Soul Moony

12

Aucune lumière ne filtre à travers les rideaux et je n'ai aucune indication sur l'heure qu'il peut être dans cette chambre. Je laisse peu à peu les limbes du sommeil derrière moi pour revenir lentement sur Terre dans une quiétude que je n'ai pas éprouvé depuis longtemps. Mon esprit semble être dans une harmonie parfaite et je n'ai aucune envie de quitter ce nid douillet dans lequel je me trouve. Je me sens bien, si bien.

Pourtant, cette literie a une texture différente de la mienne et c'est ce qui m'interpelle en premier. Ce n'est pas la mienne. L'odeur qui provient des draps à beau être envoûtante, elle n'est pas à moi. Je ne suis ni dans mon lit, ni même chez moi. Je n'ai pas envie de réfléchir, j'ai juste envie de continuer à respirer ce parfum enivrant en profitant de la chaleur que la couette a à m'offrir.

Lentement, pernicieusement, la vérité s'insinue dans mon esprit, tel un serpent qui glisse sur le sol : j'ai couché avec Hayden. Pire, j'ai adoré ça et chaque parcelle de mon corps hurle qu'elle veut recommencer. Cette chambre où je me trouve ne peut être qu'à une seule personne : à lui. C'était l'ultime preuve de notre aventure.

J'étais bourré, mais chaque détail est clair dans mon esprit. Nous en avions envie tous les deux et nous avons cédé à ce désir sans penser aux conséquences. Qu'avons-nous donc fait ? Pourquoi me voulait-il tant alors qu'il est en couple ? Ce n'est pas possible. Ce n'est qu'un mauvais rêve. Je vais me réveiller d'une minute à l'autre dans ma chambre étudiante et tout aura repris son cours normal. Je ne viens pas d'être l'amant d'Hayden, je ne viens pas de briser un couple et des amitiés.

Tandis que je m'étale sur le dos tout en fixant le plafond, je me repasse le film de cette nuit. Je n'arrive pas à comprendre comment les choses ont pu évoluer dans cette direction. D'accord, on s'est retrouvé seul. D'accord, on a dansé de façon un peu trop sexy. Mais de là à finir dans un lit ? J'ai l'impression qu'il y a un élément central sur lequel je n'arrive pas à mettre le doigt. Comme s'il me manquait une pièce du puzzle, celle qui donnerait un sens final au reste du tableau. Qu'est-ce que cela peut bien être ?

Je lutte contre moi-même pour trouver le courage, l'attraper à deux mains et me décider à enfin quitter ce cocon réconfortant. Je pense que c'est l'une des plus grosses épreuves de ma courte vie. Je suis incapable de savoir quel comportement adopter. Hayden est forcément debout, puisqu'il n'est plus à mes côtés, ce qui rend impossible l'envie de partir en catimini. De toute façon, je suis incapable de lui faire ça. Je sais que la confrontation est inévitable et ça me terrifie. Malheureusement, je ne pourrais pas rester terré ici pour l'éternité.

Sous l'exaspération, mes doigts se frayent un chemin dans mes cheveux pour les tirer. Qu'est-ce que je dois dire ? Qu'est-ce que je dois faire ? Il n'y a pas le manuel du parfait petit amant qui existe ? Amant. Je déteste ce rôle que je me retrouve à endosser. Pourquoi est-ce que je n'ai pas pensé aux conséquences avant d'avoir les lèvres d'Hayden sur les miennes ? Avant d'avoir son sexe en moi ? À ce souvenir, mon corps chauffe. Bordel, cette nuit était si torride. La partie irrationnelle de mon cerveau est intransigeante : ça ne peut pas être notre seule fois ensemble.

Las, je finis par me lever et je revêts mes habits de la veille. J'aimerai emporter avec moi le tee-shirt d'Hayden pour pouvoir garder un souvenir de son odeur, mais je crois que ce ne serait pas raisonnable. À regret, je l'abandonne sur le lit avant de quitter la pièce. La porte vient de grincer, je ne peux plus reculer. Je m'aventure donc dans le mini couloir pour rejoindre le salon où j'y retrouve Hayden.

Il est installé au comptoir qui sépare son petit salon de sa cuisine, le regard fixé sur sa tasse de café, comme si elle comportait les réponses à tous les maux de l'univers. Je l'observe un moment, détaille son profil et analyse ce regard perdu qu'il arbore. Regrette-t-il ce qui s'est déroulé cette nuit ? Ce serait normal. Il a trompé son petit-ami avec moi. Dans quel merdier est-ce que l'on s'est fourré ?