Chapitre 6

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Dracoola s'attend vraiment à ce que nous réagissons à son arrivée, et surtout, de manière positive, voire très positive. Mais aucun d'entre nous ne daigne bouger son petit doigt et encore moins son petit orteil. Personne n'allait l'accueillir et il allait rester planté en plein milieu du hall en faisant des claquettes.

Oui, il fait vraiment des claquettes. En plus, il croit qu'il est doué alors qu'il a quand même réussi à se vautrer une bonne dizaine de fois en quelques secondes. C'est vraiment un spectacle lamentable et ce fut suffisant pour faire soupirer Drakuler une bonne dizaine de fois.

J'étais prêt à rester ainsi – stoïque – un bon bout de temps. Du moins, jusqu'à ce que Culadra réduise l'ampleur de cette scène à néant et s'approche de son cousin pour le prendre dans ses bras.

— Oh putain ! Ça faisait trop longtemps qu'on t'avait pas vu bro ! s'écrie-t-il d'une voix toujours aussi pâteuse et lente.

— Bah ouais ! Comme si j'allais rater cette petite sauterie ! rétorque le cousin qui fait genre qu'il est "cool" alors que pas du tout.

— Tu savais que j'avais invité Dracula ?

— Sérieux ? Mais c'est une excellente idée ça ! Il me manque trop ! s'enthousiasme Dracoola.

— Bah ouais ! Ça fait méga longtemps qu'on ne l'a pas vu ! Je ne sais pas du tout pourquoi d'ailleurs !

Dracoola se tourne alors vers moi, l'air un peu niais et innocent.

— Ne serait-ce pas à cause d'une histoire de part de gâteau ?

— Personne ne veut entendre parler de cette histoire ! PERSONNE !

Dracoola lève alors innocemment la main, suivi très rapidement de Draca.

— Tu t'y mets toi aussi ? m'étonné-je en me tournant vers la concernée.

— Bah quoi ? On n'arrête pas de parler de gâteaux de la discorde, j'aimerais bien savoir pourquoi au bout d'un moment !

— Ça n'a pourtant aucune importance...

— C'est vrai que c'était une histoire assez... médiocre, lance Drakuler. Et si vous la racontez, je n'ai clairement pas envie d'être les parages. Du coup, je m'en vais dans la réserve de sang voir ce que nous pourrions servir pour ce soir.

Il quitte la pièce et nous nous regardons tous dans le blanc des yeux. S'ils pensent que je vais raconter cette histoire de gâteaux... ils se trompent totalement ! Jamais je ne veux me rappeler de ce soir-là. Et encore moins du soir avec les fantômes ! Et non plus celui avec les loups-garous... Et je crois qu'il y a une autre espèce de saloperies, mais je ne me rappelle plus lesquels. Peut-être qu'il s'agissait des trolls, mais en même temps, ils font toujours exprès de tout foirer. Parfois, on peut les comparer à des génies du mal, ce qui ne serait pas incohérent.

Vous seriez étonnés de toutes les créatures que j'ai pu croiser dans ma vie (ou dans ma mort). Malheureusement, la plupart n'étaient pas aussi amicales qu'on pourrait le croire. Mais je crois que le pire était les lutins. Ces petites saloperies ont foutu le bordel partout chez moi et sont même jusqu'à foutre des confettis dans mon cercueil et personne, au grand jamais, PERSONNE ne doit toucher à mon cercueil. D'ailleurs, vous aimeriez vraiment qu'on mette plein de confettis dans votre lit ? Je ne crois pas non !

— D'abord le gâteau, puis la guitare, puis encore le gâteau... On ne pourra vraiment pas savoir ? lâche Draca, assez excédée. Pourquoi j'ai rien le droit de savoir ici ?

— Peut-être parce que tu es une enfant ? tente Culadra.

— J'avais dix-neuf ans quand j'ai été transformée ! Je suis totalement une adulte !

Dracoca-cola l'interrompt en levant son index :

— Pas par chez moi ! Tu ne peux pas boire d'alcool et tu peux encore moins jouer aux jeux d'argent !

— Et qu'est-ce que j'en ai à foutre dans le fond ? Je ne vais tout de même pas être interdit de faire ça pendant des siècles et des siècles !

Dracoca-cola pose son index sur la lèvre inférieure et prend quelque temps de réflexion. On s'attend à ce qu'il lui réponde au bout de quelques secondes, malheureusement, ce temps s'allonge de plus en plus. Du coup, Dracoola en profite pour reprendre ses claquettes – qui sont toujours aussi pourries que tout à l'heure.

Le soda ambulant lève son index comme s'il venait de trouver la réponse, puis il se retient. Visiblement, il est encore en pleine réflexion et nous pourrons attendre très très longtemps ainsi. Les États-Unis étaient loin de lui faire du bien...

— Malheureusement, Draca, tu resteras pour toujours une enfant, finit-il par dire.

— Mais j'ai dit que j'avais dix-neuf ans, pas quinze ans !

— La différence ? demande-t-il en arquant un sourcil.

Draca se contente alors d'un facepalm comme seule réponse et elle a probablement dû apprendre à reproduire le fabuleux facepalm de Drakuler, c'est comme si je ressentais la même énergie dans ce geste. Elle est vraiment douée cette gamine des fois...

— Mais pourquoi on se fait chier avec des nombres alors que personne ne compte vraiment son âge ici ? lance Culadra avec un léger rire.

— J'ai 280 ans, répond aussitôt l'américain.

— Quoi ? Tu comptes vraiment ?

— Bah bien sûr, je le note sur mon DracPhone.

Il sort son téléphone et celui-ci lui glisse des mains pour finalement atterrir par terre. L'écran se fissure et un liquide rouge et visqueux s'écoule sur le carrelage.

— Bon... Bah c'est cassé, fait-il remarquer.

— En effet... Et pourquoi il y avait du sang dedans ?

— Parce que c'est un Dracpel.

— Connais pas.

— C'est pourtant la meilleure marque de téléphone !

Ça y est, Dracoca-cola commence à hausser la voix, ça va vraiment mal finir cette histoire. Enfin, la clochard ne semble pas vraiment réagir et se contente d'en rire tout en continuant de fumer son joint.

Soudainement, un bruit sourd retentit et toute dispute cesse. Je reconnais aussitôt l'origine de ce son. Il provient du jardin. Et plus particulièrement... de la cabane où se trouve la guitare. La fameuse guitare...

Draculien ou le cousin raté de DraculaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant