Chapitre 9 - Une nouvelle partie

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J'ai devant moi un chemin qui s'enfonce dans une forêt sombre. Il semble ne pas avoir de fin. Je regarde derrière moi, m'attendant à voir la porte. Il n'y a plus rien. Elle a disparu. A sa place, un autre chemin similaire au premier la remplace. Je suis en plein milieu d'une forêt que je devine immense, avec un chemin qui part de chaque côté. Je décide de rester sur ma première vision. J'emprunte le premier chemin repéré. Le paysage devient vite monotone. Des arbres partout. Plus j'avance, plus il y en a. Au bout de plusieurs heures de progression, j'aboutis sur une clairière. En contrebas, je vois très distinctement un point d'eau alimenté par une cascade. C'est tentant. La soif me tenaille, il faut que je boive. Dès que je sors de l'abri des arbres, je ressens une drôle de sensation. L'air se met à vibrer. Un bruit familier, juste un peu désagréable, comme lorsque l'on est sous une ligne à haute tension. Le grésillement est continu. Bien que je ne sois pas très à l'aise, je continue à avancer vers le point d'eau. Elle m'attire comme un aimant. Je m'agenouille pour boire. Pas longtemps, ma première gorgée avalée, le bruit devient strident. Une vision d'horreur me submerge. Des milliards d'insectes foncent sur moi. Ils sont tellement nombreux qu'ils obscurcissent mon champ de vision. Il fait soudain nuit. Tous mes sens en alerte, je m'apprête à résister. Mais à résister contre quoi ? Je ne tarde pas à l'apprendre à mes dépends. Les insectes en question, sont en fait, de minuscules bouts de métal qui me piquent et me transpercent de toute part. La douleur est insoutenable. Je tente un instant de résister. J'ai saisi mon épée à deux mains. Par des mouvements de moulinet, j'essaie de les repousser. C'est peine perdue, ils sont trop nombreux. Je n'arrive à rien. Il ne me reste qu'une solution, plonger. Mon instinct me dicte de le faire. Il ne se trompe pas. Les insectes métalliques tombés des arbres s'arrêtent au niveau de l'eau. Certains, poussés par leur élan, ne parviennent pas à freiner. Ils plongent et se désagrègent instantanément. L'eau ne leur réussit pas. Je suis sauvé. Pas tout à fait. Ils sont toujours là, à m'attendre. Je ne peux pas revenir à la surface. Je suis coincé. Je nage sous l'eau jusqu'au bord opposé de la mare. C'est mon instinct qui me guide. Je décide de lui faire confiance. Je parviens à bout de souffle sur l'autre rive. Je vais me noyer si je ne remonte pas immédiatement. Je résiste jusqu'au bout en avalant ma salive pour retarder le plus possible le moment où j'émergerais. Je suis à bout, je dois sortir. Je transperce la surface, prêt à subir une nouvelle attaque. Le temps de prendre une gorgée d'air et je replonge. Ouf ! Ils n'ont pas eu le temps de réagir. Les yeux grands ouverts, je guette leur réaction. Le bruit produit par leur cliquetis est toujours là. Je ne les vois pas au-dessus de moi. Ils se tiennent à l'écart. Soudain, je comprends. J'émerge sans crainte de l'autre côté de la cascade, à l'abri derrière un rideau d'eau. Ici, ils ne peuvent pas m'atteindre. J'éclate de rire.

« Je vous ai bien eus ! Venez me chercher ici si vous l'osez ! »

Je jubile, pas pour longtemps. Ce n'est qu'un faible répit. Je ne vais pas pouvoir rester dans l'eau indéfiniment, il me faut sortir et ils sont toujours là. Tels des vautours ayant repéré leur proie, ils se rassemblent pour le festin. Je suis loin d'être tiré d'affaire. Que faire ? Attendre en espérant qu'ils s'en aillent. Peut-être qu'une fois la nuit tombée ils partiront. L'attente commence.

La nuit et le froid s'installent. Insidieusement, mes os se glacent. Je suis tétanisé. Je n'ai qu'une envie, sortir et me mettre au sec. L'obscurité n'est pas encore totale, lorsque quelque chose au-dessus de moi attire mon attention. Je crois tout d'abord qu'il s'agit des oiseaux métalliques. Ils sont là, serrés en rang compact, leur cliquetis emplit la nuit qui commence. Seul un va et vient permanent situé environ à trois ou quatre mètres de moi vient briser l'homogénéité de mes prédateurs. Quoi que ce soit, cela parvient à franchir l'obstacle formé par les oiseaux. Je n'arrive pas à voir ce que c'est. J'use mes yeux à tenter de percer l'obscurité sans parvenir à définir l'origine de ce mouvement. Jusqu'à ce qu'une partie du mouvement plonge subitement vers la surface de l'eau. Je comprends. Ce sont des chauves-souris qui viennent s'abreuver. La nuit tombée, elles sortent en nombre pour se nourrir. Pour une raison que j'ignore, les oiseaux métalliques ne les agressent pas. Les chauves-souris vont et viennent sans courir le moindre danger. En soit, cela ne m'aide pas beaucoup. Sauf, que ces mammifères sortent d'un endroit derrière la cascade. Je pense à une grotte. Au vu du nombre, elle doit être énorme. En plus, elle n'a pas l'air d'être trop haute. Il faut que j'aille voir. Au pire, elle est juste assez grande pour m'accueillir et de toute façon je serais au chaud et à l'abri, au mieux, elle dispose peut-être d'une sortie qui me permettra de m'échapper de ce traquenard. Je prends appui sur le rebord sous la cascade et parviens non sans mal à m'extraire de l'eau. Le froid a complètement engourdi mes membres. L'ascension s'annonce dangereuse. La paroi est recouverte de terre et de mousse humide. Je glisse. Pas moyen de poser un pied ou une main sur une prise stable. Il me faut plus d'une heure pour atteindre mon but. Je m'assois à l'entrée pour reprendre mon souffle. Devant moi, l'eau forme un véritable rideau blindé empêchant tout accès aux oiseaux de malheur. Il fait nuit noire, je ne peux pas les voir, mais j'entends leurs cliquetis par-dessus le bruit de la cascade. Ils n'ont pas l'air de vouloir partir. Je dois tenter ma chance par la grotte. Je me lève, prêt à m'enfoncer dans l'obscurité. Une voix s'élève dans la nuit :

TUNNEL (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant