Chapitre 9 : Un plan tordu

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- Non mais ce n'est pas possible. À la place du terme de gourde dans le dictionnaire il faudrait inscrire ton nom Isa, c'est fou quand même ! soupire Fiona en secouant la tête d'un air de pitié qui me met hors de moi et me fait oublier la douleur en deux secondes.

- Fais-moi plaisir et vas te balader sur un glacier, genre un endroit où si tu parles personne ne t'entendra, je grommelle en appuyant une poche de glace sur ma cheville blessée.

Heureusement, parmi les touristes il y a un médecin qui m'a diagnostiqué une bonne foulure, plus de peur que de mal.

Stan et moi nous sommes mis d'accord implicitement sur les circonstances de l'accident et la version officielle est que j'ai trébuché sur un pavé dans la cour.

Mais dans cette version et la réelle je passe pour une empotée.

Stan a dû m'aider à marcher pour rejoindre les dortoirs et la situation était plus que gênante car je n'arrivais pas à oublier ce que notre proximité avait réveillé chez lui mais aussi je dois l'avouer un peu chez moi.

J'ai honte de passer pour une dévergondée mais cela fait si longtemps que je n'ai pas été désirée par un homme que de voir franchement une lueur d'envie briller dans les beaux yeux du gentil Stan m'a toute émoustillée.

Même si ce n'est rien comparé à ce que j'ai ressenti quand l'inconnu m'a embrassée.

Je retiens de pousser un cri de rage.

Ce mec me fait faire n'importe quoi, je vais finir par vraiment me blesser si je continue à lui courir après comme une abrutie.

- C'est à croire que tu le fais exprès, me sermonne Zoé, assise sur son lit en face du mien, avec comme d'habitude un roman sur les cuisses.

J'en ai marre de leurs remarques ! Un peu de compassion c'est trop demandé ?

- Vous vous êtes mises d'accord avant notre départ pour vous liguer contre moi ?

Je plaque un oreiller sur ma figure avant de pousser un cri rageur de frustration étouffé par celui-ci.

Je sens le matelas s'affaisser signe que Fiona ne tient pas compte de mes menaces et de mon énervement à son égard.

- Sans rires, mais il faut dire que Stan a l'air ravi de jouer les sauveurs, tu as de la chance d'être jolie ça a l'air de compenser le reste à ses yeux.

Oui enfin ce n'est pas juste à ses yeux que ça a l'air de plaire... Mais je ne vais pas m'aventurer sur ce terrain-là où mes sœurs vont se faire une joie de me faire honte, une fois de plus et ça suffit, j'ai eu ma dose pour les vingt prochaines années je pense.

- Je vais faire quoi moi maintenant avec mes allures de canard boiteux ? je demande en poussant un gémissement plaintif.

Fiona reste complètement insensible à ma tristesse et m'arrache le coussin du visage.

- Stop le bureau des pleurs ! Cette situation bien que, complètement, heu,

Elle semble chercher les mots adéquats pour ne pas me vexer.

- Bref, tu peux tirer tout ça à profit Isa !

Je hausse légèrement un sourcil, ce qui est très difficile à faire croyez-moi, intriguée.

- Développe un peu car j'ai peur de ne pas saisir toute l'étendue de ton ironie.

Fiona me fait un large sourire et son regard pétillant de malice ne me dit rien qui vaille.

- Tu es impotente et Stan est un employé du château.

Elle mime deux personnages qui se collent avec ses mains.

Je jette un coup d'œil à Zoé qui elle aussi paraît sceptique.

- Non mais il n'est pas à son service non plus, rétorque-t-elle.

Fiona lève les yeux au ciel comme si elle était agacée par notre manque d'entrain face à son idée farfelue.

- Oui mais il en pince pour elle, ça crève les mirettes ! Il se fera un plaisir de veiller à son chevet.

Je secoue alors la tête, pas vraiment convaincue par son semblant d'explication mais n'insiste pas car quand elle a une idée dans la tête, impossible de la lui enlever.

- Je ne vais pas rester alitée toutes les vacances, je proteste en croisant les bras, comme une gamine boudeuse.

- En même temps difficile de te laisser utiliser des béquilles. Dieu seul sait ce que tu serais capable de te péter avec ! insinue sournoisement Fiona en me faisant un petit sourire diabolique.

Je le scrute attentivement, essayant de trouver un angle d'attaque.

- Dis donc toi, la fouineuse, tu ne devrais pas profiter d'être à la montagne pour respirer l'air pur et frais au lieu de rester enfermée à embêter ta sœur qui est coincée dans un dortoir ?

- En effet j'ai d'autres choses à faire, grommelle Fiona.

Ouf, elle va enfin me laisser tranquille ! Elle se lève et balance les béquilles par terre à côté du lit.

Son visage s'est assombri et elle ne pipe plus aucun mot avant de sortir de la pièce. Je me tourne alors vers Zoé en espérant que celle-ci m'éclaire un peu sur le comportement bipolaire de sa jumelle.

- C'est quoi son problème ? je demande.

- Elle se faisait une joie de passer du temps avec toi car vu que tu étais tout le temps fourrée avec Ben à flipper car il t'envoyait constamment balader et te rabaissais, tu lui as manquée et en plus je pense que ça doit l'agacer de te voir comme ça, malheureuse et tellement perturbée que tu ne fais attention à rien.

Je n'avais pas vu les choses sous cet angle. Il faut dire que Fiona est quelqu'un de très exubérant qui ne mâche pas ses mots mais a du mal à s'ouvrir sur ses propres ressentis.

- Et toi ?

Zoé me fixe en fronçant les sourcils.

- Quoi moi ?

Je lève les yeux au ciel.

- Je te saoule aussi avec ma maladresse ?

- Non je sais que tu ne le fais pas exprès et puis de toutes façons tu es comme tu es et tu ne vas pas changer alors autant s'y faire !

Sur ses paroles que je ne sais pas comment prendre, elle retourne à son livre. Je me demande si elle a des amis, je ne me suis jamais posée la question pour Fiona qui est très sociale mais Zoé, a-t-elle une vie sociale ? Est-elle heureuse ? Il faudra que j'aborde la question un jour avec elle.

Je décide de me lever, empoigne les béquilles et m'appuie dessus. Je grimace quand mon pied touche le sol mais il est hors de question que je passe la journée ici.

- Je vais aller me balader, il parait qu'il y a un étang dans le parc. Tu veux venir ? je propose à ma sœur.

- Non merci je suis bien là.

Au moins elle n'est pas du genre à me prendre la tête. Fiona va se calmer quand elle aura sympathisé avec des filles de son âge. J'en ai vues certaines au repas hier soir.

Moi je vais me concentrer sur mon livre, c'est un bon plan ça.









Romance D'un Été [Roman Court - Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant