Chapitre 8

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Juliette, confiné, remuait en même temps que le véhicule de police. Il fixait ses pieds d'un air désemparé. Olivier siégeait à sa gauche. Lui non plus n'avait point l'air d'apprécier la malencontreuse situation. Le policier conduisant l'automobile était d'un silence assommant. La fenêtre, quant à elle, offrait une miteuse vue des appartements de Montréal. Le touriste, rongé par l'angoisse et la fatigue, somnola jusqu'à la fin du parcours.

Les lumières, puissantes, réveillèrent d'aplomb le voyageur. Cette fois-ci, lui et Olivier n'étaient pas enfermés dans une voiture de gendarmerie, mais bien dans un centre opérationnel. La pièce dans laquelle ils étaient cloisonnés ne contenait qu'une table submergée de documents ainsi que quelques chaises. Juliette et Olivier étaient assis sur ces dernières. Suivant le protocole, Raphaëlle fut transportée dans l'hôpital le plus proche. Le personnel infirmier et les médecins prirent grand soin d'elle.

S'en suivit un long et mordant débat. Les policiers étaient plus que certains qu'il s'agissait d'une agression sexuelle. Déterminé à prouver leur innocence, Olivier parla davantage. Juliette aurait pu se joindre à la féroce discussion, mais il était trop faible physiquement et mentalement pour y parvenir. En effet, cette rocambolesque épopée l'avait lourdement affecté.

Sur ce, la conversation prit fin. Le verdict fut tranché. Le duo « d'assaillants » fut placé en détention provisoire. Cette décision eut le don de revigorer l'esprit de Juliette. Ce dernier avait terriblement peur de cet endroit. C'était quelque chose de complètement nouveau et terrifiant. Olivier, lui, était estomaqué de ce choix insensé.

Raphaëlle, toujours à l'hôpital, reçut une petite visite de la police. Ayant suffisamment d'énergie, elle parvint à leur raconter son émouvante histoire. Les policiers tenteraient de retrouver Anthony, son vil ex-amoureux.

...

« Quel horrible endroit, cracha Olivier.

-        Oui, c'est... atroce, couina son nouveau meilleur ami.

La cellule était délimitée par quatre murs gris incroyablement abîmés et lacérés. Il y avait également deux petits lits à chaque extrémité. Une petite lampe rurale pendouillait au plafond. Celle-ci offrait une faible lumière jaunâtre. Néanmoins, la signature de cette macabre pièce était sans doute l'insupportable odeur de moisissure qui y régnait. Cette dernière était si puissante que Juliette ne put s'empêcher de porter la manche de son chandail à sa bouche. Olivier, quant à lui, la supportait un peu mieux. À vrai dire, il la soutenait si bien qu'il parvint à s'endormir en moins de deux. Juliette, de son côté, ne s'était point assoupi. Il avait plutôt fixé le plafond pendant de très longues minutes avant de se faire emporter par l'insupportable puanteur.

Olivier s'était éveillé en sursaut au beau milieu de la nuit. Des gouttelettes de sueurs perlaient sur son front plissé. Ses bras tremblotaient. Il avait, sans l'ombre d'un doute, fait un vilain cauchemar. Le Montréalais grinça les dents, pestant sur son désagréable rêve. Dans celui-ci, il voyait Juliette très mal en point. Il était entre la vie et la mort. Ce Français était, en très peu de temps, devenu son meilleur ami ainsi que son confident. Une amitié comme la leur était rare.

Instinctivement, l'étudiant en montage photo et vidéo tourna la tête vers son acolyte. Étrangement, celui-ci n'était pas couché sur le matelas mince et ferme. Il était plutôt allongé sur le sol, immobile. Un mauvais pressentiment attaqua le corps un brin flageolant d'Olivier. Celui-ci tenta de murmurer son prénom. Rien ne se produisit. À chaque fois que le jeune Dumas ne répondait pas à ses appels, Olivier haussait le ton. Encore une fois, il ne reçut aucune réponse. Affolé, il tenta de le secouer. Absolument rien ! Il était certainement inconscient. C'était comme si son rêve prenait vie. Heureusement, son ami respirait. Faiblement, mais tout de même. Sans plus attendre, Olivier appuya sur le bouton d'urgence de la cellule.

Tout à coup, une alarme retentit. Soulagé, Olivier appuya ses mains sur les barreaux froids de la pièce. Alors qu'il essayait de réguler sa respiration, deux gardes vinrent le sortir de son exercice. Le prisonnier leur expliqua la situation, crachant des mots de façon pêle-mêle. Les deux gaillards pénètrent dans l'enclos et prirent Juliette dans leur bras. Ces derniers l'avaient soulevé plutôt brutalement, ce qui titilla Olivier. Malencontreusement, celui-ci ne put les suivre. C'est ainsi que les deux colosses amenèrent le faible corps dans une autre pièce, loin de son unique ami. Heureusement, cette dernière était propre, sans trace de moisissure.  Ils administrèrent les premiers soins au touriste avant que l'ambulance ne se pointe.

Celle-ci arriva juste à temps. La situation de la victime se détériorait de minute en minute. Cette dernière fut amenée en civière à l'hôpital. Olivier ne put qu'entendre le chahut étouffé des sirènes de l'ambulance, ce qui était presque une torture pour lui. Après un long moment à se ronger les ongles au sang, son corps commença à faiblir. Inconsciemment, il s'étala à la même place que son meilleur ami. Morphée l'accueillit prestement, d'une manière un peu moins brutale cette fois.

La pièce était bondée. À la salle d'urgence de l'hôpital Saint-Luc, le personnel tentait tant bien que mal d'éveiller leur pauvre souffrant. En effet, cette tâche était très ardue. Le malade était resté énormément de temps dans la cellule empoisonnée. Juliette Dumas avait un système immunitaire plus faible que la moyenne. Il était né comme cela, tout simplement. De plus, le voyage effectué par le jeune homme aurait encore plus affecté son système. Bien sûr, les médecins étaient très en colère contre la police de Montréal pour avoir conservé une cellule dans cet état. Mais ce n'était pas le cadet de leurs soucis. Tout ce qu'ils souhaitaient, c'était voir leur patient émerger de l'inconscience.

Quand mes démons auront des ailesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant