Lutteo - Without You I Can't Breathe

Chapitre 24

Il leva les sourcils en signe d'étonnement. Je mordis ma lèvre inférieure et ma respiration ne cessa d'accélérer. Il s'approcha délicatement. Tout sembla se passer au ralenti.

Ses lèvres n'eurent le loisir que d'effleurer les miennes. Alors, que j'avais fermé les yeux, prête pour ce baiser tant désiré, au creux de ses bras, un grand fatras nous interrompit. Quelqu'un était sur le balcon. Jazmin. Toujours Jazmin. Elle avait... non mais sérieusement ? Une poêle et une grande louche en fer dans les mains. Je la fixai ahurie, sans bouger. Elle continua de taper, me faisant les gros yeux. Au bout d'un long moment, je compris enfin ce qu'il se passait. Elle faisait diversion pour que je m'éloigne de Matteo au plus vite, avant de faire une bêtise. 

Je m'écartai brutalement. 

-Désolée, je sais pas trop...

J'étais obligée de crier, Jazmin ne cessait son boucan. Elle faisait semblant d'être bourrée et était entourée d'un petit comité, qui n'était, comment dire ? Pas très frais. 

Le regard de Matteo passait de Jazmin à moi, de moi à Jazmin. Il avait l'air un peu perdu. Non, soyons réalistes, aussi paumé que moi. 

-Déso...

Il me coupa.

-Jaz! cria-t-il. Tu peux aller faire ton show ailleurs s'il te plait ? 

Il essayait de se faire entendre de la rousse. Sans succès, elle était déterminée à briser toute atmosphère romantique. 

Je parlai encore plus fort.

-J'y vais. A plus! 

Je tentai de m'éloigner.

-Attends ! hurla-t-il. Pourquoi t'enfuis-tu comme ça ? 

-Je... Je m'enfuis pas ! C'est juste qu'il faut que je rentre! C'est mon couvre-notre couvre feu!

-Tu...

Je n'entendis pas le reste de sa phrase. Je refis un pas vers lui.

-Pardon ? 

-Tu as dit que tu ne pourrais pas résister...

Merde... Pourquoi je ne contrôlai jamais ce que je disais ? Pourquoi étais-je si spontanée ? Allez... Bon... une excuse en carton! une excuse...

-Je t'ai pas dit à quoi je ne pourrais pas résister. Si tu t'approches, je ne peux pas résister à l'envie de... de m'écarter! Je n'aime pas la proximité physique, je suis quelqu'un de pas tactile du tout! 

Cette fois, il croisa les bras et me fixa l'air de dire "lol, je ne te crois pas du tout en fait". Non pas qu'il l'ait vraiment dit, mais je parlais seule avec moi-même maintenant. Il fallait vraiment que je m'échappe.

Je lui fis un signe de main et me précipitai vers la porte de sortie de la terrasse. J'avais l'impression d'y être restée des heures. Je regardai mon téléphone et me rendis en effet  compte que la nuit était plutôt avancée. Le tumulte de Jazmin me suivait.

***

Je claquai la porte de la voiture. Mon souffle était court. Un sourire béat trônait sur mes lèvres. Jazmin entra à son tour et le taxi démarra.

-Tu as complètement perdu la tête ma parole! cria-t-elle.

Je la toisai ironiquement.

-Ah parce que peut-être que tu n'as pas perdu la tête quand tu as essayé de me convaincre en utilisant l'argument d'un soi-disant mariage?

Elle resta coite.

-Tu pensais quoi ma cocotte? Que je n'apprendrais jamais la vérité?

-Ai-je le droit de dire que je l'espérais?

Je lui lançai un regard noir.

-Oh ça va ça va! J'étais désespérée. C'était le seul moyen d'être sûre de te convaincre. Tu es tellement accroc à lui que pour rien d'autre tu n'aurais bougé.

-Je ne suis pas...

Elle ne me laissa pas terminer.

-Stop. Ne prétends pas le contraire! Tu crois que je ne vous ai pas vu?

Je rougis immédiatement.

-Il y avait tellement de tension dans l'air que je me demande encore comment tu es encore en vie. On aurait dit deux âmes sauvages en transe.

-Oh! Toi et tes métaphores alambiquées!

-Moi et mes métaphores on t'emmerde!

J'explosai de rire, et une vague de chaleur m'étreignit alors que je revivais ce moment.

-Heureusement, que je suis arrivée à temps hein ! Deux minutes de plus et vous vous sautiez dessus, et tu ruinais ton identité définitivement... enfin si ce n'est pas déjà fait! 

Etreinte par la peur, je lui dis: 

-Tu penses qu'il m'a reconnu? Tu crois que je me suis trahie ? 

Le silence régna dans la voiture. 

-J'avoue que je n'en ai aucune idée. Les prochains jours nous le diront. Et puis, sûrement qu'il te l'aurait dit s'il t'avait reconnu non ? 

Je ne répondis pas à cela et mon regard se perdit dans la nuit qui avait englouti depuis longtemps la ville.

***

Allongée dans le lit de la chambre d'amis, je n'arrivai pas à trouver le sommeil. Les événements de la soirée tournaient en boucle dans ma tête. Il allait falloir, au moins pendant un temps, que je maintienne de la distance entre Matteo et moi pour le bien de tous.

***

J'avais mal dormi et je sentais le sang qui battait derrière mes paupières. Je n'avais eu de cesse de me retourner et de repenser à tout ce qui s'était passé. Je passais sous la douche et enfilai un jogging et un gros pull. Je descendis en bas et découvrit Jazmin affalée sur le canapé. 

-On dirait un cachalot échoué.

Surprise par ma voix et par ce que je venais de dire, elle releva brusquement la tête, et mit un peu de temps à réagir. J'explosai de rire.

-Le cachalot te dit bonjour.

-Bonjour Jaz! 

Je sautai sur le canapé et lui plantai un bisou sur la joue.

-Tu n'as pas trop dormi hein ? 

Je haussai les épaules, ne souhaitant pas particulièrement en parler.

-Bon aujourd'hui, tu vas retrouver un endroit qui était très important, tout particulier pour toi.

Je la regardai avec surprise.

-Aujourd'hui, je t'emmène au Roller.