Chapitre 5

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Pendant un instant, je me tourne vers le clochard pour le fusiller du regard. Celui-ci ne bouge pas d'un cil, visiblement, mon expression ne le dérange pas du tout... ce qui est à peine étonnant. Culadra a l'art d'être tellement je-m'en-foutisme que même l'apocalypse ne l'atteindrait pas. Peut-être que le seul moyen de l'atteindre était de s'en prendre à ses précieuses plantes vertes.

— Bon, qui a invité qui encore ? m'écrié-je.

Draca lève le doigt et prend la parole avec une pointe de dédain :

— J'aurais bien voulu invité des gens, mais on me l'a interdit.

— Quoi ? T'as pas le droit d'inviter des gens ? s'étonne le clochard.

— Bien évidemment qu'elle ne peut pas ! Ses amis étaient des humains !

— Je peux faire comme si j'étais humaine pendant quelques temps ! riposte-t-elle avec beaucoup de vigueur en serrant les poings.

— Quand tu apprendras à ranger tes canines et que tu arrêteras de te mordre les lèvres avec !

Elle soupire et croise les bras. Malheureusement, elle sait que j'ai raison. Elle est encore loin de gérer son potentiel vampirique et elle était encore bien trop dangereuse pour côtoyer des humains. Mais j'étais persuadé qu'un jour, elle se rebellera et traînera en ville sans mon consentement. Après tout, elle avait toujours du mal à m'écouter.

— Bon... On lui ouvre ou il va attendre longtemps dehors ? demande Dracoca-cola.

— Bah ouvre-lui alors !

— Parfait ! Comme ça je ferais les présentations et je lui dirai de s'essuyer les pieds sur les murs !

Je fronce un instant les sourcils, mais il ne le remarque pas et s'empresse d'ouvrir la porte.

À notre plus grande surprise, nous sommes face à une éventualité que nous n'avions pas envisagée jusqu'alors. Après tout, nous imaginions toutes les cinq minutes que Dracula allait débarquer et que les longues disputes familiales allaient reprendre de plus belle. La réalité est tout d'autre, bien différente que tout ce que vous avez pu imaginer.

Alors qu'on s'attendait à tomber sur Dracula ou un énième cousin de notre famille, nous sommes face à... rien. Il n'y a personne. Littéralement personne.

— Ah bah mince alors... J'étais vraiment prêt à l'accueillir.

Une mine triste se dessine sur le visage de Dracoca-cola et il va même jusqu'à verser une larme de sang. Enfin, si tant est qu'on puisse appeler ça du sang vu la couleur marronnée et la texture pétillante du liquide.

— Mais qui peut bien avoir sonné ? Quelqu'un a invité des fantômes ? s'enquiert l'allemand. Parce que, clairement, ce serait la pire blague à faire.

Nous avions essayé une seule et unique fois de convier quelques fantômes à nos festivités. Au début, tout se déroulait à la perfection. Ils étaient amicales, gentils, ouverts à toute discussion. Puis est venu l'heure du gâteau... Et tout a dégénéré. Contrairement aux autres disputes, ce n'était pas le gâteau le conflit principal, mais plutôt le fait qu'aucun vampire ne les avait sauvés de la mort via une transformation. Ils avaient donc dirigé toute leur haine à notre égard. Puis le conflit s'était de nouveau centré sur le gâteau, pour une tout autre raison.

Depuis, nous avions décidé de ne plus les inviter, même si un ou deux fantômes étaient venus s'excuser et semblaient vraiment triste de ne plus participer à nos festivités. Malheureusement, on ne pouvait plus prendre le risque.

— Ou peut-être que quelqu'un du voisinage a voulu faire une petite blagounette, a sonné et est parti en courant, lance Culadra comme hypothèse.

Draculien ou le cousin raté de DraculaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant