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Oscar faisait les cent pas dans la pièce. La mine sombre, il fixait le sol. Ses mains derrière le dos, il attendait. On voyait bien qu'il attendait quelque chose, mais quoi ? Soudain, la porte s'ouvrit. Oscar se retourna, et une étincelle illumina ses yeux.

- Vous les avez retrouvés ?

- Non. Malheureusement, il semblerait qu'ils se soient cachés dans la forêt. La forêt des Baroon. Mais dès demain, nous irons chercher leur trace en ville. Je pense que votre fille a été touchée par le sort : ne vous en faites pas, nous les aurons bientôt rattrapés.

Oscar bouillonnait de colère.

- Ce n'est pas suffisant ! J'attendais mieux de vous !!! Cela fait trois mois que vous cherchez, en vain ! Quelle bande d'incompétents !

L'homme recula, gêné :

- N'oubliez pas que Niel a été touchée par le sort....

- Je sais.

Oscar se tourna vers l'homme et ajouta :

- Leur allié, celui qui les a aidés... Savez-vous qui c'était ?

- Non. Mais nous avons une idée.

- Laquelle ?

- Nous pensons... que cet homme est Aaron.

- Impossible ! Cet homme est mort ! C'était un hors-la-loi !

- Vous avez raison.

- Et Angélie ? Je suis sûre qu'elle était dans le coup. Rattrapez-les. Ou je vous coupe la tête.

- Très bien.

L'homme s'inclina avant de prendre congé. Il ne trahissait rien, mais la peur menaçait de le faire trembler de tout ses membres.

Lorsqu'Oscar fut seul, il alla s'asseoir à son bureau. Il posa sa tête dans ses mains.

- Si nous ne retrouvons pas l'héritière, que deviendra la famille ? murmura-t-il.

***

Aaron entra dans la pièce où reposait Niel. Il s'attendait à la voir allongée sur son lit de malade, mais ce ne fut pas ce qu'il vu. Quand il passa le pas de la porte, il trouva Niel, debout au milieu de la pièce. Elle était tellement absorbée dans sa conversation avec Ally qu'elle ne remarqua pas sa présence.

- Petite ? Tu es réveillée ?

Niel sursauta. Elle se tourna vers Aaron. Une énorme gratitude apparu en elle. Après la description de leur "sauveur" par Ally, elle devinait sans mal de qui il s'agissait.

- Oui ! Merci, monsieur ! Merci de nous avoir aidés. Où est ma mère ? J'aimerais tant la voir ! 

- Heu, oui... Mais pas maintenant. Elle a besoin d'être seule.

Niel baissa la tête, triste.

- Elle ne veut pas me voir ?

- Si, bien-sûr, mais ce n'est pas trop le moment. Désolé. Ça n'a rien à voir avec  toi, je le promets.

- D'accord...

Aaron senti venir le malaise. Il chercha en vain quelque chose à dire. Mais ce fut Ally qui prit la parole :

- Quand ma tante pourra nous voir, vous pourrez nous expliquer vos plans en détails ? Bientôt, notre famille risque de nous retrouver. Ils sont en train de chercher par tout dans les bois. Ils ne vont pas tarder à venir ici. Cela fait trois mois que vous n'avez rien dit à propos de ce que vous vouliez faire. Maintenant que Niel est réveillée, il serait tant de nous expliquer tout ça. 

- C'est vrai. Ce que tu dis est vrai, jeune homme. Ici n'est plus un endroit sûr. Et nous ne pourrons pas éternellement être chez ce pauvre docteur qui n'a rien demandé. A vrai dire, je ne sais rien des plans d'Angélie. Je lui ai déjà demandé, mais elle n'a encore rien dit. 

- Mouais. Bah, ça peut attendre encore un peu. Mais ne nous faites pas trop attendre.

- Ally ! cria Niel. Ne parle pas comme ça ! Je te signale que c'est lui qui nous a sauvé. Sois un peu plus aimable.

La fillette se tourna vers Aaron :

- Monsieur, j'ai une faveur à vous demander. J'aimerais aller en ville. Si on se cache, on ne s'attirera pas d'ennuis. Mais vous comprenez, j'ai passé ma vie dans ce manoir et je ne suis jamais allée dans un lieu qui est pourtant si proche de chez moi.

- Attends ! dis Ally. Tu dis "on" ? Tu ne m'as pas demandé mon avis !

- Tu ne viendrais pas ?

- Heu... Si, mais...

- Non; coupa Aaron. C'est trop dangereux. On risquerait de vous reconnaître.

- Mais si on se cache, tout ira bien ! Vous ne pouvez pas nous interdire ça !

- Désolé, mais c'est non. 

Aaron tourna les talons et sortit de la pièce. Il venait de clore la discussion sans laisser aux enfants le temps de répondre. Il ne voulait pas réduire ses efforts à néant. Et si les enfants se faisaient attraper ? Il ne pouvait ignorer ce risque, même s'il savait qu'il devrait leur faire confiance.

***

- On y va ? demande Niel à Ally.

- Où ça ?

- Bah, en ville ! Où crois-tu que je veux aller ?

- Mais Aaron a dit qu'on ne pouvait pas.

- Tu me connais.

- Non... Tu veux qu'on parte en cachette ?!

La fillette hocha la tête, une lueur de défi dans le regard. Ally savait qu'elle n'abandonnerai pas son idée, mais si elle devait y aller sans lui.

- Sûre ?

- Plus que jamais ! Allons-y !

***

Les deux enfants avaient réussi à sortir sans se faire repérer. Un véritable jeu d'enfant ! Ils se trouvaient maintenant dans la rue, et contemplaient les gens passer. Dans leurs regards brillait l'émerveillement. Ils n'avaient jamais vu autant de gens. Absorbés dans leur contemplation, ils ne se rendirent même pas compte qu'une petite main leur tapotait l'épaule. Niel se retourna, surprise, imitée par son cousin. Ils faisaient maintenant face à une petite fillette d'à peu près 7 ans. Elle avait des vêtements déchirés et sales  et la peau noircie par la suie. Ses cheveux roux tombaient jusqu'à ses fesses et étaient emmêlés. Niel remarqua que la petite était si maigre que l'on voyait ses côtes. 

- J'ai faim... supplia la petite.

Les deux enfants n'entendaient rien. Ils la fixaient, horrifiés. Comme blessée par ces regards, la petite se cabra et partit en courant.

- Attends !

Trop tard. La fillette avait disparu au coin de la rue. Niel, emportée par l'émotion, partit à sa poursuite. Jamais la fillette n'avait tant couru. Elle se maudissait d'avoir réagi ainsi. Elle, elle avait toujours mangé à sa faim. Voir quelqu'un d'aussi jeune dans cette situation si injuste lui brisait le cœur.

Ally, qui ne réagissait toujours pas, fut soudain frappé de stupeur : où était passé Niel ? Elle n'était plus là. Et il était seul.

RaphOù les histoires vivent. Découvrez maintenant