Je ne trouve pas le sommeil. Je tourne encore et encore dans mon lit. Je ne peux pas continuer ainsi. Cette situation n'est pas possible. J'entends un bruit, je tourne la tête et je vois que ma porte s'ouvre en grinçant. Je ferme les yeux comme si j'avais peur. Ce n'est que Mathilde. Elle murmure :
- Tu dors ?
Ces mots suffisent à me faire éclater en sanglots. Ma sœur s'assoit sur le bord de mon lit et me caresse les cheveux. Je ne réalise pas que Mathilde soit comme ça avec moi. Elle est douce, attentionnée, pleine d'amour... Je peux dire que c'est ma « grande sœur » sans risquer ma vie. J'enfouis ma tête dans mes mains sous l'amplitude de mes sanglots. Ce n'est qu'au bout de quelques heures que je trouve enfin le sommeil.
J'ai tellement pleuré que mes yeux sont douloureux. Je ne les ouvre pas tout de suite. Je m'éveille lentement et découvre Mathilde assise sur le sol. Elle est endormie et me tient la main. Elle a dormi avec moi ? Elle a veillé sur moi toute la nuit ? Je n'en crois pas mes yeux. Je reste ébahie même une fois qu'elle émerge à son tour. Je regarde mon téléphone. 7 heures 15. Je regarde ma sœur et lance d'un air taquin :
- Mesdames et messieurs, aujourd'hui, les prévisions annoncent un risque de turbulence imminent.
Elle me fixe incrédule. Elle n'a pas compris. Je lui explique que les turbulences sont celles du réveil matinal de Guillaume. Elle se lève et sors de ma chambre. Je la suis et, dans les escaliers, elle se moque :
- Ne le prends pas mal, mais... Tu ne seras pas une miss météo. Enfin... Si tu vois ce que je veux dire.
J'explose de rire et dans un élan de gaminerie, j'entreprends de lui courir après. Elle arrive dans la cuisine avant moi. Papa, qui donne à manger à Claire nous demande de nous calmer même s'il est très heureux de nous voir aussi fusionnelles. Il n'est pas le seul. Mon petit chat fait son entrée dans la cuisine. Je le prends dans mes bras et lui propose de lui préparer son petit déjeuner. Mathilde ne manque pas une occasion de me faire remarquer :
- Je veux bien entendre que tu culpabilises, mais ton frère n'est plus un bébé.
Guillaume imite le sourire le plus enfantin qu'il connaisse en nous désignant son attelle. On éclate de rire. Mathilde désigne Guillaume d'un doigt accusateur :
- Flemmard !
On rit de plus belle et nous commençons à manger dans la joie et la bonne humeur. C'est ce qu'il manquait à cette famille. Avant de partir, mon père nous embrasse. Puis vient le tour de Mathilde et là...
- Bonne journée papa !
Pour la première fois depuis que je suis née que j'entends Mathilde l'appeler « papa ». J'avale de travers et mon père se fige. Elle sourit et concentre son attention sur notre princesse. Ma mère a manqué ça. De toute façon, les absents ont toujours tort.
Je vais mieux qu'hier. Je suis capable d'aller en classe. J'ai horreur de louper les cours. c'est toujours horrible de récupérer les cours. Je préviens ma mère qui reste septique mais ne bronche pas.
Une fois au lycée, Mathilde m'invite à rester avec elle et Jade. Elle n'est pas à l'aise de me laisser seule avec Jordan dans le coin. Jade n'évoque pas une seule fois le sujet de son frère. Pour mon plus grand bonheur. Elle a dû le faire sous conseil de Mathilde.
Ma sœur est la première à finir les cours. Elle est déjà rentrée et nous attend à la maison. Sur le retour, je décide finalement de lancer le sujet. Je lui demande :
- De quoi a t-il peur au juste ?
- Glad... Ce n'est pas une très bonne idée..., bégaye t-elle.
Je m'énerve :
- Mais, comprenez que c'était mon meilleur ami ! J'ai besoin de comprendre. Aujourd'hui, il ne veut plus entendre parler de moi. Pourtant, nous savons tous pertinemment qu'il va s'en sortir.
Son mutisme m'agace. Nous savons tous qu'il ne passera pas l'arme à gauche. Mais personne ne veut faire l'effort de me parler. Il ne veut pas nous croire. Comme s'il cachait quelque chose. Mais je connais Nathan, il a toujours focalisé son attention sur le négatif. Il ne comprends pas pourquoi il est encore en vie. Je regarde Jade et l'interroge :
- Tu as eu mal ?
- Seulement au réveil. Pour l'instant, je suis juste fatiguée.
- Je ne comprends pas qu'il ne veuille pas que je sache pour son insuffisance rénale.
- Je ne comprends pas non plus. Je pense qu'il voulait te préserver. Tu sais, ta protection, c'est ce qui compte le plus pour lui.
Elle me prend dans ses bras puis entre dans la maison. Je ne la suis pas. J'enfourche mon vélo et me dirige vers l'hôpital, une fois de plus. Je m'assois dans le couloir, pose mon sac sur mes genoux, en sors un carnet et je commence à écrire ce qui me passe par la tête. C'est-à-dire, une lettre. Je n'y écris que la vérité. Celle qu'il ne connaît pas.
Nathan,
Inutile de t'avouer que je suis perdue. Et cela à cause de la situation actuelle. Tu ne me parles plus, tu me cries dessus. Tu me rejettes. Non je ne bluffais pas. Je suis au courant. Et je connais les risques de ce genre d'opérations. Et toi tu ne vis qu'au travers de ceux-ci. Ce n'est pas bon. Pourtant tu te fiches pas mal de mon avis. Parce que tu me renies clairement de ta vie. Tu en as le droit, mais je t'en empêche. Je suis ta meilleure amie. Si tu m'en offres la possibilité, je peux être plus que ça. Parce que je veux être plus...
Je m'arrête et relève la tête, les gens s'agitent dans le couloir. Mais que se passe-t-il ? Je vois que des infirmières rentrent dans la chambre de Nathan. Mon cœur pulse de plus en plus vite dans ma poitrine. J'ai peur. Et s'il y avait eu des complications ? Et s'il avait eu raison depuis le début. Des infirmières, le font sortir de la chambre. Il est allongé et inconscient. Je me lève prête à le suivre mais une aide soignante me maintient en arrière.
Une fois le calme revenu, je rentre dans sa chambre. Je m'assois sur son lit, reprend mon écriture tandis que les larmes ruissellent sur mon visage.
Quelqu'un me secoue doucement l'épaule. La mère de Nathan, elle me fixe les yeux embués de larmes. Je me lève et quitte les lieux à la hâte. Je pédale à en perdre haleine. Soudain, je me souviens que j'ai oublié la lettre sur l'oreiller de Nathan. Je regrette de l'avoir écrite. Comme si elle ne servait à rien. Il est 22 heures, je ne peux plus y retourner. Mes parents doivent être au bord de la crise d'angoisse. Je préviens toujours quand je ne rentre pas. Mathilde m'attend sur le perron. Elle s'approche de moi et me chuchote :
- J'ai tout organisé. Quand on a vu que tu étais partie, nous sommes allées chez Jade. J'ai prévenu les parents en disant que tu étais avec moi.
Je la remercie silencieusement. On rentre et comme prévu, les parents gobent le mensonge, tellement heureux de nous voir si bien nous entendre. On mange toutes les deux. Puis je monte travailler dans ma chambre.
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Mon meilleur ami, mon frère, ma demie soeur
Roman pour AdolescentsGladysse, stéréotype cliché de l'élève parfaite. Nathan, stéréotype cliché du beau gosse populaire. Jordan, le cancre pervers qui se croit irrésistible. Nathan et Gladysse sont meilleurs amis depuis toujours. Gladysse maintient leur amitié secrète...