Chapitre 10

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Je sors de ma chambre une demie-heure plus tard. Il m'est impossible de me concentrer avec les évènements de ces derniers temps. Maman va m'en vouloir quand elle va voir que mes notes sont en baisse. Je sais qu'il faut que je me ressaisisse, seulement je n'y arrive pas. Mes pensées sont bloquées sur autre chose. Sur Nathan surtout. Je ne pense qu'à lui jour et nuit. J'ai besoin de lui en parler. Qu'elle me conseille. Je toque donc à la porte de ma sœur en espérant ne pas réveiller mon frère et ma petite sœur. Mathilde m'invite à entrer. Elle est assise sur son lit avec son ordinateur sur les genoux, un écouteur vissé dans son oreille gauche. Elle regarde une série ou un film visiblement. Elle me regarde attentivement. Je ne dis rien.

- Allez, viens là ! Me chuchote t-elle en me tendant les bras. Je me rapproche et dès que j'entre en contact avec elle, je me laisse tomber dans notre étreinte laissant mes sanglots se faire entendre. Mathilde va croire que j'ai les larmes faciles. Elle n'aura pas tort. Tous mes sentiments se bousculent dans ma tête. J'ai peur, j'ai mal, je suis perdue, je l'aime, j'ai besoin de lui... Mathilde veut m'aider. Je lui en suis infiniment reconnaissante. J'ouvre la bouche, mais elle me coupe dans mon élan :

- Chut ! Je veux que tu sois prête. Ne me parle pas si tu n'en es pas capable. Du moins, pas encore. .

Je n'ai pas à réfléchir. Je sais que je ne serais jamais prête. Mais Mathilde est là, à côté de moi. J'ai vraiment besoin de lui parler et je lui fais confiance. Alors je prends mon courage à deux mains :

- Quand j'y suis allée, j'ai écris une lettre. Je ne sais pas comment, mais je l'ai laissée sous l'oreiller de Nathan. Sauf qu'en partant j'ai regretté. Tout ce que j'avais écris. Parce qu'à ce moment je ne réfléchissais pas. Mais j'ai peur. Que ça aggrave la situation. Il était au bloc. Je ne sais même pas ce qui s'est passé. Quand sa mère m'a vue, je m'étais endormie sur son lit. J'ai juste fui. Je ne veux pas l'abandonner. Même s'il me l'a demandé. Je le veux, lui, quoiqu'il décide. Être son amie, ou plus, j'accepte. Tant que je suis avec lui. Mais j'ai besoin de lui. J'ai peur pour lui. Pour nous.

Je me sens en progression quand je m'aperçois que seulement quelques larmes coulent le long de mes joues. Je me suis calmée. Pour une fois, je ne suis plus une cascade. C'est un surnom que me donnait souvent Nathan. De ses yeux azur, ma sœur m'enveloppe d'amour et de bienveillance :

- Jade m'a envoyé un message tout à l'heure. La cicatrice a bien tenu. Il a fait une baisse de tension. Les infirmières se sont inquiétées. Son médecin ne pouvait pas se déplacer, alors c'est lui qui l'a rejoint dans une salle à l'étage en dessous. Il n'était pas au bloc. Il a passé plusieurs examens. Et les résultats sont bons. Il va bien, Glad.

Une heure plus tard, elle me guide à son petit canapé et m'y convie à passer la nuit. Elle me prend une dernière fois dans ses bras et me couvre avec un plaid. Elle rejoint son lit et éteint la lumière. Elle me souhaite une bonne nuit. Je tente de rejoindre les bras de Morphée. Mais il ne m'accepte pas avant deux heures du matin.

Je retourne à l'hôpital le lendemain. Que j'en ai l'autorisation ou non. Je veux être auprès de lui. Sa mère me voit et me prend dans ses bras :

- Oh Gladysse ! Excuse moi pour hier. Je ne n'étais pas bien. Ça me fait plaisir de te voir. Même s'il m'en veut de te l'avoir dit, je ne regrette pas. Tu es sa meilleure amie.

- Ne te fatigue pas maman. Je lui ai déjà dit tout ça, me sourit Jade.

Sa mère esquisse un rictus à son tour. D'un commun accord, elles me poussent dans la chambre de Nathan. Je le vois. Il est de dos, le regard plongé vers l'extérieur. Je m'approche doucement :

- Jade, n'essaie même pas.

Son ton est froid. Il ne bouge pas. Il est tendu et il ne sait pas que c'est moi. Je m'arrête, ça me fait sourire. Ces mots volent au dessus de ma tête sans jamais s'échouer dans mes oreilles. Je reprends mon chemin jusqu'à lui. Il se crispe lorsque je passe mes bras autour de lui en posant ma tête sur sa nuque. Il sursaute à mon contact, se retourne doucement et me voit. Il a un mouvement de recul. Mais rien de plus. Pas un mot, pas un geste. Je ne fais pas attention à ce qui m'entoure et j'assouvis l'un de mes plus grand besoins. Je me blottis contre lui. Sentir sa chaleur et sa protection : dieu que ça me manquait ! Il ne répond pas à mon étreinte. Nos yeux se croisent. Est-ce à cause de mes larmes que ses yeux sont si flous ? Je cligne des yeux et découvre que ce n'est pas moi qui pleure. C'est lui. Il ne parle pas. Je passe ma main sur sa joue. Il ne recule pas. Il me chuchote :

- Comment va Guillaume ?

Je le regarde et un sourire se dessine sur mes lèvres. Je lui réponds :

- Il va bien, ne t'en fais pas.

Je cherche ma lettre des yeux dans la chambre. Je ne la vois pas.

- Plus que ça...

- Pardon ? lui demandai-je sans comprendre.

- Plus que ma meilleure amie.

Son visage se rapproche dangereusement du mien. Je lui chuchote :

- Ne fais pas ça.

Il me dévisage et comprend.

- Je ne dirais rien, si c'est ce qui t'inquiète.

Il n'arrête plus de sourire. Je baisse les yeux. Sa main s'aventure sur son ventre et ses sourcils se froncent. Je pose ma main sur son épaule et l'aide à s'allonger. Je m'assois dans le fauteuil à ses côtés. Avant qu'il ne s'endorme, je murmure :

- Toi aussi tu es plus que ça.

Il me sourit une dernière fois et ferme les yeux. Je le regarde encore de longues minutes avant de m'emparer de son carnet de dessins qui traîne Je le feuillette. Ce n'est pas une surprise de voir qu'il a beaucoup dessiné depuis son admission en service de pédiatrie. Ce qui m'étonne c'est de me voir sur chaque croquis. J'esquisse tout de même un demi sourire. Ces dessins sont si bien faits. Je me lève et fait le tour de la pièce. Je m'arrête quand je tombe sur son ordonnance. Je la consulte jusqu'à ce que...

- Tu ne serais pas un peu curieuse ?

Je sursaute.

- Et toi tu n'es pas censé dormir ?

Nathan me fixe :

- Avec une beauté pareille dans ma chambre, difficile de fermer l'œil plus de deux secondes.

Je me sens rougir. Je me retourne pour qu'il ne distingue pas mon embarras mais il me saisit par les hanches, se redresse, m'assoit sur ses genoux. Nous rigolons de bon cœur. Il se calme, prend ma main, plonge son regard dans le mien et bizarrement je me fiche que son visage se rapproche du mien.


Mon meilleur ami, mon frère, ma demie soeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant