Guillaume but une énième gorgée de sa bière, un petit sourire aux lèvres, alors que son regard suivait la silhouette d'Aurélien en train de danser sur la piste de danse. Il avait l'air complètement hors de tout, dans son monde, et son sourire s'élargit à cette pensée, heureux de le voir aussi détendu. Cela faisait déjà plus de deux mois qu'Aurélien et lui habitaient ensemble, près de trois semaines depuis la fois où il l'avait réveillé après son cauchemar à propos de ses parents. Il était véritablement heureux de partager sa vie avec lui, aussi niais que ça puisse paraître de penser ainsi. Ils n'avaient cessé de se rapprocher ces derniers temps, petit à petit, et Guillaume se disait que ce qu'il ressentait à présent pour Aurélien était bel et bien de l'amour. Plus qu'une simple attirance physique, avec les semaines il s'était rendu compte qu'il était véritablement tombé amoureux de lui. Il aimait rentrer chez lui et le retrouver dans leur canapé, où il le rejoignait pour passer la fin de la journée de la meilleure manière possible : à ses côtés. Des fois, Aurélien s'endormait tout contre lui et Guillaume attendait quelques minutes avant de le réveiller pour lui dire d'aller se coucher dans son lit, aimant secrètement ce contact discret que lui offrait inconsciemment le plus jeune. Il rentrait des fois plus tard et Aurélien était en train de cuisiner et un fin sourire s'inscrivait alors directement sur ses lèvres en sentant la bonne odeur qui s'échappait de la cuisine...
Il lui avait fait rencontré ses amis, avec qui d'ailleurs ils passaient la soirée ce soir-là, à l'Embuscade, comme il en avait l'habitude avant l'arrivée d'Aurélien dans sa vie. Ils avaient un peu bu, rigolé, partagé des anecdotes, et lorsque les 1h du matin furent passés, le petit bar s'était transformé en piste de danse pour permettre aux habitués des lieux de passer un bon moment avant de rentrer chez eux. Claude s'était élancé sur la piste de danse en lui criant de le suivre et il avait rigolé avant de se tourner vers Aurélien pour l'inviter à le suivre en lui tendant la main, un sourire attendri sur le visage. Aurélien avait rougit avant d'accepter la main qu'il lui tendait et il l'avait entrainé sur la piste de danse, essayant de rattraper Claude qui était déjà bien loin devant. Guillaume sortit de ses pensées en croisant le regard du plus jeune sur lui et quand celui-ci lui sourit doucement, il finit son verre d'une traite pour aller le rejoindre. Claude avait raison. Il devait lui avouer ses sentiments. Et ce soir, c'était le moment parfait.
***
Il l'avait embrassé. Son cœur rata un battement, ou même plusieurs, en comprenant ce que son corps venait de faire. Il s'était penché vers Aurélien pour lui murmurer à l'oreille qu'il avait envie qu'ils s'éloignent un peu de la foule pour qu'il puisse lui dire quelque chose mais leurs lèvres s'étaient rencontrées avant que les siennes ne puisse atteindre l'oreille du plus jeune. Puis son regard croisa celui d'Aurélien qui semblait mortifié et il comprit : il ne l'avait pas embrassé, non, c'était Aurélien qui avait fait le premier pas. Et celui-ci semblait à présent complètement figé sur place, comme s'il se rendait seulement compte à l'instant de ce qu'il avait osé faire.
« Orel, je... dit-il en déglutissant, ne sachant pas vraiment lui-même ce qu'il voulait lui dire.
— Oh mon dieu, murmura Aurélien en reculant brusquement d'un pas. Je suis désolé... Je ne sais pas ce qui m'a prit... »
Il vit un flash de terreur passer dans les prunelles sombres du plus jeune et l'instant d'après, avant que son corps n'ait le temps de se remettre en mouvement, il le vit tourner les talons afin de s'enfuir. Littéralement.
« Attend, Orel ! » l'appela-t-il en criant, essayant de le rattraper dans la foule.
Aurélien jeta un œil par-dessus son épaule en l'entendant l'appeler et lui lança un regard effrayé avant de secouer la tête et de continuer son chemin vers la sortie. Guillaume essayait de ne pas le lâcher du regard mais la foule commençait à s'épaissir entre eux et il le perdit finalement de vue. Lorsqu'il arriva enfin dans la rue, il tourna la tête dans tous les sens afin de le retrouver et, en le voyant s'éloigner à pas rapides sur le trottoir, il s'élança vers lui.
« Orel...! Qu'est-ce que tu as, pourquoi tu pars ?! »
Le plus jeune tenta d'accélérer l'allure et il l'attrapa alors par l'avant-bras pour éviter qu'il ne lui échappe de nouveau, faisant se retourner Aurélien au contact.
« Guillaume... Lâche-moi... lui dit Aurélien d'un air terrifié et Guillaume fronça les sourcils, confus.
— Non, non, je ne veux pas que tu partes comme si de rien n'était, Orel ! Arrête de fuir, dis-moi ce qui ne va pas.
— Je ne peux pas, s'il-te-plaît... Je suis désolé.
— Et bien moi aussi je suis désolé, Orel. Je suis désolé mais je refuse que tu partes comme ça, sans aucune explication, dit-il en haussant le ton. Je veux comprendre ce qui ne va pas. Est-ce que c'est parce qu'on s'est embrassés ?
— Je t'ai embrassé, rectifia Aurélien en secouant la tête et cherchant toujours à se dégager de son emprise. Je n'aurai pas dû, je suis désolé...
— Si tu t'en veux par rapport à ce baiser, ce n'est pas grave, Orel, le coupa Guillaume en lâchant alors son bras afin de pouvoir prendre son visage entre ses mains. Ce n'est pas grave, tu m'entends ? D'ailleurs, si tu ne l'avais pas fait, je l'aurais sûrement fait moi.
— Qu'est-ce que... Qu'est-ce que tu racontes, Guillaume ? bégaya Aurélien en remontant ses mains sur ses poignets afin de lui demander de le lâcher. Ce n'est pas vrai...
— Si, je te jure que c'est vrai. Quand je me suis penché vers toi, c'était pour te demander de me suivre. Je voulais te parler, te dire ce que je ressens pour toi depuis des semaines maintenant. Je n'ai plus envie de me cacher, de mentir, Orel. Alors maintenant que tu sais ça... dit-il en plongeant son regard dans celui du plus jeune, lui offrant un petit sourire. Est-ce que tu regrettes toujours de m'avoir embrassé ? »
Il vit le regard sombre d'Aurélien plonger dans le sien à son tour, tellement profondément qu'il lui semblait sonder son âme, et le plus jeune secoua la tête en éclatant en sanglots.
« Mais je ne peux pas... Je ne peux pas te faire ça, l'entendit-il dire à travers ses larmes et Guillaume entendit au loin le tonnerre gronder alors que la pluie commençait à tomber.
— Qu'est-ce que tu ne peux pas me faire, Orel ? Qu'est-ce qui ne va pas ? » demanda-t-il doucement alors qu'il l'attirait à lui pour le serrer fort contre son cœur.
Ils restèrent un moment ainsi, Aurélien ne lui répondant pas, avant qu'il ne l'entraîne sans jamais le lâcher, afin de rentrer se mettre à l'abri de la pluie chez eux. Aurélien se laissa faire et il le serra un peu plus fort contre lui pour le protéger de la pluie qui tombait à présent violemment sur eux alors qu'il pensait d'un air soucieux : Mais qu'est-ce que tu me caches Orel, de si important ?