Happer

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La salle auparavant vide d'âmes se remplit progressivement d'un public affamé. Les mâchoires se contractaient et les sièges de velours rouge crissaient au fur et à mesure que les places se vendaient à l'entrée. Cependant, un lever de rideau mit fin à tous les murmures, et le silence se fit dans la pièce.
Un homme aux yeux remplis de larmes s'avança sur scène, paré d'étoffe de soie gris et bleu. Un bruit de pluie battante se fait entendre depuis les coulisses. Quelques chants de pervenche retentissent. Une femme alors entre à son tour, quelques roses à la main, et vient le consoler ; les adieux se changent en étreintes.

Les baisers échangés furent alors magiques,
Si fragiles et honnêtes, si doux mais si tragiques,
Si malheureux de n'être que derniers du jour,
Naissant simplement là où meurent les  « toujours ».

Tous les oiseaux s'envolent en criant dans le ciel.

Les mains entremêlées jouaient leur mélodie,
Attachées au passé. Vers le futur maudit,
Les larmes s'écoulaient en cascade à leurs joues,
Lavaient les amitiés, les amours, enfin. Tout.

Le silence s'abat sur scène, vite brisé par les cris.

Et les deux amoureux tachaient de se haïr,
D'oublier les mots doux, pour croire en l'avenir
Qui leur tombait dessus brusquement, sans pitié ;

L'orage gronde comme pour tout écraser.

Pour s'être offert des fleurs, avoir cru aux bouquets ;
Pour avoir ignoré l'instinct qui leur disait
Que les plus belles choses ne durent jamais.

Ainsi la pièce touche à sa fin, les rideaux happent la scène, aspirant les destins, oublieux des après-midi ensoleillés où tout allait si bien.

07/05/20

𝑬𝒏𝒄𝒐𝒏𝒏𝒐𝒊𝒓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant