Une Dame de Coeur - Tempêtes et Passions

Chapitre 13

Le résultat ne tarda pas à paraître. Bientôt, l'on frappait énergiquement à sa porte avant que le coupable n'entre dans un grand fracas, sans plus de cérémonie pour la dame en robe de chambre.

"Lady Malise ! Hurla Feargus. Vous devez immédiatement évacuer votre chambre ! Tor Castle est en feu !"

La jeune femme revêtit alors son meilleur masque d'actrice et fit mine de sortir brusquement d'un sommeil profond. Elle se frotta les paupières avant de demander au vieillard :

"Que diable se passe-t-il ?"
"La chambre du Laird a sombré dans les flammes ! Le feu a pu être maîtrisé, mais il reste un risque qu'il reprenne ! Sortez du château Lady !" Grogna la vieille bête.
"Mon père ! Comment va-t-il ?!" S'écria alors Malise en se levant en toute hâte.
"Il n'a... Tenta Feargus. Nous avons retrouvé ses restes près de la cheminée... Il semblerait qu'il eût perdu connaissance non loin de cette dernière, ce qui aurait déclenché l'incendie."

Lady Malise sortit alors en trombe de sa chambre, les pieds nus, les cheveux détachés, et pas même habillée.

"Père !" Hurla-t-elle de désespoir en poussant les gardes déprimés qui lui bloquaient l'entrée des appartements de son père.
"Madame ! Vous ne pouvez pas entrer ici, c'est bien trop dangereux." La stoppa finalement un membre du clan avec son bras musclé.
"Père ! Cria-t-elle aussi fort qu'elle le pouvait. Père ! Papa !"

La jeune femme tomba à genoux et fit mine de pleurer, atteinte de la folie du désespoir, aux pieds du guerrier impuissant.

"C'est mon père qu'ils ont pris ! Dieu a rappelé mon papa !"

Nul n'osait prendre la parole. Tous aimaient le Laird des Cameron. Sa disparition jettera pour sur un courant d'air glacial dans le clan.

Feargus, qui considérait Malise comme sa propre descendante, fut impuissant lorsqu'il vit son petit corps blanc tout tremblant, ainsi allongé sur le sol froid. On aurait dit que les plafonds de Tor Castle - et même ceux des châteaux voisins - lui étaient tombés sur la tête. La pauvre jeune femme devrait sûrement se battre seule dans cet enfer grouillant de fripouilles en tout genre. Soudain, une petite blonde entra dans le champ de vision du vieillard. La sœur de ce Lachlan. Comment s'appelait-elle déjà ? Moira. La gamine semblait attristée de voir Malise dans une position aussi faible et se jeta au sol afin de l'étreindre avec un amour, aussi pur qu'inconditionnel, et lui murmura quelque chose que les oreilles avisées de Feargus n'entendirent pas. Il vit simplement l'intrigante se relever les joues inondées de pleurs. Elle héla le vieil homme d'une voix chevrotante, et noyée dans un torrent de larmes. La miséreuse paraissait désespérée.

"Il me faut maintenant... Il me faut paraître devant tous les Cameron afin de leur annoncer la terrible nouvelle. Malise marqua une pause secouée par un spasme plein de sanglots, puis reprit. Feargus, rassemblez chaque membre du clan dans la salle commune. Immédiatement."

Lady Malise, après avoir ordonné cela, retourna aussi dignement que possible - au vu de la situation - dans ses appartements, suivie de Lady Moira.

Les deux femmes se retrouvèrent alors en toute intimité dans la pièce à peine éclairée. Malise fut légèrement agacée - elle aurait largement aimé se retrouver seule pour se réjouir de la réussite de son plan - mais Moira étant ici, elle se devait de continuer son jeu de rôle. Ainsi, la jeune femme se plaça près de la fenêtre et admira le paysage d'un air qui se voulait absent.

"Je sais que..." Commença Moira, brusquement coupée par l'intrigante.
"J'ai besoin d'être seule. Je vous prie ma chère sœur, de sortir de cette pièce."

L'enfant allait sans doute répliquer qu'elle saurait être une oreille attentive pour Malise, mais cette dernière la devança en lui coupant une nouvelle fois la parole.

"Dans la bibliothèque, il y a plusieurs livres qui expliquent plus en amont la culture aristocratique anglaise. Je vous demande de vaquer à vos occupations maintenant."
"Bien, souhaitez-vous que j'appelle une femme de chambre pour vous vêtir ?"
"Non."

De dos, l'intrigante ne vit pas la jeune enfant quitter ses appartements, mais entendit juste le bruit froid d'une porte qu'on referme.

Enfin seule, Lady Malise allait pouvoir se réjouir et fêter cela très dignement. Elle ouvrit un coffre recouvert d'une poussière épaisse - qui était caché sous son lit - et en sorti une bouteille étrange. Il était écrit en français quelques mots que personne ne pouvait comprendre. La jeune femme avait acheté ce vin effervescent à un prix outrageusement élevé sur le marché noir. Elle se servit une coupe et se délecta du plaisir que le sulfureux mélange lui évoqua.

"Voilà de quoi fêter dignement cette petite victoire, qu'il me plaît d'appeler majestueuse." Murmura-t-elle en buvant une dernière gorgée.

La jeune épouse reposa sa coupe et se dirigea vers sa penderie. Sa main s'empara de la première robe noire qu'elle trouva et la passa. Dans un autre contexte, on aurait dit que la tenue mettait ses formes en valeur. Mais actuellement, personne ne lui soufflerait le moindre compliment bien placé. Lady Malise prit également un châle en tartan aux couleurs de son clan et le posa sur ses frêles épaules.

Son clan... Voilà qui sonnait particulièrement mélodieux ! Les objectifs de la belle intrigante étaient atteints. Son mari, Lachlan, prendrait la tête des Cameron et elle, la sienne. Elle pourrait le manipuler à sa guise afin d'occuper le monopole des décisions.

Malise avait une soif sans fin de pouvoir. Elle ne négligeait aucun aspect - même les plus sombres - afin d'asseoir son autorité.

Les pas de l'intrigante résonnèrent dans les couloirs anormalement vides du château. Tous les Highlanders étaient dans la salle commune à attendre la venue de la belle, ne se doutant pas de la terrible révélation.

La porte fermée semblait être bien plus sombre qu'à l'accoutumée. Quelqu'un l'avait repeinte durant la nuit ? Ou bien était-ce le poids des changements à venir ? Nul ne le savait.

Lady Malise inspira fortement pour se donner du courage, et ouvrit la porte.