Cette journée est une véritable catastrophe. Khadija est partie, Selim s'est fait cassé la gueule et moi si je rentre Issa va me casser la gueule. Le clou de cette journée c'est de me revoir tombée amoureuse. J'ai toujours idéalisé le premier amour, j'ai toujours pensé me marier avec un homme et n'aimer que lui toute ma vie. Je me rend compte que rien n'est réellement fixe, tout peut changer. Ce que j'espérais voir rester toute ma vie est parti. De nouvelles choses viennent les remplacer, je ne les aurais jamais imaginé. Selim, ma voiture, mon nouveau CDD... Mon bébé. Tellement de nouvelles choses me tombent dessus mais j'aurais tellement aimé que tous ce que j'aime restent. J'aurais aimé qu'il m'accompagne encore longtemps sur mon chemin. Que Khadija me soutienne, que Qassim m'aime, que mon travail stable reprenne.
"Aïcha..." Me reprend Selim dans ses bras.
Le pire, c'est que même si tout change il reste une constante qui a déjà détruit ma vie et qui va continuer à me faire sombrer... Pourquoi je tombe amoureuse de ceux que je ne peux pas aimer ? Pourquoi Qassim ? Pourquoi Selim ? Pourquoi je suis aussi débile ?! J'aimerais être comme Issa l'espace d'une seconde et voir le monde en couleur, faire des distinctions, juger à longueur de journée et dédaigner l'arabe à mes côtés. Moi je vois le monde en monochrome et j'aime en monochrome. Je tombe amoureuse d'une personne en monochrome. C'est ça mon enfer.
"Tu veux vraiment pas m'expliquer ce qui t'es arrivé ?" Je lui demande inlassablement.
"Non franchement c'est rien." Il sourit bêtement, le pli de ses yeux mettant encore plus en valeur son énorme bleu sur la tempe.
"Selim... Pourquoi tu me mens comme ça ?"
"Hein ? Mais... Je te mens pas Aïcha."
"Je préfère que tu me dises que tu veux pas en parler plutôt que tu me dises que c'est rien. Tu peux pas avoir des bleus partout comme ça et dire que tout va pour le mieux. T'as le droit d'avoir mal..."
Son visage s'affaisse rapidement comme si il venait de recevoir un coup au cœur. Ses yeux qui n'ont pas quitté les miens depuis que l'on s'est retrouvé se posent sur le sol. Il soupire sans me montrer son visage.
"Selim... tu veux pas m'expliquer ce qui t'es arrivé ?"
"Je... Je préfère pas en parler."
Ses épaules retombent comme dans un soulagement et son dernier soupire n'est pas aussi lourd que les précédents, je peux comprendre qu'il relâche tout et que ça lui fait du bien.
"Et toi ? Tu m'expliques ce qui t'arrives ?" Relève-t-il les yeux sur moi.
"Moi... C'est toujours la même histoire et toujours les même problèmes."
"On dirait pas. Ca fait un moment que t'as l'air de bien t'en sortir. Tu te débrouilles même très bien."
"Merci." Je souris enfin.
Ça fait un mois que tout va bien parce que j'essaye de reprendre ma vie en main. Comme sortie d'un long coma, c'est comme si j'avais conscience pour la première fois que je peux changer ma vie, que j'en suis maîtresse. Cependant... J'ai l'impression que cette journée m'a remis à terre et que je suis de retour à la case départ. Mon frère et ma famille me sont réapparus comme une évidence. L'espace d'un mois pourtant je les avais oublié, trop occupé dans mes projets et mon avenir. Trop loin d'eux.
Le seul moment où j'ai du me rapprocher d'eux, c'est le seul moment où j'ai eu le cœur brisé. Et maintenant il faut que je rentre chez moi ? Supporter l'ambiance tendu et la présence éprouvante que mon frère nous impose ? J'aimerais penser autrement, dire que je l'aime et que je lui veux du bien mais... Je veux qu'il s'en aille. Je le préfère mort plutôt que prêt de moi. Je le préfère en prison, je le préfère même à l'autre bout du monde. Mais même si il s'en va... il restera les autres. Les autres à qui j'ai offert ma gentillesse et qui me répondent en me crachant dessus. Ma mère, mes sœurs... Mon père. Je dois réellement rentrer dans la seule maison que j'ai toujours connu ? Je dois réellement retourner dans cet enfer ?
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D E S T I N
Espiritual"En réalité tout est à sa place. J'ai mené le chemin qu'il me fallait. J'ai perdu ceux qu'il fallait que je perde et rencontré ceux qu'il fallait que je croise. Tout était parfait. Il n'y a jamais eu quoique se soit à récrire. Laissons les malheurs...