Chapitre 23

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Chapitre 23

«La vie serait un film lent mais sans moments perdus, parfaitement ajusté, loin de l'impossible réalité.»

Francis Dannemark

          J’ai le cœur en miettes.

            Mon esprit est divisé, hésitant, confus, désemparé. Chaotique.

            Je suis perdue. Peu importe ce que je fais, peu importe le moment, mes pensées me ramènent encore et toujours à lui, me rapportent son image, ses mots, les moments de gaieté que j’ai partagé avec lui. Me rappellent à quel point j’ai été heureuse, rayonnante, pleine d’assurance. Dans la noirceur de ces dernières semaines, j’avais presque oublié tous ces petits détails, qui se sont laissé envahir volontairement par ma colère, ma tristesse, ma douleur. Par ce cœur brisé qui continuait de battre.

            Je ne veux pas me souvenir de ça. Je ne veux pas resonger à ce que j’ai perdu et me remplir la tête de ces ‘’si’’ et ‘’peut-être’’ qui ne risquaient pas d’arriver. Je ne veux plus penser à lui, à son visage, à ses yeux, à ses lèvres. À ces conversations perdues.

            Et pourtant me revoilà encore, en train de gratter sur cette blessure qui venait à peine de se refermer. J’avais oublié à quel point ça faisait mal de le revoir. Cette impression d’avoir le souffle coupé en permanence, de chercher de l’oxygène en vain et de t’étouffer en silence était revenue de force lorsque mes yeux se sont posé sur lui. À ce moment-là, j’avais eu tellement de choses à dire, tellement de reproches, tellement de cris à libérer.

            Mais je n’ai rien dit, évidement. Je me suis contentée de continuer à m’étouffer, ainsi, seule, tremblante, perdue et confuse, en me jurant de ne plus jamais faire confiance à Mira.

            «Au revoir, Lucy

            Je frisonne.

            -Lucy, si je ne te connaissais pas, j’aurais juré que tu avais le cœur brisé !

            En sursautant, je me tournais vers Yukino et la regardais. Surprise. J’avais oublié qu’elle était à côté de moi, tellement j’étais emmêlée dans mes pensées. J’avais presque oublié que nous étions allées à un bar, que nous avions bu quelques verres et que la conversation s’est vite éteinte, faute de mots, de phrases, d’histoires à raconter. Qu’est-ce que je pourrais bien lui dire ? Qu’est-ce que je pourrais bien lui répondre, lui raconter, lui répliquer ?

            Je n’ai jamais été dans une telle posture, auparavant. Avec Mira, Levy, Jubia et parfois Erza, la conversation se faisait toute seule, sans qu’on ait besoin de chercher sans succès ou de prévoir des sujets sur quoi discuter à l’avance. C’était simple, facile, et tellement confortable.

            Ces discussions au soleil me manquent, à présent. Cette simplicité, ces sourires et ces rires, me manquent.

            -Et te revoilà, tu replonges dans tes pensées, glousse Yukino en me faisant un clin d’œil. Alors, c’est qui l’imbécile qui t’a fait du mal ?

            -Tu le connais pas, rétorque-je en prenant un air refrogné. Et je n’ai pas envie d’en parler.

            Froides. Mes paroles ont été froides et ont eu pour don de clore la discussion. De la fermer, d’installer un silence entre nous, un silence glacé, inconfortable, rempli de remords. Je n’aurais pas du lui parler ainsi; après tout, Yukino ne faisait qu’essayer d’apprendre à me connaitre. Elle s’est peut-être inquiétée en me voyant ne pas lui répondre.

Le jour où nos chemins se sont croisés Où les histoires vivent. Découvrez maintenant