Chapitre 10

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Elle m'enjoint de la rejoindre sur mon lit, et de lui raconter ce qui ne va pas. Je lui explique alors ce qu'il s'est passé. D'une façon très brève. Je lui raconte que ça s'est passé très rapidement, que j'ai perdu les pédales, le contrôle de tout, et que j'ai fait une crise de panique – ou d'angoisse – je ne sais pas comment appeler ceci. Elle m'écoute attentivement, et me demande si j'avais l'impression de tomber, comme si j'allais faire un malaise. Je sais très bien ce qu'est un malaise vagal, j'en ai fait deux l'année dernière en l'espace d'un mois, et cela n'a aucun rapport avec ce que j'ai eu aujourd'hui. Rien. Je lui réponds alors que non, je n'ai pas fait de malaise, je ne me sentais pas à en faire un. Alors elle répète que j'avais quand même peut-être l'impression de tomber, que j'ai pris une peur bleue, et que c'est pourquoi j'ai fait cette attaque. Mais je n'en suis pas convaincue. Alors je réponds « peut-être ». Puis, elle me demande comment je vais en ce moment, mis à part ça. Je suis toujours en train de pleurer des larmes qui ne cessent de tomber en rafale sur mon visage. J'essaye tant bien que mal de les essuyer dès lors que je les sens perler à mes yeux, mais il y en a trop, alors j'arrête. En vrai, je ne comprends pas sa question. Je ne réponds rien. Je n'ai sûrement rien à répondre. Alors elle reformule sa phrase.
- Depuis quelques semaines j'ai l'impression que quelque chose ne va pas. Tu ne nous parles plus, tu es stressée tout le temps, tu nous envoies balader, tu t'enfermes dans ta chambre, tu lis des livres déprimants... Qu'est-ce-qui se passe, hein ? demande-t-elle d'une voix tendre et douce.
Je hausse les épaules.
- Lire et regarder des films qui te font pleurer c'est pas forcément une excellente idée. Tu peux avoir des idées noires après, tu ne crois pas ?
Je ne réponds toujours rien. Les livres et les films n'y sont pour rien. Ça me fait du bien de lire, d'apprendre de nouvelles choses, de découvrir et surtout de m'échapper dans un autre monde. En tout cas, quand je lisais encore.
- Je te l'ai déjà dit, maman, murmurai-je. Les livres n'y sont pour rien. J'y vois de l'espoir, moi.
- Tu n'as pas l'impression de faire une dépression, hein ?
A ce moment je ne savais pas ce qu'était la dépression, et je ne me sentais pas si mal que ça, ni « malade ». Alors je haussais les épaules, et répondis :
- Mais non. Je ne pense pas. Non.
- L'hiver, le lycée, le changement, la fin de l'année, les hormones, c'est vrai que c'est pas la période la plus facile à vivre... Tu sais que si tu as besoin d'aide, je suis là. Et on peut aller te faire voir quelqu'un, un psychologue, ma puce.
- Oui, je sais, maman. Ça va aller, je suis juste fatiguée. Merci.
Elle quitte ma chambre, et mon cœur se brise en mille morceaux. Comme s'il n'était déjà pas assez effrité comme ça. Souffrir, c'est une chose. Mais faire souffrir ma mère, mon père, mes parents, mes proches, c'est inconcevable. Pourquoi est-ce que lorsque l'on va mal, que l'on a la merde jusqu'au cou, il faut que l'on emporte tout le monde avec soi ? Ne pouvons-nous pas juste nous briser, et partir seul, sans personne qui nous suive ?

Broken and LostOù les histoires vivent. Découvrez maintenant