14 - A cœurs ouverts

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Ils passèrent encore une heure à essayer de trouver le lien qui unissait Sijiro, Nee et Kihiro. Ils retournèrent le peu d'informations qu'ils avaient dans tous les sens pour en arriver à la seule conclusion qu'ils n'avaient pas encore assez d'éléments pour comprendre la situation dans son ensemble. Cependant, ils n'abandonnaient pas l'affaire et comptaient bien poursuivre leur enquête. C'est sur cet accord tacite que Fubuki décida de rentrer chez elle. Elle avait demandé un entraînement particulier à son père, l'un des ninjas les plus doués du clan Hitohira, pour améliorer ses compétences en taijutsu et en ninjutsu ; et cet entraînement commençait le jour même.

- Tu restes ici Kinshi ? s'étonna Fubuki.

Le jeune ninja acquiesça et Fubuki laissa ses deux camarades entre eux. C'était une des premières fois que Sôma et Kinshi se retrouvaient seuls, sans leur amie. Un silence légèrement inconfortable s'installa rapidement dans la chambre. Toujours assis sur le lit vide, Kinshi contemplait ses mains tout en balançant ses jambes à la manière d'un enfant. Lui aussi semblait mal à l'aise dans ce silence, mais ce n'était pas tout. Sôma connaissait bien son camarade à présent et son visage affichait plus que de la timidité. De la tristesse, peut-être ?

- Kinshi, osa Sôma, tu vas bien ?

L'intéressé releva la tête. Son regard était effectivement triste, ce qui fit de la peine à Sôma. Loin de vouloir le brusquer, il attendit patiemment que son ami prenne la parole. Quelques minutes passèrent encore avant que Kinshi ouvre la bouche :

- Nous revenons d'une mission qui s'est avérée dangereuse. Nous sommes revenus blessés et apeurés. J'ai failli mourir sous la poigne du Fantôme, ajouta-t-il en passant sa main sur son cou. J'ai failli mourir et ni ma famille, ni mon clan ne m'a demandé comment j'allais. Pas un seul. Tous n'ont pensé qu'à me féliciter car j'ai enfin éveillé mon yôguran. Je ne sais pas si tu le sais Sôma mais il y a plusieurs manières d'éveiller notre dojutsu. Cela peut être dû à une intense vague de bonheur qui nous illumine de l'intérieur, à un entraînement poussé du chakra pour forcer son premier passage jusqu'à nos yeux, ou parce qu'on a été aux portes de la mort. La plupart de membres du clan éveillent facilement leur yôguran avec la première ou la seconde méthode. Pas moi. Même si je fais partie de la branche principale du clan, je n'ai jamais pu réveiller mon dojutsu héréditaire de cette façon. Il a fallu que je meure quelques secondes pour y arriver. Et personne ne peut comprendre la douleur que c'est de mourir, puis de revenir à la vie. Personne n'a voulu comprendre.

Kinshi ferma les poings de colère. C'était la première fois que Sôma le voyait sujet à une émotion si forte, lui qui était habituellement si calme.

- Ils n'ont pensé qu'au clan et à la famille. Qu'à la fierté que je représentais. Il y a encore quelques jours, tous me prenaient pour un raté. Maintenant que je possède les yeux de lumière, je suis un héros. Et pourtant, je n'ai pas l'impression de compter. Je ne me suis jamais senti aussi seul.

Sôma suivi le regard de Kinshi vers la fenêtre. Dehors, les nuages étaient noirs et la pluie frappait fortement au carreau de la fenêtre. Sôma laissa le silence revenir entre lui et son ami, cherchant ses mots. Il pensait au clan Harumitsu, qui était l'un des plus petits clans du village mais aussi l'un des puissants. Au cours de son histoire, la clan avait su se faire discret pour protéger son dojutsu héréditaire, avant de se faire presque oublier au profit d'autres dojutsus puissants : le Sharingan du clan Uchiwa et le Byakugan du clan Hyûga. Depuis une dizaine d'années maintenant, le clan commençait à retrouver sa notoriété, autant à Ame et qu'au Pays de la Pluie. Chaque clan possédant un attribut héréditaire était fier de sa singularité et de ses pouvoirs uniques, et le clan Harumitsu auquel appartenait Kinshi ne faisait pas exception à la règle.

Le Lagon RougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant