Chapitre Dix

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Léa avait toute la soirée devant elle. Elle aimait son nouveau lieu de vie et s'imaginait déjà y passer du bon temps.

Demain, elle irait acheter quelques produits nécessaires grâce aux allocations qu'elle obtiendrait. De la nourriture, évidemment, mais aussi des ustensiles de cuisines basiques ainsi que quelques vêtements, car mis à part son vieux pull, sa nouvelle écharpe et la vieille veste qu'elle gardait depuis des années, son dressing était bien trop vide pour passer l'hiver convenablement.

La jeune femme prit une douche chaude, puis s'installa sur en tailleur sur son lit qui, par chance, avait été disposé près d'une petite fenêtre. Léa poussa le rideau du bout des doigts pour observer l'extérieur. Surprise ; il s'était mis à neiger. Elle admira les flocons qui tombaient pendant quelques minutes avant de se glisser sous les draps. Enfin, elle était chez elle. Depuis le début, elle n'avait pas lâché, et Mélissa l'avait énormément aidée. C'était grâce à elle si sa situation s'améliorait de jour en jour.

Léa se sentait de mieux en mieux. A cet instant précis, tout allait bien. Ce soir, elle dormait sous son nouveau toit. Demain, elle tenterait de décrocher un travail. Bientôt, dans quelques semaines peut-être, elle pourrait s'offrir de nouveaux meubles et quelques vêtements. En fin de compte, il n'y avait qu'une seule ombre au tableau : le manque de sa fille. Mais la jeune femme faisait confiance à sa bienfaitrice. Elle lui avait promis de lui rendre la garde d'Océane, et, même si elle était exténuée, elle le ferait malgré tout, Léa le savait. L'assistante sociale avait ce besoin de faire passer les autres avant elle, c'était dans sa nature. Et personne ne pouvait lui reprocher, mis à part ses enfants.

Ses enfants, oui, ils avaient une maman formidable et dévouée.

Quand j'aurais ma fille, imagina Léa, j'espère que je saurai m'en occuper convenablement. En tout cas, je vais lui donner tout l'amour du monde, c'est sûr et certain.

Sur ces dernières pensées, elle s'endormit paisiblement, le cœur gonflé d'amour.

Le lendemain, alors que la jeune femme se réveillait tranquillement dans sa nouvelle demeure, la sonnette retentit. Elle se leva alors d'un bond, enfila son pull à toute vitesse et attacha rapidement ses cheveux en queue de cheval, histoire d'avoir l'air réveillée.

- Bonjour, articula la femme qui se trouvait derrière la porte encore entrouverte. Vous êtes bien Léa Tardi ?

- Oui, c'est bien moi, répondit la concernée en se frottant les yeux.

- Je suis Katia, votre voisine. Enchantée ! déclara-t-elle amicalement. Et bienvenue dans le quartier !

Les nouvelles vont vite, ici, pensa Léa. Tout comme cette femme.

En effet, toute joyeuse, sa nouvelle voisine était déjà entrée dans l'appartement de Léa.

- Tout va bien ? Vous avez besoin de quelque chose ? Vous n'hésiterez pas, d'accord ? Je suis juste à côté si jamais ! Et qu'est-ce que vous faites de beau dans la vie ? Vous travaillez ? Vous avez des enfants ? Dites, vous avez vu mes enfants ? Ils grandissent vite ces marmots, je vous les présenterai à l'occasion. Ça vous dirait de venir prendre un thé chez moi ?

Interloquée, la jeune femme ne sut que répondre face à la petite boule d'énergie aux longs cheveux bruns qui avait fait irruption chez elle.

Katia, elle, s'amusa de la situation.

- Je parle trop, n'est-ce pas ? On me le dit souvent. Mais, ça me va d'être bavarde, j'aime bien mes défauts !

- J'ai été légèrement surprise, sourit Léa, un peu gênée. Mais vous comprenez, je viens à peine de me réveiller, alors...

Elle fut coupée par sa voisine.

- Je l'ai bien vu, haha ! Je vous ai réveillée, dites ? Oh, si c'est le cas, veuillez m'excusez. J'ai tendance à oublier que les gens ont parfois besoin de plus de sommeil que moi !

- Vous souhaitez boire quelque chose ? proposa Léa, sonnée par le flot de paroles de sa nouvelle voisine.

- Je ne veux pas vous importuner, répondit celle-ci. Mais je prendrai une tasse de café avec plaisir, ça me réveillera un peu, et vous aussi !

La jeune femme esquissa un sourire. Comme si elle n'était pas réveillée ! Cette bonne femme était un drôle de personnage, un peu bruyant certes, mais terriblement attachant. Elle prépara deux tasses de café chaud et invita Katia à s'asseoir.

- Alors, commença Léa en prenant sa tasse dans les mains, nous pourrions faire un peu connaissance ? Vous habitez ici depuis longtemps ?

Sa voisine fit de même.

- Oh, si vous saviez ! Ça fait à peu près trois ans que je vis ici avec mon mari et mes six enfants. Trois filles et trois garçons, vous remarquez cet équilibre parfait ? Nous en sommes fiers, de nos bouts de chou, mais qu'est-ce qu'ils grandissent vite ! On ne voit pas le temps passer.

- Oh, eh bien, je serai ravie de les rencontrer, répondit Léa. Vous avez l'air d'une jolie petite famille.

- Je te remercie, déclara Katia d'un air satisfait. Ma famille, c'est tout ma vie.

Cette dernière phrase laissa la jeune femme perplexe. Katia, une femme d'un âge assez avancé, qui croquait la vie à pleine dents, consacrait son existence à sa famille. C'était beau, mais Léa ne pouvait s'empêcher de se demander quel était son but dans la vie. Certes, elle voulait retrouver sa fille. Mais en dehors de son bébé, qu'elle connaissait d'ailleurs à peine, que voulait-elle faire de sa vie ? Elle n'avait pas de passion, ne connaissait pas vraiment l'amitié et encore moins l'amour. Pour quoi était-elle née au juste ?

Soudainement, Léa se reprit et laissa ses pensées de côté afin de se recentrer sur la conversation qu'elle entretenait avec sa voisine.

- Je, euh... que faites-vous dans la vie ? bafouilla-t-elle.

- Je ne travaille pas, répliqua Katia. Je m'occupe de mes enfants, de mon mari, de mon ménage et de la cuisine, c'est un vrai boulot ! Mais je trouve des moments de détente, ne vous inquiétez pas. Comme en ce moment ! Mon mari, lui, travaille à l'usine. Je crois qu'il bouche des tubes de dentifrice à longueur de journée. Il n'est pas souvent là, mais quand il est à la maison, j'en profite, si vous voyez ce que je veux dire.

Léa sourit, plus amusée qu'autre chose. Sa voisine était incroyablement bavarde, mais tellement délirante ! Elle n'allait pas s'ennuyer, c'était une certitude.

Une simple rencontre (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant