Chapitre 5

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Il aurait fallu être aveugle pour ne pas comprendre ce qu'il se tramait à Tor Castle ce soir-là. Lorsque Lady Malise invita Lachlan Gunn et sa petite sœur Moira à la table d'honneur, des cris de joie et des sifflements s'élevèrent des rangs. Il n'y avait pas eu d'annonce officielle sur les fiançailles de ces deux-là, mais les habitants savaient qu'un simple membre de clan ne pouvait s'asseoir à la table d'honneur sans raison. Etre l'invité particulier de la fille du Laird en était une excellente. Entre les différents plats, il avait posé à de nombreuses reprise sa main sur celle de sa douce, ce qui attisa grandement les bruits de couloirs circulaient déjà bien plus vite que le vent.

Le sourire que Malise accorda à la foule n'était en rien celui d'une future épouse, non. Il ressemblait davantage à celui d'un guerrier fougueux fier de sa victoire. Mais son combat ne s'achevait pas sur cette douce note. Il lui faudrait garder le contrôle du navire. Et le plus tôt serait le mieux. C'est pourquoi il fut décidé que la célébration aurait lieu le lendemain.

Il apparu alors à Lachlan que la nuit fût terriblement courte et que les étoiles n'avaient pas dansé dans le ciel aussi longtemps qu'elles auraient dû. L'effervescence avant même le réveil du soleil avait été pour lui un rappel de ce jour si spécial. Aujourd'hui, il épouserait la belle Malise Cameron. Il espérait qu'elle saurait au moins être une bonne mère pour sa jeune sœur Moira, qui avait été enjouée à l'idée de marier son aîné. Cette dernière aimait particulièrement jouer à la Lady auprès des enfants de son âge. Un timide sourire perçait les lèvres de Lachlan lorsqu'il revoyait en mémoire les manières de sa sœur, et ses caprices auxquels il se faisait une joie de céder. Moira était ainsi, mais le highlander lui pardonnait toujours son comportement – anglais à outrance – car il savait que c'était pour elle un moyen de s'évader.

Un petit bruit contre sa porte le fit revenir parmi les vivants et l'homme viril chaussa une nouvelle fois son éternel visage neutre. Très vite, une armée de femmes de chambre entrèrent dans la pièce et se précipitèrent à préparer Lachlan pour ce jour. Elles étaient toutes dans la fleur de l'âge, et étaient visiblement heureuse que leur Lady se marie comme si c'était elles-mêmes à leur tour. Tout fut rapide. On brossa son indomptable crinière blonde. On lui passa une chemise, le kilt du clan des Gunn, et toutes les affaires dont il pourrait avoir besoin. Avant de quitter sa chambre, l'honorable cacha son sgian dubh dans sa botte droite. Mieux valait être prudent, surtout par les temps qui courraient.

Lachlan attendait Malise sur l'hôtel de la chapelle. Il sentait son cœur battre plus rapidement que la normale, mais n'afficha guère son expression. Un bruit sourd attira son attention au niveau de la porte. Enfin, elle était là. Feargus lui avait offert son bras pour la guider, le Laird de Cameron étant souffrant. Sa fiancée était vêtue d'une robe rouge carmin, ainsi que des couleurs des Gunn, qui lui allaient parfaitement. Ses cheveux marron étaient attachés en une légère tresse décorée de fleurs d'hiver, cela mettait en valeur les traits délicats de son visage et ses yeux bleus de glace. Son regard si perçant le fit frissonner. Il crût même se retrouver face à un loup sauvage, sans arme pour défendre.

Malise avait enfin pris place à ses côtés lorsque le religieux commença son discours. Lachlan ne pouvait s'empêcher de sentir le regard perçant de la population sur sa future épouse. Tous l'aimaient et l'admiraient et, il espérait qu'un jour, le peuple des Cameron poserait sur lui, un œil tendre. Il savait pertinemment qu'il ne retournerait pas de si tôt à Clith Castle, même si c'était son devoir.

Après la cérémonie, un grand repas avait été organisé. On avait cuit le meilleur gibier, et préparé de divins gâteaux. Le cidre était succulent, mais Malise se régalait davantage de voir son plan abouti. Enfin presque. Lachlan pouvait à tout moment annuler le mariage s'il n'était pas consommé. Cela ne faisait aucunement peur à notre intrigante, qui avait déjà perdu sa chasteté il y a longtemps, par un vieux monsieur trapu et grassouillet. Il voulait une amante, elle désirait ses terres. La jeune mariée comprit que son tour arrivait lorsque son époux se leva en lui tendant la main.

Lorsqu'ils quittèrent la pièce, des cris de joie firent trembler les murs de Tor Castle. Tous savaient que nos jeunes amants allaient consommer leur mariage. Malise conduisit alors Lachlan dans le dédale de couloirs et de portes afin de le guider vers leur chambre maritale. Elle était assez grande et la fenêtre donnait sur une immense plaine, juste avant une nuée d'arbres plus sombres.

Malise n'attendit pas que son époux termine son exploration des lieux et agrippa vivement la chemise blanche de ce dernier. Ses lèvres heurtèrent brutalement – sans doute trop – les siennes. Lachlan parut surpris un infime instant avant de rendre avec fougue les baisers de son épouse, qui était loin d'être une vierge passive comme il s'y attendait. Et, en une seconde, les couches successives de vêtements valdinguèrent au sol dans une pluie colorée. Soudain, les mains du viril Écossais se stoppèrent sur les cuisses de sa femme lorsqu'il lui découvrit des bas en dentelle bien trop séduisants...

Malise sourit en coin. La dentelle était un tissage auquel aucun homme ne pouvait résister. Pas même lui.

« Comptez-vous me faire l'amour ou me faire attendre toute la nuit ? » Demanda-t-elle, provocante.


***


Malise fut la première à se réveiller au petit matin. Elle put ainsi mettre son plan à exécution. Les femmes de chambres n'allaient pas tarder à arriver et accrocher les draps aux fenêtres – comme la tradition l'obligeait – afin que tous les citoyens constatent la consommation du mariage. Le problème était que Lachlan, ne lui ayant point enlevé son pucelage, aucune preuve ne pourrait être possible.

L'intrigante se leva le plus doucement possible, ouvrit le tiroir caché de l'écritoire, et en sorti une petite fiole. Celle-ci contenait un liquide rougeâtre qui s'apparentait fortement à du sang. Elle admira un instant cette petite merveille de la nature avant de se diriger vers le lit de cordes martial, dans lequel son amant dormait encore à poings fermés.

Une Dame de Coeur - Tempêtes et PassionsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant