LE DESTIN DE SOFIA EPISODE 1

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Nous sommes en 1998 quand le pouvoir a basculé dans mon pays.  C’était un coup d’état militaire qui a renversé le président Joseph Gnombi. Dans la dynamique de donner la chance aux plus méritants, le Général Dosso, le chef de la junte militaire a mis en place un système de rigueur qui consiste à recruter les meilleurs travailleurs. C’est dans cette optique que Monsieur Bamba, mon père a été nommé DAF (Directeur Administratif et financier) au ministère des affaires publiques. C’était une nouvelle ère qui s’ouvrait sur le pays où le mérite prime sur les relations.

Fière de sa nomination, Papa a décidé de déménager de son ancien quartier. Il prit une maison à la dimension de ses nouvelles fonctions dans un quartier chic de la capitale. Comme dans tous les pays africains, après la nomination d’un fils du village à un grand post dans l’administration, tout le monde se mobilise pour féliciter ce dernier lors d’une grande fête. Cela n’a pas été le cas pour Papa. Il refusa catégoriquement cette pratique qu’il a jugée dépassée :

- Simone je te dis non et je ne reviendrai plus sur cette question

- Georges je te comprends parfaitement, n’oublie pas que nous sommes en Afrique, il n’est pas bon de se mettre en marge des habitudes d’un peuple, lui dit sa femme Simone

- Tu sais pourquoi l’Afrique est en retard, rétorque Bamba Georges

- Pourquoi ?

- Parce qu’on refuse de se défaire de nos mauvaises habitudes, je suis nommé parce que j’ai mérité ce post. Pourquoi une fête pour cela ? On doit se concentrer sur le travail que de perdre le temps dans des fêtes inutiles…

- Ok compris Georges, il était de mon devoirs en tant que ta femme d’attirer ton attention pour ne pas que tes parents m’accusent plus tard.

Informé de son refus pour la célébration de la fête, son frère aîné essaie de le raisonner mais Papa ne voulait entendre raison. Tonton Moussa tente d’impliquer leurs deux parents pour qu’ils parlent à papa. Cela fit mais papa resta sur sa position. Très en colère tonton Moussa décide alors de ne plus lui adresser la parole. Mis au parfum de la nouvelle décision de son frère Moussa, Papa, de façon radicale interdit tous ses parents de le fréquenter. Selon lui cette décision de son grand frère est absurde et jamais il lui pardonnera. J’avais l’impression que papa attendait ce moment pour rompre les liens avec toute sa famille. Cet argument n’était pas valable pour qu’il prenne une décision pareille. Pépé et mémé de leur côté ont jugé la position de papa très méchante à la fois ridicule, ils rentrent dans la danse en décidant de ne plus mettre les pieds chez nous. Papa ne semble pas être inquiété. Il continua à mener sa vie tranquillement.

Maman, gênée par l’attitude de son mari vas tenter une médiation  entre Papa et ses parents mais en vain. Nous voici isolés de toute ma famille paternelle et tous les autres membres du village de papa. J’avais seulement 16 ans à ce moment et j’étais quasi impuissante face à Papa. Si ma mère n’a pu le raisonner, ce n’est pas moi, une adolescente qui y arriverait. L’atmosphère est restée tendue dans ma famille pendant un bon moment.

Un an après, Papa acheta une grosse villa dans une banlieue de la ville. A nouveau nous déménageâmes dans ce nouveau domaine.   Dans la nouvelle maison de papa, nous vivions heureux, nous ne manquions de rien sauf le fait que nous soyons isolés. Papa n’acceptait pas que nous fréquentions nos voisins. Des consignes strictes ont été données au personnel de la maison de ne laisser personne entrer dans la maison. Dans le quartier personne ne nous rendait visite. Aucun membre de sa famille ne connaissait la nouvelle maison. Étant toute jeune, au début je ne trouvais pas d’inconvénients  à cela jusqu’à ce qu'un jour je pose la question à Papa :

- Quand tu seras assez grande tu comprendras, me dit papa

- Je suis déjà grande papa, et je suis un peu triste parce que je me sens seule, pas d'ami dans le quartier, je n'ai pas le droit de voir mes cousines… papa tu ne trouves pas que tu es un peu dur ?

- Ça suffi Sofia, rentre dans ta chambre, je n'ai pas envie de discuter avec toi

- Papa s'il te plait…

- Sofia je dis en chambre

Je file dans ma chambre le visage rempli d’amertume, papa à son tour quitte lui aussi le salon et regagne sa chambre où l'attendait maman :

- Pourquoi cette mine George ? Lui demanda maman

- Sofia m'ennuie avec ses questions d'enfant gâté

- Ne trouves tu pas qu'elle a raison ?

- N'en rajoute pas s'il te plait. Je fais de mon mieux pour que vous ne manquiez de rien, ne me demandez pas plus.

- Georges tout le monde nous critique dans ce quartier, je pense qu'il est temps que tu changes ta position je t'en supplie mon chéri, fait le pour le bien de tes enfants. Aujourd’hui ils n'ont ni cousins ni cousines, pas d'ami et pour ma part je pense que cette vie est pire que la prison.

- J'ai compris madame mon épouse je verrai, pour l’heure, suis un peu fatigué, j’ai besoin de repos, bonne nuit.
Après cette conversation maman avait bon espoir que les choses allaient changer mais rien. Nous vécûmes ainsi pendant toute l’année scolaire. L’école, la maison, les week-ends dans les parcs d'attractions et tout. Une seule chose nous manquait. Le contact avec les autres en dehors de l’école.

Un soir étant devant sa télévision le téléphone de papa sonne, c'est son cousin du village qui lui annonce le décès de sa Mère. Papa a fait la soude oreille, il a refusé de passer la nouvelle a sa femme jusqu’à ce qu'elle l’apprenne de la bouche de la femme du frère de papa tonton Moussa :

- Georges tu exagères cette fois. Ta propre mère quand même. Tu te mets en danger et aussi la vie de tes enfants. Moi j’irai au village rencontrer tes parents trop c'est trop.

- Écoute, tu mets les pieds au village à ton retour tu descends chez tes parents, j'ai été claire avec toi, je n'ai plus de parents, qu'ils assument leurs actes. Je respecte ma parole et tu me connais très bien.

Les menaces de papa ont fait plier maman, elle renonça à son projet. Néanmoins elle décide de faire partir l'argent au village par le canal de sa rivale, la femme de tonton Moussa. Mais grande fut sa déception quand oncle Moussa l'a appelé pour la menacer :

- Merci pour le geste que tu as voulu faire mais nous sommes désolés, nous avons les moyens pour nous occuper des obsèques de notre mère.

Tonton Moussa retourna l'argent. On dit en Afrique c'est pendant les moments de tristesse qu'on se réconcilie mais dans la famille de Papa ils n'ont pas compris cet adage. Chacun campa sur sa position. Un an après, c'est le tour de grand Papa de rendre l’âme. Papa n'a n'ont plus réagi. Ce unième comportement est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Papa s'est fait des ennemis. Même dans sa belle famille. Celle-ci le menaça de lui arracher leur fille le traitant d'inhumain. Papa semblait droit dans ses bottes. Dans son service c’était pareil, ses collaborateurs le regardèrent différemment le soupçonnant d'appartenir à une société secrète. Pour papa, seule sa petite famille et son travail comptaient. Il mena sa vie tranquillement.

A suivre ...

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