La première chose que virent les habitants de Tor Castle, furent les draps pendus par une fenêtre, tâchés du sang de Lady Malise. Un petit sourire soulagé animait chaque lèvre, et des yeux brillants scrutaient le moindre recoin dans le secret espoir d'apercevoir leur maîtresse et son époux. Chacun voulait les féliciter de vive voix. De ce fait, il régnait sur toutes les terres des Cameron une certaine léthargie, une petite bulle de bonheur, que rien ou presque ne pourrait percer.La jeune femme n'avait pas pour habitude de manger avant de travailler sur les affaires publiques, que d'ordinaire, son père traitait. Et elle détestait par-dessus tout être dérangé pendant son travail. Elle avait l'impression qu'on voulait fouiner dans ses affaires. C'est pourquoi elle dû forcer un sourire lorsqu'elle vit Aileas, sa servante personnelle, conduire son mari à son bureau. La servante portait dans ses bras frêles un plateau en argent avec un petit-déjeuner pour deux.
« Aileas, commença Malise, ne vous ai-je pas dit que je ne voulais être dérangée sous aucun prétexte ? »
D'ordinaire, la jeune femme se serait confondue en excuses, mais aujourd'hui, elle n'en fit rien. Malise ne put s'empêcher d'observer son petit air supérieur, cela l'inquiéta un bref instant. Que manigançait-elle ? Lachlan interrompit le cour ses réflexions, d'un ton posé.
« Ne la grondez pas, j'ai moi-même insisté afin d'être conduit à vous. Aileas, vous pouvez vous retirer, merci. »
La servante s'inclina brièvement et quitta la pièce, laissant nos deux amants seuls, livrés à leurs sentiments naissants.
Malise, fortement blessée dans son orgueil, se retourna et posa ses yeux bleus de glace sur la missive qui lui faisait face. Elle tenta en vain d'en lire le contenu, mais la présence de son mari la déconcentrait plus que de mesure. La belle senti son cœur frissonner de bonheur lorsqu'il passa délicatement un doigt dans une de ses mèches brunes rebelles.
« Cela doit être épuisant. Commença-t-il d'une voix suave. De devoir accomplir les tâches de votre père. »
« Cela m'est possible. »
« Je n'ai point de doute, lass... »Les doigts chauds de son mari passèrent de ses cheveux, à sa joue, à ses lèvres...
« Laissez-moi vous aider lass... Je suis votre époux après tout. »
Malise réfléchit un instant et accepta son aide. Il paraîtrait trop suspect de cacher quelque chose. Elle lui donnerait une tâche qui ne nécessiterait en rien que Lachlan puisse fouiner dans ses affaires.
« Il y a là quelques missives sur les récoltes de nos terres auxquelles je dois répondre. »
« Bien, mais avant tout, mangeons. »Lachlan attrapa un raisin et le pressa contre les délicieuses lèvres de son épouse.
Le repas, qui d'ordinaire était nécessaire afin de subvenir à ses besoins primaires, prit une forme sensuelle et dangereusement érotique avec un Lachlan toujours plus séduisant. Leurs lèvres n'eurent point besoin de boussole pour connaître leur route et se fondre entre elles en un baiser torride. Leurs peaux brûlantes n'étaient que désir et passion. Et, dans des conditions que la maudite bienséance de ces fichus Tuniques Rouges ne permit pas de révéler, ils s'aimèrent.
Le calme fut revenu dans la pièce. Malise était en train de lire une missive lorsque son époux l'interpella.
« Une lettre est à votre nom. » Affirma-t-il en pointant le papier blanc délicatement posé sur le plateau en argent.
L'intrigante n'attendit pas un instant avant de s'en emparer et de la décacheter. Ses yeux allaient rapidement de gauche à droite sans jamais vraiment s'arrêter, mais son visage blanc resta parfaitement de marbre face à son contenu étrange.
« S'agit-il d'une bonne nouvelle ? »
« Ce sont des nouvelles de Lady Nora, qui m'écrit depuis Dunrobin. Saviez-vous que son frère, le fils du Comte s'est amouraché de la jeune MacLeod ? Voilà une missive fort distrayante n'est-ce pas ? Malise força un rire de circonstance. Il paraît peu probable que notre suzerain donne sa bénédiction pour ce mariage : le bruit court qu'elle n'a point de dot. »La discussion s'arrêta là et Lady Malise retourna à sa tâche. Mais elle ne pu s'y atteler comme elle l'aurait aimé. Le contenu de cette lettre l'inquiéta, à juste titre d'ailleurs. Il était évident qu'il s'agissait d'Aileas. Elle ne s'était pas excusée comme une femme de chambre aurait dû le faire face à sa maîtresse. Son comportement douteux aura de suite attiré les suspicions sur elle.
« Je sais tout. Je sais que vous cachez sa mort afin de garder le pouvoir. Je veux dix mille pièces d'or ce soir, à minuit, près du puits. Soyez à l'heure, sinon le clan des Cameron saura qui vous êtes vraiment.
Respectueusement vôtre. »
Dans ce cas-là Lady Malise aurait dû référer à Feargus cet acte de la plus haute trahison. Mais, il valait mieux ne pas mêler ce vieux rusé à de telles affaires obscures. Elle l'aimait d'un amour pur et sincère, comme une petite fille aime son grand-père, mais elle ne pouvait pas se permettre d'être naïve. Le pouvoir pouvait monter à la tête de n'importe quel homme aussi brave soit-il. Y comprit la sienne.
« Puis-je vous interrompre un instant lass ? » Avait timidement osé son époux.
« Que voulez-vous ? » Se força-t-elle de répondre avec élégance et calme.
« Il s'agit de ma jeune sœur Moira... Elle ne possède guère les us et coutumes préférables dans les Highlands. Bien sûr, qu'elle se comporte ainsi à son âge n'est pas un problème, mais... Moira n'a jamais eu la chance d'avoir une figure maternelle à ses côtés. J'ose espérer que vous puissiez lui apprendre... Les fondements de notre société. »
« Il va de soi que j'accepte, je suis sa sœur à présent. Comment se comporte-t-elle ? »
« Comme les Tuniques Rouges. »
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Une Dame de Coeur - Tempêtes et Passions
ChickLitTor Castle, 1703, Écosse. Malise, fille unique du défunt laird du clan Cameron, trouve un subterfuge afin d'épouser Lachlan Gunn, qu'elle connaît à peine, dans le but de sauver son clan. La jeune femme, qui trempe alors dans de sombres affaires, se...