J'écris à Pauline pour lui donner mon avis sur le livre que je viens de terminer. Il était temps ! Elle me remercie par message et je sais que je vais voir apparaître le fruit de ma lecture dans très peu de temps sur nos réseaux. Je pousse un soupir en me dirigeant vers mon frigo. Il est temps de me préparer à sortir affronter le monde pour faire les courses.
Quelque part, c'est terrifiant en cette période. Je ferais sûrement mieux de rester tranquillement à la maison en commandant un drive en ligne, mais je n'y trouve pas tous les produits. A chaque fois, je me fais avoir. Ce que je veux n'est pas disponible, donc j'attends, et lorsque ça le devient, c'est autre chose qui n'est plus là ! C'est frustrant ! Je préfère encore braver l'extérieur et trouver tout ce dont j'ai besoin plutôt que de me contenter d'une moitié de course.Je me prépare. En cette période, il est tentant de rester en pyjama toute la journée, mais heureusement, mon voisin qui débarque souvent sur le balcon pour taper la causette m'oblige à être présentable. Je suis donc habillée, et prête à sortir malgré mon cœur battant et l'appréhension qui me noue l'estomac. J'attrape mon sac à main et quitte mon appartement.
Le bruit de mes pas résonne en écho dans le couloir désert de la résidence. J'ai des papillons dans le ventre en passant devant la porte de mon voisin. Il serait si facile de sonner chez lui pour le rencontrer sans la distance d'un mètre vingt qui sépare nos deux balcons, mais j'apprécie cette séparation qui, quelque part, nous rassemble.
Je gagne ma voiture et vérifie que j'ai bien mon attestation de sortie sur moi. Je suis parée à sortir.
***
Je reviens à la maison avec mes sacs de courses aussi lourds que d'ordinaire. Je n'ai pris ni plus ni moins que ce que j'ai l'habitude. A quoi bon, de toute façon ? Je grimpe les marches, en espérant sortir rapidement de cet appartement. Je l'affectionne, c'est certain, mais parfois, je rêve d'avoir une maison, et un garage. Ce sera beaucoup plus facile pour les courses !Les règles veulent que j'attends avant de mettre mes courses au frigo, mais je ne peux pas. J'ai du frais qui doit être immédiatement mis dans le congélateur. D'un côté, on nous demande de ne pas rompre la chaîne du froid et de l'autre, on doit laisser traîner nos aliments pour que le virus ne s'y accroche pas. C'est idiot.
Je range tout, en jetant les emballages les plus superflus, avant de me laver les mains. Je sais ma nouvelle lecture, un autre roman de notre maison d'édition. Cette fois, il retrace l'histoire d'une irlandaise devenue mutique et apathique du jour au lendemain.Dehors, l'air est frais. La soirée s'annonce plutôt froide. Je frisonne en m'installant dans mon fauteuil pour profiter des derniers rayons du soleil.
- Vous revenez seulement maintenant ?
Je sursaute en remarquant la présence de Marc sur le balcon d'à côté. Il se tient assez loin de la balustrade. Je n'ai pas vérifié sa présence avant de venir. J'esquisse un sourire en essayant de calmer les battements erratiques de mon cœur.
- Je suis allée affronter le monde et la horde pour faire mes courses, avoué-je.
- Ouh, et alors ?
Je me penche légèrement en avant, comme si j'allais lui livrer un terrible secret. Pourtant, le sourire qui étire mes lèvres ne doit pas le duper.
- J'ai réussi à ne pas me faire tuer par les zombies, mais j'ai croisé de nombreux survivants...
- Et ils ne vous ont pas tué ?
Marc garde ses yeux grands ouverts posés sur moi, véritablement intéressé par le récit rocambolesque que je lui raconte. Il rentre dans mon jeu, sans réticence, et avec un naturel qui pourrait presque faire croire qu'il me connaît depuis longtemps. Je souris en secouant la tête.
- Non, je suis une guerrière ! Ils ont bien compris qu'ils devaient rester à l'écarte de moi... J'ai même réussis à arracher un pack de PQ à un géant armé jusqu'aux dents !
- Ouh... Je devrais peut-être quémander votre escorte la prochaine fois que je sors à mon tour pour le ravitaillement...
Je ris.
- Combien payez-vous ?
- J'ai fait des cookies ?
Complices, nous partons d'un grand rire qui en fait mal aux abdominaux. C'est tellement agréable de parler avec quelqu'un qui n'écarquille pas les yeux en vous regardant bizarrement lorsque vous partez dans ces délires.
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Le balcon d'à côté
Roman d'amourAlison ne connaissait pas son voisin, jusqu'à ce qu'une pandémie l'oblige à rester confinée chez elle à l'aube du printemps. C'est l'occasion pour la jeune femme de lire, installée au soleil sur son balcon. Mais son voisin, lui aussi confiné dans so...