Herrialde

III.DEUX LUNES ? (I)

Une brise s'éleva vers elle emportant dans son sillage les effluves de l'étendue d'eau sous les lunes. Lily ne pouvait détacher son regard de ces lunes qui illuminaient le ciel, faisaient danser les vagues dans un ballet parfaitement orchestré et apaisant pour elle. L'eau arriva jusqu'à elle la rappelant à l'ordre, elle tendit la main la seconde fois ne résistant pas à cet appel. Qu'elle ne fût pas la surprise de Lily quand elle vit dans sa paume, une eau incolore. L'étendue d'eau à perte de vue, était d'un bleu luisant qui laissait croire que c'était l'eau qui était de cette couleur. Une lune, étrangement, se reflétait dans l'eau et d'elle émanait cette lumière bleue dont les rayons se réfléchissaient sur la surface de l'eau. Tandis que la seconde, plus petite était semblable à celle qu'elle observait les soirs de pleine lune. Lily posa sa main sur le sable mouillé, qui était aussi doux que du coton. Elle ferma les yeux, ressentit une nouvelle fois la fraîcheur de l'eau sur ses doigts et huma cet air marin à la fois familier et non.

Des battements d'ailes, sur sa droite, détournèrent son attention. Elle ne put voir l'animal qui laissa curieusement une étrange trainée dorée dans son sillage qui aussitôt disparaissait des rochers emportée par les légères vagues. Il devait s'agir d'un animal assez conséquent car Lily devait plisser des yeux pour observer ces rochers.

—Waouh ! S'exclama une voix près d'elle.

Kate venait de résumer en un simple mot toutes les émotions qui la parcouraient. Elle venait de confirmer, surtout, qu'elle n'était ni folle ni sous l'influence d'une quelconque drogue.

— Tu as une idée d'où est-ce qu'on est ? Lui demanda Kate fixant l'horizon.

— Je n'en ai aucune idée répondit-elle, il n'y a aucune étoile dans le ciel qui pourrait aider à nous situer.

Kate lança un regard surpris à son amie.

— Cache ton scepticisme ironisa-t-elle, Nolan a eu une période astronomie, j'étais obligée de le surveiller les soirs alors j'en ai profité pour apprendre quelque truc pour tuer le temps.

Un silence entre elles s'installa pendant quelques secondes durant lesquelles leurs méninges tournaient à plein régime. Se souvenant qu'elles étaient dans une librairie, regardaient le contenu d'un livre que tenait...

— NOLAN crièrent-elles ensemble en se regardant.

— Pas besoin de crier geignit-il assis juste derrière elles. C'est quand même fou le temps que vous avez pris pour vous demander où j'étais, spécialement venant de toi ma propre sœur.

— Ce n'est pas la fin du monde lui dit-elle levant les yeux au ciel. Bon ce n'est pas tout, il faut qu'on dégage d'ici.

Lily sortit son téléphone, pour appeler Martin où qu'il se trouvait si elle lui disait qu'elle avait des problèmes il viendrait. C'était soit lui soit sa mère, et il était beaucoup plus fiable que sa mère.

— Déjà essayé lui dit Nolan, pas de réseau ici.

— Il existe des endroits où il n'y a pas de réseau ! s'étonna Lily, on a remonté le temps, c'est ça ?

— Laisse-moi aussi t'apprendre que certaines personnes n'ont pas d'eau courante au 21ème siècle, déclara sèchement Kate.

— Arrête de me prendre pour une idiote de Kingstrich répliqua Lily. Je suis perturbée par tout ça dit-elle en agitant ces bras.

— Comme nous tous, mais pas besoin de dire des inepties.

— Tu as pris quoi aujourd'hui ma vieille. Ce n'est pas de ma faute si on n'est au beau milieu de nulle part avec deux lunes pour nous éclairer ! alors cherche quelqu'un d'autre sur qui passer ta colère.

— Pas de ta faute ? répéta Kate violemment. Qui est venue me chercher, alors que j'étais tranquillement chez moi, pour aller dans la librairie la plus suspecte du monde ?

— Blâme Nolan alors, c'est lui qui voulait y aller.

— Rien n'est jamais de ta faute, c'est tout à fait typique de toi marmonna-t-elle.

— Qu'est-ce que tu viens de dire ?

— On se calme s'écria Nolan paraissant le plus mature du trio sur la plage. On a d'autres soucis assez importants, au lieu de se disputer il faudrait mieux rester calme et chercher à savoir d'abord où on se trouve, ensemble, appuya-t-il sur ce mot et ensuite trouver une solution pour joindre nos familles. Étape par étape, je propose que l'on commence par là sur ces mots il se leva et pointa du doigt la végétation en arrière.

Il indiqua la végétation derrière lui, aucune d'elles ne l'avaient remarquée ce qui les fit les sentir encore plus gênées, ajouter au fait qu'elles se faisaient sermonner par un garçon qui n'avait même pas encore dix ans.

— Faisons ça déclara Kate en avançant la première d'un pas décidé.

Kate ne comprenait pas ce qui lui avait pris, d'où lui venait cette envie de s'imposer. Jamais elle n'aurait parlé ainsi à Lily, nul besoin de se mentir à elle-même elle avait déjà pensé ce genre de paroles, le fait de remettre un peu Lily à sa place était un rêve inavoué devenu, à présent réalité. Subitement, elle se sentait capable de lui tenir tête, de dire ce qu'elle voulait et cela sans regrets. Elle a toujours été une fille ayant du répondant aux personnes qui s'en prenaient à elle, mais savaient parfaitement peser ces paroles pour éviter d'avoir d'énormes répercussions. Ce terme n'était pas vraiment adéquat, il ne s'agissait pas de peser des mots, mais plutôt que quelque chose l'empêchait d'aller plus loin que ce qu'elle désirait. Kate ne se sentait plus censurée. La peur l'envahit se rappelant la dernière fois qu'elle avait ressenti cette fugace liberté.

Sans un regard en arrière, Kate avançait toujours à vive allure voulant s'éloigner le plus possible de Lily. La lumière des lunes peinaient à éclairer à travers l'épais feuillages des hauts arbres, plus elle s'enfonçait dans ce qui semblait être une véritable jungle plus les arbres se révélaient être plus grands que ceux qui les précédaient. Elle voulut passer au-dessus d'un tronc d'arbre couvert de mousse d'une couleur méconnaissable avec le peu de luminosité qu'elle avait, sa tentative fût vouée à l'échec. L'arbre sur lequel elle s'était appuyé était lui aussi de cette mousse, qui n'en était pas une enfin de compte, parce que sa texture gluante lui avait fait perdre l'équilibre et atterrir sur les fesses.

Pendant qu'elle se massait le coccyx et jurait une bible entière d'injures, un écho de rire parvint faiblement à son oreille. Petit à petit Kate commençait à mieux voir autour d'elle, des lucioles s'étaient mise à l'entourer procurant plus de lumière. Elle finit par comprendre que dans cette étrange jungle rien n'était ce qui semblait être, parce que à sa connaissance aucune lucioles n'émettaient de lumière bleue. Ainsi, elle s'aperçut qu'elle se trouvait près d'une chute d'eau silencieuse. L'eau s'écoulait, frappait contre les pierres en contrebas il s'y trouvait même des grenouilles mais aucun son n'émanait de ces animaux ou de la chute d'eau. L'écho du rire perça une nouvelle fois le spectacle silencieux sous les yeux de Kate.

Le rire entraina la dispersion de toutes les lucioles, la laissant toute seule dans une faible obscurité et dont le silence lui glaçait le sang. Kate décida de rebrousser chemin et de rejoindre les autres, mais se rendit bien vite compte qu'elle ne savait absolument pas où elle se trouvait et de quelle direction elle venait. A chaque pas, la panique montait en elle, elle accéléra le pas au point de se mettre à courir dans un sens puis dans l'autre, passant devant un arbre qu'elle croyait avoir déjà vu puis un autre et encore un autre. Kate finit par s'arrêter à bout de souffle. Ce fut à ce moment-là qu'elle ressentit une fulgurante douleur à l'arrière de la tête avant de sombrer dans le noir