cheveux bouclés blonds.
Elle n'eût pas de mal à le reconnaître.Il s'agissait de Joan, fils du boulanger, âgé de quelques printemps de plus qu'elle, domestique en cuisine au service de la famille Beauxchamps mais également l'un de ses rares amis.

- Bah dit donc toujours aussi maladroite "Leor à ce que je vois !
Dit-il d'un ton moqueur en souriant à pleine dent comme à son habitude.

- Tu m'as faits une peur bleue j'ai cru que c'était un loup qui allait me bondir dessus ! Et je te le répète pour la centième fois c'est Éleanor pas 'Leor !
Marmonna-t-elle agacée entre deux respirations saccadées, toujours secouée par ce qu'elle venait de vivre.

Il leva les yeux au ciel ignorant sa remarque.

- Tu vas livrer qui cette fois ? Demanda-t-il en jetant un coup d'oeil aux sacs qu'Éleanor tenait fermement contre elle.

- Ton père, figures toi. J'ai déjà livré la commission à la cuisine du manoir des Beauxchamps hier matin.
Ceux-là, c'est les derniers sacs de l'année donc ils seront un peu plus chers que le prix habituel. La récolte de cette année était plus maigre que les précédentes.
Répondit-elle avec détachement en tenant fermement les petits sacs en jute contenant la farine, contre sa mince poitrine.
Le regard aux aguets scrutant les bois sombres aux alentours.

Un long silence s'installa entre eux et Joan finit par y mettre fin en faisant mine de se racler la gorge.

- Bon je dois y aller, je vais aller aider à préparer le petit déjeuner au manoir, bonne journée "Leor et tâche de ne pas te faire croquer par un farfadet en chemin !

Elle tourna les talons en soupirant et remarqua que le soleil allait faire son apparition sous peu. La jeune femme se remit en marche et arriva aux portes du village ou un garde ronflait à plein poumon contre le mur de pierre de l'enceinte, maigre protection pensa-t-elle.
Dans l'air, une odeur mélangeant l'iode aux poissons fraîchement pêchés et aux senteurs du pin, embaumait la fraîcheur matinale.
Arrivée devant la boulangerie, elle fit le tour du bâtiment pour arriver dans la cour derrière ce dernier où, un homme patibulaire déchargeait les marchandises d'une charrette en sifflotant joyeusement.

Le Renard De L'aube Où les histoires vivent. Découvrez maintenant