Lords

I

Lord Simon Hartfield, 13h, 14 décembre 3260, Ile d'Hartfield

Emmitouflé dans mon manteau je marche contre le vent, le long de la falaise. Le froid est plus que dur et il se mêle aux flocons qui fondent après avoir touché le sol, et aux embruns des vagues qui se fracassent sur la pierre. Je pense à la future lettre de Lord Sky, elle ne devrait pas tarder à me parvenir.

La promenade que j'emprunte est à environ trois cent mètres de Hartfield House ; lorsque je tourne la tête je peux voir les lumières allumées traversant les grandes fenêtres du salon. Mais cette fois, lorsque je tourne la tête vers le sud, je ne vois qu'une chose, une voiture qui vient de s'arrêter devant la maison. Je la fixe et milles idées me traversent l'esprit. Personne d'aussi fortuné n'est jamais venu ici depuis Lord Grey. Mais je m'interdis les fausses idées qui pourraient me décevoir et me contente de suivre du regard le cocher qui se lève et vient ouvrir la portière.

Lorsque je vois l'homme qui sort de la voiture je m'arrête immédiatement de marcher et essaye de certifier qu'il s'agit bien de lui. Cela me semble si irréel, je crois devenir fou, ce que je vois ne peut être qu'une illusion.

Il jette un regard circulaire sur l'immensité de plaines vertes, finalement, ses yeux s'arrêtent sur moi. Il regarde en arrière, un valet est déjà en train de disparaître dans la cour, et le carrosse repart. Il n'y a plus que lui et moi. Alors ses yeux se reposent sur moi, et après m'avoir fixé quelques secondes il se met à marcher d'un pas rapide et décidé en ma direction. Je ne sais pas si je dois également aller vers lui, de toute manière j'en suis incapable, mes jambes semblent paralysées.

J'ai à peine le temps de cligner des paupières qu'il est à moins de deux mètres de moi. Mon cœur va finir par sortir de ma poitrine, ce rêve est si merveilleux, il ne doit pas finir.

Il fait encore un pas, l'une de ses mains attrape mon coup et l'autre ma joue, il me percute en plaquant ses lèvres sur les miennes. Je m'enflamme, je renais de mes cendres. Ce baiser est si passionné, jamais il ne m'avait embrassé comme cela. C'est un amour violent capable de déclencher des tempêtes.

Lord Alexander Sky

Je l'ai plaqué à moi pour que jamais il ne reparte.

Moi qui ne suis pas très couvert, je meurs de chaud en échangeant ce baiser empli de tant choses que je lui dis enfin. Je dévore ses lèvres, son corps tout entier m'enivre, il m'appartient pour l'éternité, il me l'a écrit.

- Alexander... souffle-t-il alors que nos lèvres se séparent.

- Je n'avais jamais entendu votre voix prononcer ce mot.

Il sourit si fort qu'il va se faire mal.

- Et, cela vous plaît-il ?

Je lui caresse la joue et, attendri, je contemple ses traits si fins.

- Beaucoup...

Il me vole un baiser et m'enlace en posant sa tête sur mon épaule.

- Simon...

- Humm ?

- Vous m'avez tellement manqué.

Il se redresse pour prendre ma main et contempler nos doigts entremêlés.

- C'est pour cela que vous êtes là ?

- Oui, pour vous. Je ne pouvais attendre plus longtemps.

- Alexander... souffle-t-il de nouveau en prenant ma tête entre ses doigts gantés

- J'aimerais rester là des heures avec vous, seulement...

- Vous aller finir par être congelé.

Je ris et souris pour approuver.