Je n'ai pas l'impression d'être confinée. Ce premier jour a comme un air de vacances assez plaisant. Je me lève tard. Dehors, il fait un temps magnifique. le soleil est déjà haut dans le ciel et illumine le quartier résidentiel dans lequel se trouve mon appartement. Tout est calme à l'extérieur, c'est plaisant.
Les voitures sont toutes garées sur le parking. Pas une place n'est manquante. On dirait que tous les habitants de notre résidence sur deux étages sont au complet pour cette période. Cela m'arrache un sourire. Pour le moment, je ne me rends pas compte ce qu'il se passe. Qu'on me laisse plusieurs jours pour m'y habituer et on verra si je ne deviens pas folle de solitude.
En attendant, je profite simplement de cet état de grâce où tout semble allez pour le mieux. Même le miroir de ma salle de bain est clément ce matin. Mes tâches de rousseurs ressortent sur la peau pâle de mon visage, mais aucune cerne ne vient maquiller mes yeux noisette. J'ai dormi comme un loir. Je défais la longue tresse qui retient mes boucles noires afin de les attacher en queue de cheval. Je parviens même à trouver belles les vergetures blanches qui serpentent sur mes cuisses et tracent des sillons sur l'arrondi de mes fesses. Je les cache rapidement en enfilant mes vêtements de sport.
Avant le petit-déjeuner, c'est yoga !
Il est hors de question que ce confinement ne me fasse déroger à mon rituel matinal, même si je l'exécute à dix heures au lieu de sept ! Vêtue d'un leggins colorés qui moule mes fesses et souligne la largeur de mes hanches et d'un soutient-gorge de sport qui retient ma poitrine, j'entre dans mon salon plongé dans l'obscurité. Le soleil tente vainement de s'y infiltrer en glissant ses rayons sous les interstices de volets, mais je l'y invite en les ouvrant grandement. Un sourire étire mes lèvres. Je murmure pour moi-même que ça va être une bonne journée.
***
Bien installé, le printemps apporte avec lui les effluves fleuris des jardins qui entourent la résidence. Installée dans un fauteuil sur mon balcon, je profite de l'après-midi pour lire, mais je ne suis pas très concentrée. Tout m'attire. Je profite si peu de l'extérieur qu'aujourd'hui que j'y suis confrontée, je laisse mon esprit vagabonder.
Si aucun humain ne doit sortir, les animaux ne sont pas soumis aux même règles. Le parking est envahi de chats. Ces animaux domestiques que leur propriétaire laissent traîner partout profitent de notre absence pour reprendre leur droit. Une énorme bestiole rousse se dore la pilule au soleil, profitant de la chaleur du béton, tandis qu'une autre, encore bébé, essaye de grimper sur le toit d'une voiture. Ses pattes arrières posées sur le rétroviseur, le chat ne semble pas vraiment savoir quoi faire.
Un autre, tapi dans l'herbe, a repéré un oiseau. J'observe, fascinée, son corps plaqué sur le sol. Ses poils blancs sont loin de se fondre dans la nature, mais sa proie ne l'a toujours pas remarqué. Il se prépare à bondir. Le museau collé sur le sol, il soulève son arrière-train qu'il remue de façon comique. Même depuis le deuxième étage, je peux apercevoir le mouvement de sa queue, seule élément sombre de son pelage.
Et soudain, l'animal bondit. J'imagine le fauve sortir ses griffes, mais c'est une véritable déconvenue qui l'attend ! L'oiseau s'envole, laissant le chat désœuvré. Je ris, avant de détourner mon regard vers mon balcon. Il est peut-être temps que je continue ma lecture. J'ai promis à Pauline que je lui donnerai mon avis le plus rapidement possible pour qu'elle puisse en parler sur nos réseaux sociaux. Eh oui, la communication d'une maison d'édition ne s'arrête pas pendant le confinement et mon amie compte bien le prouver !
Je m'installe confortablement. Les rayons du soleil accrochent la couverture aux reflets verts et illumine le papillon en relief qui s'y trouve. J'esquisse un sourire en saisissant mon téléphone portable pour prendre une photo et l'envoyer à ma collègue. Elle pourra toujours caler une petite publicité pour ce livre qui a rejoins notre collection récemment. Je l'ouvre et entame ma lecture.
***
J'ai à peine le temps de finir la deuxième page que j'ai commencé que du bruit retentit chez mon voisin. Je fronce les sourcils en glissant un coup d'œil vers son balcon qui se trouve à moins d'un mètre vingt du mien. Ses volets s'ouvrent, lentement. C'est à cette heure là qu'il se lève ? Je secoue la tête pour chasser cette pensée. Après tout, il fait bien ce qu'il veut ! Pourtant, lorsque j'entends la clenche, mon cœur rate un battement. Il va sortir. Je referme mon livre, l'estomac noué. Mon voisin que je n'ai jamais rencontré va sortir sur le balcon, à son tour, et nous sommes assez proches pour qu'il me voie. Ma timidité refait surface, mais je la remballe sévèrement. Cela fait un petit moment que j'ai quitté l'école et tous ces idiots qui m'ont forcé à me renfermer.
Depuis que je travail, depuis que je suis une adulte entrée dans la vie active, je n'ai plus peur de ça ! Je ne devrais pas, du moins ! Pauline m'a beaucoup aidé sur ce point. Déterminée à ne pas lui faire honte - alors même qu'elle ne peut pas me voir -, j'ouvre mon livre et tente de me replonger dans la lecture tandis que le voisin fait son apparition sur le balcon, une guitare à la main.
En caleçon.
On peut dire que certains ne sont vraiment pas pudiques.
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Le balcon d'à côté
RomansAlison ne connaissait pas son voisin, jusqu'à ce qu'une pandémie l'oblige à rester confinée chez elle à l'aube du printemps. C'est l'occasion pour la jeune femme de lire, installée au soleil sur son balcon. Mais son voisin, lui aussi confiné dans so...