Chapitre 1

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Laïa 

  Quitter ma mère est la chose la plus difficile qui m'ait été donnée de faire. Chaque jour, un sentiment d'abandon m'envahit alors que je n'ai fait que quitter le cocon familial comme la plupart des jeunes filles de mon âge. Les études avant tout, dit-on. Pourtant, ce qui peut être une libération ou un nouveau départ chez les uns peut s'avérer être une terrible épreuve pour d'autres. Je suis beaucoup trop attachée à ma mère, j'ai cette impression qu'on a arraché la moitié de mon cœur. Malheureusement, je n'ai pas eu le choix.

Voilà deux semaines que j'ai intégré la prestigieuse université de mathématique de Rouen en première année. J'ai toujours ce vide immense qui compresse ma poitrine, il me manque quelque chose. Elle n'est plus là, il faut que je m'y fasse. Ce choix, je n'ai pas eu à le réfléchir, il le fallait. Je ne pouvais plus continuer ainsi.

− La nuit c'est fait pour dormir, pas pour passer son temps à baiser Laïa !

Je grogne contre moi-même et me masse la tête. Emi est trop souriante aujourd'hui, elle a sans cesse la pêche cette fille ! C'est un aimant à joie, incroyable !

− Il y en a qui n'ont pas le sommeil léger ! Ça existe les insomnies de nos jours !

Ma voisine m'assène un coup de coude dans mon bras en souriant et se remet à écouter le professeur de math. Les matrices... Sujet dont plus de la moitié des élèves dans cette salle n'ont jamais étudié ou entendu parler. Moi, si. Ce sujet est barbant et simple une fois qu'on a compris. Le plus dur, c'est de comprendre pour la première fois.

− Tu bosses encore ce soir ? ajoute ma voisine.

Je hoche la tête, en signe d'approbation. Je travaille trois voire quatre fois par semaine au bar surnommé « Muller's ». Je ne suis pas issue d'une famille riche, ma mère a déjà assez de dettes pour s'occuper de mes études. L'indépendance, je la connais depuis quelques années maintenant. J'ai dû aider ma mère dans sa boutique après les cours, ce qui ne m'a pas non plus facilité la tâche.

− Franchement, quand est-ce que tu vas profiter de ta vie étudiante ? Elle est ennuyeuse ta vie !

− Oh s'il te plaît Emi, on n'est pas tous des filles à papa.

Elle se met à rire et tout le monde se retourne vers nous. Merde, avec elle c'est impossible de faire dans la discrétion. Ma voisine sourit au professeur en s'excusant dans sa barbe et il reprend son cours, tout à fait normalement.

− Si j'avais su que ses fesses seraient plus intéressantes que son cours, je serais restée chez moi à regarder les beaux gars de la série S.W.A.T !

Je rigole timidement et lève les yeux au ciel, elle me fatigue. Je la connais à peine depuis une semaine et elle rend déjà ma vie plus agréable à vivre.

Une horrible sonnerie résonne et peu de gens se dirigent vers la sortie. Ça m'étonne, d'habitude c'est le contraire. Je regarde un peu partout dans la salle et je remarque qu'ils sont tous sur leur téléphone. Mon dieu, pire qu'une addiction cette merde. Sans leur technologie, ils ne sont rien. Bon OK, c'est aussi mon cas.

Je dévale l'escalier aux côtés d'Emi et sors de la salle de cours. Dans les couloirs, c'est la même chose. Tous les étudiants se sont arrêtés et sont fixés sur leur tel. Je regarde Emi avec un air d'incompréhension sur le visage, elle se contente de hausser les épaules.

Je manque de tomber lorsqu'un étudiant me rentre dedans, il ne s'excuse même pas et trace sa route en chantonnant :

− La liste est sortie, la liste est sortie !

Laisse-Toi Succomber [PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant