Chapitre 8. Passé et futur

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Quand Fanny rentra chez elle, Grant préparait le petit déjeuner. 
“- Salut, lui dit-il 
“- Salut, répondit-elle un peu gênée, repensant à la veille. Je suis désolée pour hier soir.
“- Ne le sois pas, c'est plutôt à moi de m'excuser. On t'a imposé notre présence alors que tu n'étais pas bien. 
Elle lui sourit.
“- J’ai préparé le p’tit dèj. Je ne sais pas ce que tu manges, alors j’t’ai fait du café.
“- Je ne bois pas de café, mais c’est gentil. 
“- Qu’est-ce que je peux faire?
“- Je prends du thé, un yaourt et des céréales
“- Ok j’m’en occupe.
Elle sourit et partit prendre une douche. Une fois revenue, elle s’installa à table avec lui. 
“- J’ai prévu d’aller chez mes parents quelques jours après l’audience. J’ai besoin de prendre du recul, de faire le point…
“- Je comprends
Dylan se leva. Lorsqu’il vit son père et Fanny, il lâcha un ‘oui’ de victoire. Il s’installa à son tour. Après le petit déjeuner, ils décidèrent de partir se promener. Vers midi ils mangèrent ensemble puis Fanny rentra chez elle.  Ils décidèrent de se retrouver lundi pour partir ensemble à l'audience. 
Madame Boucoeur téléphona à Fanny pour faire du covoiturage. Ils se rejoignirent vers 14h. Fanny roulait, Madame Boucoeur à ses côtés, Grant et Dylan à l'arrière. Ils arrivèrent une quinzaine de minutes avant le début de la séance. Un agent de sécurité vint les installer en salle d'audience. Quelques minutes plus tard Madeleine entra à son tour. Puis à 15h entra le juge Cromwell. Il invita Grant et Dylan à s'asseoir devant. 
“- Bien, s'exclama-t-il, nous allons commencer la séance. 
A peine venait-il d'expliquer le déroulement de la séance que Bénédicte fit une entrée spectaculaire suivie de son avocat et d'un homme en costume trois pièces.  
“- Vous êtes en retard Mme Babou ! 
“- Nous avons rencontré quelques soucis pour nous stationner. 
“- Il fallait prendre des précautions comme ces messieurs dames l'ont fait. Poursuivons! 
Il interrogea l'un et l'autre, entendit les témoignages que Maître Dunlop l'avocat de Bénédicte tenta de contrecarrer, puis il prit à part dans son bureau  chacun des participants, leur témoignage étant retranscrit par la greffière. Les déclarations de Dylan le touchaient particulièrement. Puis il termina par Fanny. 
“- Vous m'avez l'air bien fatiguée Mademoiselle Darant. 
“- Oui en effet Monsieur le juge. Toute cette affaire m'épuise.
“- Je comprends. J'ai déjà eu à traiter une affaire similaire il y a 16 ans. Malheureusement, ça s'est mal terminé pour le jeune garçon. 
“- Comment ça ? 
“- Son père l'a tué
“- Ça me rappelle un jeune dont mes parents se sont occupés 
“- Robert et Jeanine Darant, oui en effet ce sont eux qui se sont occupés de ce jeune Taho. 
“- Maintenant que vous en parler, je réalise pourquoi Dylan me touche tant. 
“- Contrairement à Taho, vous pouvez sauver Dylan. 
Sur ces paroles, ils retournèrent en salle d'audience où le juge Cromwell donna son verdict. Bénédicte perdit son droit parental et n'eu pas le droit d'entrer en contact avec Dylan. De plus une pension alimentaire serait retirée sur son salaire et les allocations familiales versées à Grant.
Ils sortirent du tribunal vers 18h.
De retour, Fanny chargea la valise qu'elle avait préparée et pris la route pour rejoindre ses parents. 
Ses journées se résumèrent à s'occuper des animaux puis de courir avec Don, et faire des balades à cheval. Elle profita aussi pour discuter du passé avec ses parents. Le mercredi après-midi fut digne d'intérêt. 
“- Dis moi maman, tu te souviens de Taho
Jeanine posa doucement l'assiette qu'elle avait dans les mains et prit une grande inspiration. 
“- Oui je m'en souviens. 
“- Qu'est-ce qui lui est arrivé exactement ? 
“- C'est sa mère qui en avait la garde. Le père qui buvait a été déchu de ses droits par le juge Cromwell. Taho faisait régulièrement des séjours chez nous, comme sa mère avait des horaires de boulot décalés, il retournait chez lui le week-end quand elle ne travaillait pas. Puis un jour, Taho devait avoir 15 ans, son père l'a suivi en rentrant du lycée et l'a enlevé. Mais il était sous l'emprise de l'alcool, il a raté un virage et est allé s'encastrer dans un tracteur qui venait en face. La violence du choc a été telle...elle fit une pause sentant ses émotions la submerger,.... le père est mort sur le coup, Taho a été projeté sur le tracteur, il a eu la colonne vertébrale brisée. Quand les secours sont arrivés, il était toujours vivant. Mais en le déplaçant, une côte a perforé un poumon. Il est décédé dans d'atroces souffrances. On a appris après que Katia, sa mère, avait été conduite aux urgences car il l'avait battue à mort. Elle était défigurée, dans un état lamentable. Quand elle a appris la mort de son fils, elle n'a pas supporté et a mis fin à ses jours. À l'époque tu étais à la maison. Cette affaire t'a tellement bouleversée que tu n'a plus parlé durant un an. Tu as beaucoup dessiné. Puis un jour, sans qu'on sache comment ni pourquoi tu t'es remise à parler. 
“- Est-ce que tu as gardé mes dessins ? 
“- Oui tout est dans un carton au grenier. 
“- Ça t'embête si je le descends?
“- Qu'est-ce que ça va t'apporter de remuer le passé ? 
“- Je ne veux pas remuer le passé, je veux juste qu'il m'aide à comprendre le présent pour construire le futur. 
Jeanine haussa les épaules et tout en soupirant accepta la demande de sa fille. 
Fanny trouva un carton sur lequel était noté ‘Taho’. Elle le descendit dans sa chambre et l'ouvrit. Elle replongea dans ses souvenirs et petit à petit remarqua les similitudes avec l'affaire de Dylan. Elle réfléchit intérieurement.
‘c'est de Bénédicte qu'il faut sauver Dylan. Dans cette histoire c'est elle le monstre, c'est elle qui risque de le tuer. Je comprends mieux pourquoi je suis si attachée à Dylan. Je n'ai pas pu aider Taho. Je n'ai rien pu faire du haut de mes 15 ans. Quand je vois mes  dessins, je retrouve ceux de Dylan. Je comprends mieux maintenant…’
Elle comprenait aussi pourquoi le juge Cromwell l'avait choisi elle pour le suivi de Dylan. Elle s'endormit tardivement et son sommeil fut mouvementé, parsemé de cauchemars.  Le lendemain, elle choisit de s’occuper des chevaux, les panser lui ferait le plus grand bien. Dans la soirée, le repas terminé, son portable se mis à vibrer.
“- Oui?
“- Fanny? Dylan parlait tout bas
“- Dylan? Tout va bien?
“- Oui, j’avais juste envie de t’entendre. Tu me manques
“- Pourquoi parles-tu tout bas?
“- Papa est dans la salle de bain, il m’a dit que je ne devais pas te déranger, mais j’avais trop besoin de t’entendre.
Elle éclata de rire.
“- Tu me manques aussi bonhomme, mais sois patient, je rentre demain.... Tu sais que papa va savoir que tu m’as appelée?
“- Il va bientôt sortir de la salle de bain, je vais devoir raccrocher.
“- Dylan, dis lui la vérité, il ne t’en voudra pas.
“- D’accord, à demain
Il coupa la communication. 
Le lendemain, Fanny prépara sa valise mais ne quitta ses parents qu’en début d’après-midi. Elle devait déposer Don chez la vétérinaire pour de nouvelles saillies.
Une fois Don confié aux bons soins du Dr Svelta, elle emprunta le sentier du parc. Soudain, elle aperçut Grant. Lorsqu’il la vit, il se leva. Il répondit à son sourire.
“- Comment vas-tu?
“- ça va merci
“- Tu as l’air plus reposée
“- Toujours quand je vais à la campagne
“- Tant mieux, je m’inquié…
Elle posa les doigts sur sa bouche.
“- J’apprécie que tu t’inquiètes pour moi. 
Elle s’avança et posa sur ses lèvres un baiser. Il l’observa quelques secondes et lui rendit son baiser. Puis Dylan vint interrompre ce moment en sautant au cou de Fanny. Après quelques minutes d’effusion de tendresse, il souhaita rentrer. Sur le chemin du retour, Grant prit la main de Fanny. Ils marchèrent ainsi jusqu’à son appartement.
“- Mais dis-moi, tu ne m’as jamais raconté comment tu avais rencontré Bénédicte.
Il haussa les sourcils.
“- C’est un moment de ma vie dont je ne suis pas très fier. J’avais 25 ans, je sortais souvent avec des potes. On allait en boîte. Un jour, on avait déjà bien entamé la soirée, Bénédicte est arrivée avec ses copines. Les filles nous ont dragués et après quelques verres supplémentaires, je me suis réveillé dans une pièce que je ne connaissais pas, Bénédicte à mes côtés. On avait couché ensemble, mais je ne m’en souvenais plus. J’avais tellement mal à la tête, que je me suis juré de ne plus boire d’alcool. Je ne voulais plus me retrouver dans ce genre de situation, au lit avec une fille que je ne connaissais que de la veille. Quand je suis sortit de la chambre, mes potes étaient affalés dans le divan avec les autres filles. Je ne me souviens toujours pas de ce qui s’est passé. Ce que je sais c’est qu’un mois après, Bénédicte m’a contacté pour m’annoncer qu’elle était enceinte et que ses parents exigeaient qu’elle se fasse avorter. Pour moi, c’était hors de question! On avait fait une erreur, cet enfant n’avait rien demandé, mais il était là. Je lui ai proposé de l’épouser. Ses parents ont fait la grimace, mais ont fini par accepter. Deux mois après on était marié, contrat de mariage à l’appui. Puis Dylan est né. Notre mariage était un mariage de convenance. Au départ, elle m’accompagnait avec Dylan dans mes voyages d’affaires et petit à petit, elle a espacé ses venues. Puis un jour, elle ne m’a plus accompagné. Je m’arrangeais pour ne pas rentrer trop tard les weeks-end, jusqu’à ce fameux dimanche où je me suis retrouvé face à une maison vendue et vidée de tous ses meubles, avec pour seule explication 6 cartons et un acte de divorce qui était signé mais pas de ma main. Je n’avais pour seule possession que ma voiture et 6 cartons. J’ai dormi dedans durant quelques semaines puis j’ai trouvé cet appart. C’est à force de persévérance et avec l’aide de la police que j’ai pu enfin retrouvé Dylan. La police n’a pas pu me communiquer son adresse et son téléphone, mais c’est son avocat qui m’a contacté. Il m’a demandé mon adresse et à envoyé une assistante sociale pour faire une enquête et voir si j’étais apte à recevoir Dylan. J’étais dégoûté, c’est moi qui avais souhaité qu’on le garde et elle me l’enlevait et m’interdisait de voir mon fils. T’as été une véritable bouffée d’oxygène dans ma vie. Tu m’as donné la force de redoubler d’efforts au moment où j’allais tout lâcher. 
Il se tourna vers elle. 
“- Je te dois tellement. 
“- Tu ne me dois rien. Tu as fait tout ce qu’il fallait parce que tu l’aimes 
Il l’embrassa tendrement.
Arrivés à l’appartement, Dylan proposa de faire un jeu de société en attendant l’heure du repas. Grant et Fanny acceptèrent. Alors que la partie touchait à sa fin, le portable de Grant vibra. 
“- C’est mon patron, je suis désolé.
Il se leva de table et se dirigea vers la cuisine. Lorsqu’il revint, Fanny lu sur son visage son mécontentement.
“- ça ne va pas?
“- J’ai demandé à mon patron de ne plus m’envoyer en négo, de pouvoir les faire ici par skype tu vois. Mais là, le client est à Paris pour voir sa fille et souhaite qu’on discute en direct de la vente de son entreprise. Il ne veut pas avoir à faire à quelqu’un d’autre soit disant que mon collègue a été dur avec lui et ne s’est pas montré compréhensif. Je lui ai dit que je ne voulais pas prendre la décision tout seul et que je le rappellerai pour lui donner ma décision. Se tournant vers Dylan. Qu’est-ce que t’en penses bonhomme?
“- Tu viens avec nous Fanny?
“- Ce n’est pas prévu au programme, répondit-elle
“- Si tu viens pas, j'viens pas…
"- Oui mais si tu ne viens pas qui va te garder ici?
"- Eh bin...Fanny!
"- Tu n'crois pas t'exagères? Fanny vient juste de rentrer de chez ses parents que tu lui sautes dessus. Et puis, elle a peut-être quelque chose de prévu ? Ils se tournèrent vers Fanny. 
"- Non, je n'ai rien de prévu en particulier. 
"- Alors je peux rester ici avec toi?
"- Et si on accompagnait papa à Paris, qu'est-ce t'en penses?
"- Oh oui!!
"- T'es sûre de toi? Lui demanda Grant
Elle posa un baiser sur ses lèvres en guise de réponse.
"- Ok j'rappelle mon patron.
Lorsqu'il revint, il leur annonça qu'ils prenaient le train une heure plus tard. Tandis que Grant préparait sa valise, Fanny aida Dylan pour la sienne puis ils passèrent chez elle. Moins d'une heure plus tard, ils étaient dans le train qui les menait à Paris. Durant le trajet, Dylan s'amusa à s'asseoir tantôt à côté de l'un, tantôt à côté de l'autre. Puis ils arrivèrent en gare Montparnasse où Grant héla un taxi qui les déposa au Grand Hôtel. Un groom les guida jusqu'à leur suite et monta leurs bagages. Le repas ayant été pris dans le wagon restaurant, Dylan ne rechigna pas à se mettre en pyjama et à se coucher. Ils le couchèrent et l'embrassèrent tous les deux. C'est un petit garçon détendu et serein qui sombra dans les bras de Morphée. 
Au petit matin, Fanny, comme à son habitude, enfila un survêtement et sortit courir. Lorsqu'elle revint plus d'une heure plus tard, Grant avait fait monter le petit déjeuner. Après une bonne douche, elle s'installa sur la terrasse avec sa tasse de thé et son bol de céréales. Elle fut rejoint par Grant puis par Dylan. La négociation était prévue pour le repas de midi. Elle se passa très bien et l'affaire fut conclue. À 14h30, ils décidèrent de se balader sur les Champs-Elysées. Ils firent quelques magasins et retournèrent à l'hôtel. Grant leur proposa une soirée culturelle. Il offrit à Dylan un petit costume trois pièces et à Fanny une ravissante robe de soirée. Après un opéra de Wagner (le vaisseau fantôme ), il terminèrent la soirée au restaurant. 
“- Alors qu'avez-vous pensé de notre petite soirée parisienne ? Interrogea Grant 
“- La musique, c'était bien. Mais c'était un peu long et j'ai rien compris à ce qu'ils disaient. Répondit Dylan en toute franchise. 
“- Pour moi, c'était une première. J'ai trouvé certains morceaux très prenant. Comme Dylan, je n’ai pas tout compris non plus des dialogues mais j'ai beaucoup aimé.  Merci de m'y avoir emmenée. 
“- Si tu veux c'est un drame fantastique qui se noue autour du héros, un capitaine de navire (le hollandais) condamné à errer sans fin sur les mers, à moins de rencontrer une âme pure et vierge, seule capable de racheter ses fautes. Cette histoire c'est un peu la nôtre. Tu es mon âme pure, tu me rachètes de mes fautes. Dylan est heureux, moi je me sens bien avec toi et j'aimerais que ça dure la vie entière. 
Il se leva de table et posa un genou à terre. 
“- Est-ce que tu veux être mon âme pure pour la vie?
Il ouvrit un boîtier noir contenant une bague fine en argent surmontée d'une amétis. Fanny sourit à cette déclaration peu commune. Puis elle prit son visage entre ses mains et posa sur ses lèvres un baiser. 
“- Oui je veux bien. 
Il l'embrassa de nouveau sous les applaudissements des convives de la salle. Dylan se leva à son tour et la prit dans ses bras. 
“- Je savais bien qu'un jour tu deviendrais ma maman.”
Elle le serra très fort contre elle.
Puis Grant commanda les desserts. Tout en les dégustant,  ils discutèrent du voyage de retour du lendemain et de son organisation. Le repas terminé, ils se levèrent et remontèrent dans la suite. Dylan, exténué, se mit rapidement en pyjama, se brossa les dents et se coucha sans demander son reste. 
Le lendemain après son jogging matinal et sa douche, ils prirent le petit déjeuner à trois sur la terrasse puis rassemblèrent leurs affaires et quittèrent la chambre. 
De retour chez eux, ils décidèrent de se retrouver pour midi et demi. Fanny profita du temps qu'elle avait pour ranger ses affaires, démarrer une lessive et faire un gâteau. Puis elle rejoignit Grant et Dylan. Ils passèrent une après-midi détente à faire des jeux de société. Puis, ils profitèrent de la dernière semaine de vacances pour parler mariage qu’ils fixèrent en août. 

Sauver Dylan (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant