Chapitre 13

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Philip entra dans la cuisine, les mains pleines de couleurs.

-As-tu mis autant de peinture sur la toile que sur tes mains ? plaisanta Edith.

Il lui jeta un regard faussement vexé.

-Shut up, grommela-t-il entre ses dents.

Elle rit, alors qu'il frottait énergiquement sa peau au-dessus de l'évier. Le savon envoya des filaments de couleur dans le jet transparent. Un mouvement de sa tête trahit son habitude de longue date de repousser ses cheveux sans les toucher ; mais il se les était coupés une semaine plus tôt. Une drôle d'expression traversait son visage, lorsqu'il se souvenait que ses mèches n'étaient plus que fantômes. Une partie de sa malice juvénile s'en allait avec elles. Il semblait plus sérieux à présent, assorti avec la bague qui ornait désormais son doigt. La différence n'existait pas pour Edith. Il lui plaisait avant, il lui plaisait aujourd'hui, elle s'était mariée pour une raison.

-Ils arrivent dans cinq minutes, fit-elle remarquer. Ils vont trouver un arc-en-ciel ?

-They're going to find a human being, répliqua-t-il avec un sourire en coin, and get over it.

Leurs échanges aux langages changeants étaient devenus une habitude.

Il essuya ses mains. Toute la peinture n'était pas partie. Philip abaissa les manches retroussées de sa chemise, et se rendit compte que cette dernière était également tâchée. Il fit la moue, adorable, et embrassa Edith, lèvres légères comme le souffle d'une aile d'oiseau, sur son chemin vers la chambre.

-Je vais me changer, lança-t-il.

L'Autre avait compris. Les clés nécessaires étaient donc dans les paroles de celui qui avait organisé leur enlèvement. En addition à tout le reste, Edith ressentait une certaine excitation à l'idée de finalement comprendre son lien à l'Autre. Il existait. Une connexion avec quelqu'un qu'elle n'avait jamais rencontré auparavant.

C'était donc une troisième personne qui les reliait. L'homme avait parlé d'un lui. La femme se concentra, se remémora ses mots exacts. Tu lui ressembles un tout petit peu. Une relation familiale de l'Autre, pour entraîner une ressemblance physique ? Pas forcément. Quelqu'un qui lui ressemblait. Elle ne connaissait que Marc, qui ressemble à peu près à son compagnon de malheur. Marc pouvait-il être ce lui ? Il n'était pas l'homme derrière la cagoule, pas de doute là-dessus, mais il pouvait bien être le dénominateur commun. N'était-ce pas ce que son instinct lui avait désigné, depuis longtemps déjà ? un instinct pouvait-il être juste ? Il est passé au modèle supérieur. Tant mieux pour lui. Lui, lui. Une rancœur évidente. Cet homme, ce point commun entre l'Autre et elle était donc objet de haine. C'était une histoire de vengeance. Le futur n'est que le terrain de jeu du passé. Tout ce qu'il se passait avait donc été déterminé longtemps auparavant, déclenché par un acte passé. L'Autre et elle n'étaient pas les véritables proies. C'était cette troisième personne sur qui on cherchait une revanche, ce il que l'on cherchait peut-être à punir en lui dérobant deux êtres qu'il connaissait. Vous n'avez pas de futur. Non, ils n'étaient pas importants. Seulement pour faire souffrir l'homme qui avait suscité cette haine.

Edith connaissait forcément cet homme. Ce pouvait être Marc, mais ce pouvait être n'importe qui... Il y avait plus d'un homme qui tenait à elle, dans une certaine mesure. Elle ne manquait pas d'amis. Mais il fallait une véritable proximité entre elle et cette personne, pour justifier le choix de son enlèvement. Si leur geôlier voulait vraiment faire du mal à quelqu'un, il ne pouvait pas avoir choisi n'importe quelles victimes. Elle était proche de ce lui. Ou l'avait été.

Aucune raison de s'inquiéterWhere stories live. Discover now