Chapitre 1 : « Le voyage »

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C'était la toute première fois que j'allais quitter le cocon familial.

Après des mois de négociation, j'avais enfin pu obtenir l'accord de mes parents pour aller poursuivre mes études à l'étranger.

L'obtention de ma bourse y était pour beaucoup. En effet, j'étais une brillante élève.

Un jour, mon lycée décida d'offrir une bourse entière et une demi-bourse pour le Canada, aux deux meilleurs de l'établissement ; Je postulai alors dans la plus grande discrétion ; A ma grande surprise, ma candidature fut retenue. Je n'avais jamais vraiment nourri l'envie de voyager. Mais cela changea au fil du temps. Je fis des recherches sur le Canada et je fus émerveillée par ce pays. Ma future école, était le genre d'établissement uniquement réservé aux gosses de riche, aux enfants des élites du pays. Mon père, même en travaillant toute sa vie, aurait été incapable de me payer la scolarité. Par la grâce de Dieu, je pourrai intégrer cette école, tout frais payé. J'avais fait quelque recherche sur les logements, mais ils étaient magnifiques. Cependant, je partagerai mon studio avec une autre étudiante, bourse oblige. En effet, le programme que je dois suivre est le suivant : je ferai la première (lycée) à la rentrée scolaire. Ensuite, si je décroche mon baccalauréat avec une excellente mention, là je pourrai maintenir ma bourse et choisir l'université qui me conviendra.

L'envie de vivre seule et découvrir de nouveaux horizons commença intensément à m'envahir.

J'en rêvais toutes les nuits. Et ce jour arriva enfin. Mes parents m'avaient exigé trois choses :

-Maintenir mon voile.

-Téléphoner tous les jours.

-Rentrer dès l'obtention de mon master 2.

Où sont passées mes bonnes manières ? Je ne me suis même pas encore présentée. Je m'appelle Zainab TALL. Je viens d'une famille très croyante et conservatrice. Dès l'enfance, nous avions un maître coranique à la maison. A l'âge de sept ans, ma mère a commencé à me mettre le voile, ce fut idem pour mes deux petites sœurs : Aïcha et Fatima, lorsqu'elles eurent sept ans à leur tour.

Nos parents nous avaient appris que le port du voile était obligatoire dans la religion musulmane. J'ai seize ans aujourd'hui, et je le porte toujours. Lorsque j'explique à mes camarades de classe pourquoi j'ai toujours un foulard sur ma tête, c'est la même question qui revient à chaque fois : « Si tu avais le choix, le retirerais-tu ? ». Je me suis posée cette question des tonnes de fois, mais je n'ai jamais pu y répondre. Le voile a une valeur sentimentale pour moi. C'est tout à fait normal étant donné qu'il fait partie intégrante de ma vie et ce, depuis ma plus tendre enfance.

J'ai grandi avec mes parents et mes sœurs. Mon père est un commerçant et voyage beaucoup et ma mère est une femme au foyer. Elle n'a jamais fait d'étude ni travaillé. Ses parents l'avaient éduqué en lui disant que la place d'une femme c'était au sein de son domicile conjugal ; Son travail est d'éduquer ses enfants et tenir correctement sa maison. Ma mère s'était donc contentée de faire ce qu'on lui demande et ce, jusqu'au moment où je vous parle. Je ne me rappelle pas l'avoir déjà vu ou entendu défier l'autorité de mon père. Elle se plie constamment à son souhait. Il m'arrive de n'être pas toujours d'accord avec elle. A chaque fois que je lui faisais des remarques sur ce plan, elle me disait qu'une bonne épouse ne doit jamais discuter les ordres de son mari et que je devais en prendre de la bonne graine.

Maman m'avait aidé à faire mes valises. Elle m'avait tricoté pleins de pulls afin de ne surtout pas risquer d'attraper froid, vu le climat glacial du Canada. Mes petites sœurs quant à elle, étaient tristes. Nous étions solidaires et n'avions jamais été séparées avant.

Amour et interditsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant