CHAPITRE 4

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Je ferme la porte de ma salle à clé et gravis quelques escaliers afin de monter dans la salle des profs. À peine ai-je poussé la double porte vitrée que j'entends un grand cri.
— Bienvenu au collège Fairy !!
Je papillonne des paupières, surprise. Le proviseur m'avait bien dit que les professeurs voulaient me faire un pot de bienvenu mais je ne m'attendais pas vraiment à ça.
Une jeune femme aux cheveux écarlates s'approche de moi et me fait la bise.
— Salut Lucy ! Je m'appelle Erza Scarlet, je suis prof de physique chimie.
— Euh... Salut !
Elle s'écarte de moi avec un grand sourire avant de laisser place aux autres profs qui viennent tour à tour me faire la bise.
Le dernier est un homme qui ne doit être guère plus âgé que moi. Il dégage une aura un peu sombre mais étrangement attrayante. Un mèche de ses cheveux ailes de corbeau cache son œil d'une jolie couleur bordeaux tandis que le reste est noué en une queue de cheval haute.
— Salut, me fait-il alors que ses lèvres entrent en contact avec mes joues. Je suis Rogue Cheney, prof de sport.
— Salut.
Il s'écarte avant de m'amener à une longue table où se déroule habituellement les réunions mais sur laquelle sont dressés plusieurs couverts ainsi qu'un assortiment de plats plus appétissants les uns que les autres.
— Voilà, pour fêter ta bienvenue parmi nous, on ne mange pas au self et on se fait tous un petit repas ici, dit gaiement Mirajane Strauss, une prof de français.
— Merci mais vous n'aviez pas besoin de faire tout ça...
— Taratata, me coupe Erza. On est toujours super contents d'accueillir une nouvelle personne alors laisse-nous fêter l'événement dignement !
Je souris alors et les laisse m'entraîner jusqu'à la table.

Nous mangeons tous ensemble, discutant de tout et de rien. Parlant de nos nouvelles classes, des élèves. On me pose beaucoup de questions sur moi, sur ce que j'aime dans le dessin, sur ce qui m'a donné envie de faire ce métier. Je parle, je ris, je fais la rencontre de personnes plus intéressantes les unes que les autres. Et tout le long du repas, je sens sur moi le poids du regard d'un certain jeune homme brun. Je m'efforce de ne pas croiser la trajectoire de ses pupilles car je sais pertinemment que je deviendrai rouge écarlate. Mais un discret sourire nait sur les lèvres de Rogue lorsqu'il comprend que je fais tout pour ne pas poser mes yeux sur lui. Pour ne pas montrer ma gêne, je lance un nouveau sujet de conversation.
— Sinon, vous connaissez Grey Fullbuster ?
Aussitôt, tout le monde se tait et me fixe gravement. Mes joues se mettent à chauffer et je baisse la tête, honteuse d'avoir brisé ce moment de légèreté.
— Tu l'as eu aujourd'hui, me demande finalement Erza.
— Oui.
— C'est un garçon bien étrange, fait Sting Eucliff, un prof de SVT.
— Aucun de nous n'arrive à comprendre qui il est et ce qu'il a en tête, renchérit Luxus Drear, un prof d'anglais.
— Comment cela ?
— Il ne vit qu'avec son père après la séparation de ses parents. Et on ne va pas se mentir, son père est loin d'être un enfant de chœur, avoue Mirajane.
Je hoche la tête prudemment, ma curiosité piquée à vif et mon inquiétude ayant décuplé. Je préfère changer de sujet et parler de l'histoire de ce collège, ce qui me fait apprendre qu'il était avant un monastère, ce qui explique les grandes arches dans la cour intérieure.

Très vite, la cloche sonne, annonçant la reprise des cours. Je sors de la salle des profs en les saluant tous chaleureusement avant de retourner dans ma classe.

§§§

J'entre dans mon appartement et jette mon sac dans le canapé. Je retire mes chaussures et les lance dans mon placard. J'ôte ma veste et le suspend à la va-vite sur le porte-manteau. J'enlève mes vêtements un à un jusqu'à la salle de bain, semant les tissus derrière moi à la manière du petit poucet.
Je me fais couler un bain avant d'aller dans ma cuisine, entièrement nue, afin de me servir un jus d'orange. Je le bois lentement avant de retourner dans la salle de bain pour couper l'eau et me glisser dans mon bain. Je pousse un petit soupir de satisfaction en sentant la chaleur envahir mon corps. Si ça, ce n'est pas le paradis sur Terre, je ne m'appelle pas Lucy Heartfilia !

Je rejette la tête en arrière et ferme les yeux, repensant à cette journée. Je ne comprends toujours pas ce qu'il s'est passé. J'étais... À l'intérieur... De mon dessin ?! Est-ce seulement possible ?! Selon la science, les scientifiques, les chercheurs et tout ce tralala, on ne devrait pas pouvoir voyager dans une feuille de papier crayonné ! Ça dépasse toute logique. Ce n'est pas normal ! Il y a vraiment un truc d'étrange. Il faut que je réessaye. Il faut que je retente l'expérience. Il faut que je comprenne.
En plus, c'était quoi ce bonhomme bâton ? Pourquoi était-il la seule "âme" qui vive dans ce dessin ? Pourquoi a-t-il peur de moi ?
C'était quoi aussi, ce compte à rebours, au-dessus de ma tête ? Il m'indique le temps qu'il me reste dans le dessin ?
Pourquoi l'intérieur de la maison n'était qu'un bloc noir, opaque ? C'est parce que je ne l'ai pas dessiné ? Parce que mon esprit ne s'occupait de son intérieur alors que j'avais le crayon en main ?
Le crayon... J'avais en main le crayon que le proviseur m'avait offert... Il faut que je vérifie quelque chose. Impérativement.
Je me savonne vivement le corps avant de me rincer. J'enfile mon peignoir en laissant l'eau s'évacuer de la baignoire alors que je me précipite vers mon sac contenant tout mon matériel de dessin. J'en sors une feuille de dessin vierge ainsi que ce fameux crayon de papier et une gomme.
Je m'installe dans mon canapé et commence à dessiner. J'esquisse deux personnages, un homme et une femme avec un soleil levant derrière eux. Sauf que je ne veux pas m'arrêter là. Je veux voir s'il est possible de mettre mon dessin en couleur. J'attrape mes crayons et me mets à jouer avec toutes les nuances que je suis capable de faire avec le matériel à disposition.
Je signe.
Et m'arrête.
Rien.
Il ne se passe absolument rien.
Me serais-je donc tromper d'hypothèse ? Ce ne serait pas grâce au crayon que j'ai pu voyager dans mon dessin ?
Je lève ma feuille à hauteur de yeux et le contemple, analysant ce qui pourrait ne pas aller.
Brusquement, tout devient flou autour de moi. Je cesse de respirer, l'air se bloquant dans ma poitrine. Je m'effondre et tout devient noir.
J'ai juste le temps de penser : "ça commence..."

Tu n'étais qu'une esquisseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant