L'été tirait à sa fin. Cela faisait déjà quelques mois que Juliette avait quitté sa ville natale afin d'aller séjourner à Montréal. Le jeune homme avait rencontré d'extraordinaires personnes, Raphaëlle et Olivier. Ce dernier, trop attaché à son ami, lui proposa de devenir son colocataire. Sans surprise, le voyageur accepta sur-le-champ. Raphaëlle, de son côté, préféra rester auprès de ses parents. Après le traumatisme qu'elle dut vivre, passer du temps en leur compagnie l'apaisait. Malgré tout, les trois amis se retrouvaient très régulièrement ensemble.
Malheureusement, la vie à Montréal n'apportait pas que du bonheur. Après les soulards, les homophobes se pointèrent. Dans la rue, le noir les recouvrait. Sournois, ils se jetaient sur n'importe quelle occasion afin de les humilier. Évidemment, Juliette en était une énorme. Sans chirurgie, son apparence laissait un peu à désirer. Une coupe à la garçonne, d'amples vêtements et aucune trace de maquillage, voilà tout ce qu'il pouvait faire. C'était donc bien évident que le petit groupe s'en prenaient à lui.
Des crachats, des insultes, des cris. Les cruels adolescents en venaient parfois au physique, poussant ou bousculant le jeune homme de Limoges. C'était un drastique retour à la réalité, comme si Juliette revivait les mauvais souvenir de son ancien établissement scolaire.
Heureusement pour le français, ses loyaux amis le protégeaient. Ne voulant pas s'attirer d'ennui, ils n'osaient pas répliquer en retour ou bien attaquer la bande. Ils se contentaient de serrer les dents et murmurer des paroles de soutien à leur ami. Cela était largement suffisant pour ce dernier, grandement reconnaissant de les avoir à ses côtés.
Les attaques devenant de plus en plus désagréables, le retour à l'école soulagea le trio. N'étant pas dans le même programme, ils ne se voyaient plus si souvent. Cela dit, assister à des cours leur enseignant leurs passions les émerveillaient. Raphaëlle en art visuel, Juliette en littérature et Olivier en photo et vidéo.
D'ailleurs, ce dernier avait une grande nouvelle à annoncer à ses fidèles compères. Il avait tout planifié. Le vendredi 18 septembre 2009, il invita Raphaëlle ainsi que son meilleur ami à manger. Ils adoraient organiser ce genre de petite rencontre. De succulents repas achetés à la boulangerie du coin, des jeux de société ainsi que des fous rires étaient au rendez-vous. Cette soirée-là, Olivier invita ses amis à s'asseoir sur le moelleux divan. D'habitude, ils adoraient danser au son de la radio. Une once d'intrigue s'empara de ses camarades.
Une fois bien installés, verre de jus à la main, Olivier put leur annoncer sa grande nouvelle. Dans le cadre de sa session du cégep, il partirait en voyage sur la route. Il s'agissait d'une excursion d'une durée de quelques jours. Évidemment, ses fidèles amis furent réjouis de cette excitante nouvelle. Cependant, l'idée de ne plus voir Olivier pendant ce laps de temps les ennuyait un tantinet. Néanmoins, leur déception ne fut que de courte durée. Raphaëlle ainsi que Juliette pourront l'accompagner lors de cette excitante aventure ! Le défi d'Olivier sera de creuser l'art de la photographie et de la vidéo.
Ils traverseront des forêts, des lacs, des prairies, de petites plages, des marécages, des montagnes... Explorer ces endroits du Québec enchanta le trio, qui n'avaient jamais eu l'occasion de visiter de tels coins de paradis.
Après avoir mangé un repas concocté avec soin, ils s'affairèrent à préparer leurs bagages. En effet, ils partiraient le lendemain matin à la première heure. Leur euphorie étant trop forte, leur sommeil fut très léger.
À sept heures du matin, Juliette et Raphaëlle émergèrent de leur court sommeil. Olivier, en tant que bon samaritain, avait légué son lit à Raphaëlle, qui ne vivaient pas avec eux. En s'apercevant de l'heure tardive, leurs cœurs firent un bond dans leurs poitrines. Les deux jeunes étudiants se rejoignirent dans le couloir séparant leurs chambres. Sur la pointe des pieds, ils se dirigèrent vers le salon. Olivier était censé s'y trouver, reposant sur le sofa. Étonnamment, le mobilier était inoccupé.
Balayant la pièce du regard à la recherche du disparu, un klaxonnement retint leur attention. S'approchant de la fenêtre, ils virent qu'Olivier leur faisait de grands signes de la main ! Il était allé louer une camionnette ! Les deux complices avaient oublié qu'il devait se charger de cela. Trépignant d'impatience, ceux-ci se vêtirent, attrapèrent leur matériel et rejoignirent le jeune homme.
La caravane, dotée d'un certain charme, représentait bien leur aventure. Sans plus attendre, les jeunes gens fourrèrent leurs malles dans le coffre et sautèrent dans le véhicule. Un tour de clé et le tour était joué ! Au-dessous d'eux, le vrombissement de l'automobile se faisait ressentir. Olivier ajusta le rétroviseur positionné devant ses yeux et entama cette longue route.
Au tout début, les amis écoutèrent de la musique, les cheveux virevoltant dans le vent. Cependant, après quelques heures, l'ennui se joignirent à eux. Juliette, n'ayant pas son permis, se reposa sur la banquette arrière. Afin de maximiser leur énergie, Olivier et Raphaëlle échangeaient le titre de chauffeur régulièrement. Au prix de plusieurs d'efforts, le petit groupe atteignirent finalement leur point d'arrivée.
Le changement était drastique. À Tadoussac, la nature régnait. Il y avait des arbres et des buissons à perte de vue. Les fleurs qui se dressaient par-ci par-là avaient une délicieuse odeur. Le souffle du vent était frais, dépourvu de pollution. Ayant repéré un sympathique terrain vague, les jeunes personnes y installèrent leur campement. N'ayant que très peu d'expérience, le montage s'avéra un brin long. Une fois les quatre piquets en position, ils purent achever leur tente en y plaçant sacs de couchage et oreillers. Leur appétit augmentant de minutes en minutes, ils décidèrent de déguster leur tout premier repas. Bien sûr, ils avaient préparé une bonne quantité de nourriture. Pour cette soirée, ils se contentèrent de simples sandwichs.
Le ciel étant déjà bien sombre, le travail d'Olivier fut reporté au lendemain. Néanmoins, avant de se résoudre à aller somnoler, le trio décida d'observer les étoiles. Selon eux, ce genre de moment leur faisait croire que la vie n'était point réelle. C'était trop paisible pour être vrai. Sur ces profondes pensées, ils s'engouffrèrent dans leur petit abri, où Morphée les accueillit à bras ouverts.
Le soleil, haut dans le ciel, offrait une excellente luminosité pour prendre des photos. Zigzaguant à travers la forêt, ils trouvèrent des dizaines d'espèces d'arbres et de fleurs. Une fois bien réchauffé, Olivier proposa à ses compagnons de modeler pour son projet. Cette offre ne fut bien évidemment pas refusée.
Découvrir le complexe art de la photographie en compagnie de ses meilleurs amis était une expérience enrichissante. Seulement, le jour diminuait rapidement, alors les moustiques se faisaient bien remarquer. Ils avaient essayé de résister le plus longtemps possible, mais leur patience fut bientôt épuisée. Leurs estomacs grondants représentaient une seconde raison de rentrer à leur base.
Le feu qu'ils s'étaient improvisé offraient de douces braises. Ils firent cuire leur repas au son de son crépitement. Ils étaient vraiment en union avec la nature, ça, ils ne pouvaient le nier ! Malheureusement, le brasier se fit de moins en moins fort. Ils devaient désigner quelqu'un pour aller récupérer du bois. Étant donné qu'Olivier s'occupait de ses photos et que Raphaëlle était sur le point de s'endormir, Juliette fut choisi.
Lampe torche à la main et couverture sur le dos, il partit à la recherche de quelques morceaux. Ceux se trouvant à la lisière du bois étant trop maigrichons, il dut aller un peu plus loin. Les parcelles de bois, éparpillés un peu partout, rendit sa tâche ardue. Cela dit, il réussit tout de même à en récupérer suffisamment pour alimenter le feu. Malheureusement, ayant vagabondé dans plusieurs recoins de la forêt, Juliette avait perdu son chemin. Il s'était aventuré beaucoup plus loin qu'il ne le pensait...
L'adrénaline montait en lui à une vitesse folle, si bien qu'il n'eut bientôt plus le contrôle de ses pensées. Ses jambes, flageolantes, ralentissaient sa cadence. Il avait beau regarder à gauche, à droite, devant ou derrière, il ne voyait qu'une étendue de sapins. Agiter sa lampe torche dans tous les sens ne lui servit à rien, le même tableau se dressait devant lui. Il n'y avait pas d'échappatoire. Son dernier espoir était donc la puissance de ses cordes vocales.
Il se mit à crier aussi fort qu'il le put, malgré le froid déchirant sa gorge. Malencontreusement, la seule réponse qu'il reçut fut une poignée de corbeaux s'envolant de leurs arbres. Il pourrait bien continuer à avancer, mais s'enfoncer davantage n'était guère une bonne idée. N'ayant plus rien à faire, Juliette prit appui sur un tronc d'arbre et s'y glissa. La terre, plutôt fraiche, n'était d'aucun réconfort. Il se promit que, le lendemain, il doublerait d'efforts afin de retrouver sa route. C'est sur ses inquiétudes que la nuit noire l'engloutit.
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Quand mes démons auront des ailes
Fiksi UmumJuliette est coincée dans le mauvais corps. Elle veut à tout prix se délivrer de son titre de femme. Malheureusement, ses parents et son entourage ne sont pas du même avis. Ne tenant plus en place, la jeune étudiante marque une croix sur son passé...