Chapitre 11 - On a retrouvé Isabela

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Nous avançons d'un bon pas. Le soleil au loin lèche les hauts arbres de la forêt encerclant le château. Le feuillage vire doucement à l'orange. Il ne tardera pas à rougeoyer. Il faut faire vite. Les dons d'Aude associés à ceux de Vincent nous permettent d'avancer avec assurance. Richard ne se sert presque plus du plan. Les prémices s'annoncent faciles et même agréables. L'allée centrale est pavée de petits carrés de mousse, nos pieds s'enfoncent juste ce qu'il faut dans cet épais tapis. Des fleurs, toutes plus belles les unes que les autres, ornent les bas-côtés. Elles s'ouvrent à mesure que nous avançons. Des oiseaux chatoyants volent au-dessus de nos têtes. Un vrai conte de fée. Par moments, des lapereaux à peine effrayés par notre intrusion, traversent le chemin avant d'aller se réfugier bien à l'abri dans l'épaisse haie élevée de chaque côté. Qu'il fait doux se promener dans cet endroit après toutes les vilaines choses rencontrées dans le château et ses sous-sols ! Cela semble trop facile mais peu importe. Nous restons sur nos gardes et n'en perdons pas une miette. Pourvu que nous ne nous soyons pas trompés et que ce soit le bon labyrinthe. Nous n'avons plus de provisions et la nuit commence à tomber. Rien autour de nous ne nous annonce une quelconque possibilité de nous réapprovisionner. Pas d'endroit non plus pour dormir. Le fond de l'air se rafraîchit, la nuit risque d'être froide. La luminosité baisse sensiblement. Les oiseaux sont toujours là, mais leur vol se fait moins gracieux. Les lapereaux aussi adoptent un autre comportement. Ils fuient toujours devant nos pas, mais leur course est moins rapide. Ils traînent un peu les pattes. L'obscurité, doucement, insidieusement, remplace la lumière du jour.

Les oiseaux amorcent maintenant des vols en piquets vers nous.

« Aïe ! Saleté de piaf, attends que je t'attrape ! »

Arthur vient de se faire piquer par le bec d'un oiseau. Il saute sur place tentant de l'attraper. Tommy le tire par la manche.

« Viens Arthur, il ne faut pas traîner. Attention où vous mettez les pieds vous autres ! »

A peine vient-il de terminer sa phrase que j'exécute un roulé-boulé. J'ai trébuché sur un lapin qui me lance un regard haineux. Ce n'est d'ailleurs plus un lapereau, on dirait un vieux lièvre pas content du tout. Lui et ses copains se traînent de plus en plus jusqu'à finir par totalement embouteiller le passage. Les oiseaux se relaient maintenant dans une danse qui n'a d'autre but que de tenter de nous perforer la tête de leur bec. Nous accélérons, les mains sur nos crânes. Je constate après m'être relevé que j'ai les mains et les avants bras striés de coupures. Le sol n'est plus une agréable allée de gazon, mais un chemin caillouteux traversé par des ronces. Juste avant que le soleil ne disparaisse complètement, j'aperçois les lapins. Les gentilles bestioles ne sont plus. Elles ont fait place à d'énormes rats d'égouts aux dents longues et effilées comme des dagues. Ils nous imposent leurs rythmes. Il y en a partout, nous sommes encerclés. Les oiseaux ont eux fait place aux horribles oiseaux de fer. Les revoilà, Tommy avait vu juste, ils m'ont retrouvé. Les fleurs ont perdu de leur beauté, les pétales pendent lamentablement. Elles semblent mortes, mais ce n'est qu'une impression. Elles se sont transformées en plantes carnivores pour certaines, tandis que les autres projettent tantôt de l'acide qui vient perforer le sol à nos pieds, tantôt une fumée nauséabonde qui à coup sûr doit être mortelle. Le pays enchanteur n'est plus. Il s'est transformé en paysage cauchemardesque. Nous voilà replongés dans le laid et le danger. L'épreuve n'est pas finie.

Soudain, tout se complique. Une nuée impressionnante d'oiseaux de fer vient masquer le peu de clarté fournie par la pleine lune. Il fait presque aussi noir que dans une grotte. Les rats se sont arrêtés et forment un mur tout autour de nous. Les ronces envahissent le chemin et viennent s'enrouler autour de nos pieds. La haie elle-même semble se refermer sur nous. La fumée rejetée par les plantes tueuses nous saisit à la gorge. Il faut réagir. Tommy dégaine ses deux pistolets. Il en passe un à Richard

TUNNEL (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant