Chapitre 20

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«Je préfère échouer dans une chose que j’apprécie que de réussir dans une chose que je déteste» – George F. Burns

Natsu Dragneer

          D’un pas rapide, je marchais dans les rues désertes, abandonnées, grises et mornes sous un ciel gris charbon. La pluie, forte et calme à la fois, tombait lourdement et s’écrasait dans ces ruelles étroites, contre les vitres des maisons, contre les rares voitures qui passaient en se hâtant. Je marchais en sentant mon cœur se serrer, se crisper, cesser pendant quelques secondes ses battements pendant que je me le demandais, me posais cette question encore une fois : «Que vais-je lui dire ? »

          Devrais-je commencer par la saluer, par lui dire un vague bonjour et tourner autour du pot comme un pauvre idiot ? Ou plutôt devrais-je aller droit au but, me lancer dans le vide et oublier tout le reste ?

          Ces questions, ces infâmes questions me tracassaient, me tiraillaient et je me trouvais divisé, partagé; et si je laissais tomber tout ça? Et si je retournais chez moi ? Et si j’oubliais tout cela ? C’était vrai, après tout, je n’avais qu’à ignorer les innombrables reproches, ces innombrables questions et regards noirs que Lucy risquait de me lancer, fermer les yeux sur ce qu’il s’était passé ou prétendre que ce ne fut qu’un rêve. Je pouvais ignorer Lucy, tout simplement. Ce n’était pas comme si elle était quelqu’un de spécial, ce n’était pas comme si je me sentais mal ou que je regrettais tout ce qu’il s’était passé, ce n’était pas comme si j’avais abusé d’elle. Pas comme si c’était la première fois que j’embrassais une fille.

          Alors pourquoi tant d’hésitations ? Pourquoi tant de questions ? Pourquoi tant de peur, d’inquiétude, de malaise ?

          Je me figeais et levais la tête.

          Devant moi se tenait l’immeuble de Lucy, la lumière de sa chambre allumée, les volets fermés, et l’intérieur semblait si calme, tellement calme, paisible, presque rassurant, accueillant, chaud, réconfortant et bienveillant. Je sentis mes pensées se diriger vers Lucy et son regard chocolat, sa gentillesse, sa voix si aigue et pourtant si douce, son caractère si spécifique et la douceur de sa peau. Je me demandais quel regard adoptera-t-elle lorsqu’elle me verra, quelle expression prendra son visage, quelles syllabes prononceront ses lèvres. Je songeais aux derniers mots qu’elle m’avait lancé, cette nuit-là et je sentis mon cœur se serrer encore plus, s’étouffer et tenter de reprendre ses battements, faible et attendri, malade et douloureux. Hésitant et perdu.

          J’inspirais un grand coup d’air et me dirigeais vers le hall d’entrée.

          «Tout ira bien, Natsu, pas besoin de t’inquiéter autant. »

 

Valérie Heartfilia.

          Vide.

          L’appartement de Lucy était vide. Dénudé de tout sentiment, toute sensation, toute chaleur et bien-être. Vidée par n’importe quel réconfort ou joie, il semblait avoir adopté les humeurs tristes et mornes du ciel, semblait avoir vieilli et s’être refroidit, comme si, silencieux et patient, il attendait que la mort ou que la vie revienne. Comme s’il attendait que les couleurs, les sentiments, la chaleur revienne. Comme s’il croyait que bientôt des cris et des larmes, des discussions murmurées à l’oreille, des secrets inavoués allaient revenir. Comme si Lucy allait rentrer.

Le jour où nos chemins se sont croisés Où les histoires vivent. Découvrez maintenant