Chapitre 11

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Mathilde me fixe depuis environ cinq minutes. Je l'ignore et tente de me concentrer sur la cuiller d'une petite Claire, ma foi, peu coopérative. Elle admire son grand frère qui dessine et cherche ses parents qui sont au travail. Je ne suis pas couchée si elle n'accepte de manger qu'au retour de sa maman. Mais bon, Mathilde est là. Elle est censée nous surveiller. Elle s'en fiche tout de même. Sa conversation téléphonique a l'air bien plus intéressante. Cela ne l'empêche pas de me dévisager sans cesse. Alors que Claire avale enfin sa dernière cuiller de compote, je souffle et une idée me passe par la tête. Je prends ma petite sœur qui me tend les bras ravie et la dépose dans son parc. Je jette un œil à ma grande sœur et me glisse derrière le canapé. Pas de doute, vu le sourire satisfait qui s'affiche sur son visage quand son téléphone vibre, il y a un garçon là dessous. Je tente de l'espionner mais elle me grille et range son téléphone. Oubliant ainsi mon côté de grande sœur exemplaire, piquée de curiosité, je saute sur le canapé, sous le regard ébahi de Guillaume. Je m'attaque à Mathilde qui rigole à gorge déployée alors que je tente de me saisir de son portable. En vain. Je tourne la tête ; Guillaume n'est plus à table. Je feinte. Mon petit frère vole le téléphone de Mathilde et je le suis en courant dans toute la maison. Épuisés, nous nous enfermons dans la salle de bain hilares. Nous entendons les pas de Mathilde alors nous nous taisons couvrant nos rires avec nos mains. Je glisse son téléphone entre deux serviettes discrètement. Nous nous apprêtons à nous rendre quand ce dernier vibre. Zut, on l'appelle ! Je le saisis et décroche maladroitement. Je ne mets pas plus d'une seconde à reconnaître la voix de Nathan :

- Mathilde ? C'est Nath! Je voulais te remercier. Ton idée a vraiment marché. J'aurais dû te faire confiance et ne pas me rebuter. Je sors avec Gladysse. Je m'excuse pour tout ce que j'ai pu dire. Tu es vraiment géniale. Je comprends que ta sœur t'adore. Mathilde ?

Je raccroche bouche bée. Nath ? Remercier ? Géniale ? Je sors de la pièce, le téléphone toujours dans les mains. Mathilde récupère son téléphone à moitié en colère mais avec un sourire vainqueur. Quand elle croise mon regard, la lueur dans ses yeux se durcit. Elle a peur que je m'en prenne à elle. Elle recule. Je commence :

- Pourquoi Nathan vient de t'appeler pour te remercier ? Qu'est-ce que tu as fait ? Pourquoi je suis liée à cette histoire ? Pourquoi tu étais si dure lors de notre virée shopping ?

- Je te l'ai déjà dit, bégaye t-elle.

- C'est la vraie raison ? Je ne crois pas non.

- Glad, tu es pâle. Viens t'asseoir.

Je l'ignore. Mes larmes ruissellent le long de mes joues :

- Te prend pas la tête. J'ai compris. Nathan a demandé un service à Jade. Comme tu es sa meilleure amie tu as dit oui. Comme ça elle t'est reconnaissante. Alors arrête de faire semblant. Et va te faire voir !

Elle me dévisage et ne nie pas. Je lis même de la culpabilité dans ses yeux:

- Alors, c'est vrai ?

- Non Glad, laisse moi t'expliquer ! Ce n'est pas ce que tu crois !

Je suis en colère. Je ne l'écoute plus. Je rejoins ma chambre en courant. Je n'entends pas ses pas qui me suivent. Pourtant elle atteint ma chambre en même temps que moi. Je claque la porte et me laisse glisser le long de celle-ci. Quand elle frappe, mes sanglots redoublent d'intensité. Mais Mathilde essaie tout de même :

- Nathan est venu me voir. Il m'a expliqué que sa sœur lui avait juré que je serais de bons conseils vu le cas de figure. Oui c'est pour elle que j'ai tâté le terrain ce soir là. Au début, j'ai vraiment fait semblant. Mais tu allais si mal. Et je m'amusais quand même. Tu n'étais pas si snob que je le pensais. En fait, tu ne l'es pas du tout. Mais j'étais effrayée. Alors je t'ai rembarré. Mais depuis l'admission de Guillaume aux urgences, je ne fais plus semblant. Je me suis attachée à toi. À Guillaume. Vous êtes si importants pour moi. Crois moi Gladysse.

Je ne pleure plus. Je lui en veux si fort. Je me lève, ouvre mon armoire, en sors la fameuse robe qu'elle m'avait acheté. Je rouvre ma porte et lui lance au visage. Je la referme aussi sec. Tout ce bruit a alerté ma petite sœur qui s'égosille de panique. Mathilde s'éloigne. Je souffle et reporte mon attention sur mon téléphone qui vibre. Jade. Inquiète pour Nathan, je ne peux l'ignorer et je décroche :

- Hello !

- Coucou Glad', dis moi, tu pourrais demander à ta sœur si elle a fait ce que je lui ai demandé ?

Au mot sœur je me crispe :

- Cela te dérangerait de le faire toi même ?

Mon ton est froid. Elle le sent.

- Je l'ai fait. Mais elle ne répond pas.

- Je suis désolée mais tu vas devoir attendre. Je ne suis pas à la maison.

Elle acquiesce et raccroche Je branche mes écouteurs et me calme au son trop fort de la musique. Je me détends petit à petit. Si bien que quand je rouvre les yeux, je suis aveuglée pas le soleil qui est à son apogée. Au même moment, Nathan entre dans la pièce. Il est sorti de l'hôpital ? Je me fige. Il me regarde assise sur le sol, le dos plaqué sur mon lit. Il se rapproche, s'accroupit puis se laisse finalement glisser à mes côtés. Il me retire mes écouteurs, pose ses pouces au coin de mes yeux et y dessinent des cercles. Il laisse descendre l'une de ses mains jusqu'à mon menton. Il relève ma tête et approche ses lèvres des miennes...


Mon meilleur ami, mon frère, ma demie soeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant