Prologue

1.5K 136 15
                                    

C'est le tonnerre qui les annonça.

Ils apparurent sans un bruit, à l'insu de tous, alors que la nuit tombait. L'air, froid et sec, était de ceux qui raclaient les poumons quand on inspirait, douloureux et piquant. Annonciateur de mauvais présages. Des nuages sombres masquaient les étoiles, des éclairs rageurs les parcouraient et le ciel hurlait des tourments que les humains ne voyaient pas, ne voyaient plus. Pourtant, il ne pleuvait pas encore. Ceux d'en-haut ne pleuraient pas encore.

Mais bientôt.

Le brouillard qui était apparu en même temps que les quatre créatures était épais et flottait à présent au-dessus du sol, donnant à leur silhouette un aspect irréel et fantomatique. Menaçant. Même la température avait chuté de plusieurs degrés.

On entendit un corbeau au loin, quelques battements d'ailes... puis plus rien.

Depuis qu'ils étaient arrivés, un silence presque sépulcral était tombé sur les alentours.

Il n'y avait plus aucun son. Les animaux, les insectes... ils avaient tous fui, dictés par un curieux instinct de survie. Les créatures ne cherchèrent pas à les suivre ; leur tour viendrait, un jour ou l'autre. Aujourd'hui ou demain n'avait pas d'importance. Les rats avaient quitté le navire, sans savoir qu'une tempête terrible se préparait. Bien qu'ils sachent nager, des vagues infernales allaient les recouvrirent. Les pauvres inconscients auraient mieux fait de rester.

Dressés sur des chevaux aussi dangereux qu'inquiétants, les quatre cavaliers observèrent. Silencieux, immobiles. Même les étalons avaient compris qu'un moment décisif se jouait à cet instant précis. Les humains en contrebas en feraient-ils de même ? Les cavaliers étaient pour le moment impartiaux, mais ils avaient été envoyés en ce bas monde pour une raison bien précise, qu'ils connaissaient. Ils voulaient néanmoins en avoir le cœur net. Si un espoir persistait, aussi maigre soit-il... il fallait en être témoin.

Alors ils observèrent.

Et comprirent pourquoi leur mission était sur le point de débuter.

C'était immuable.

Pourtant, ils observèrent encore, attendirent un retour en arrière, une excuse, un quelconque signe de remort, un regard particulier...

Mais non. Rien. Rien de tel ne se produisit.

En réalité, ils ne surent pas ce qu'ils attendirent ce jour-là, mais ils le firent, sans même avoir à se concerter. Alors ils continuèrent durant de longues heures, toujours postés sur la colline où ils étaient apparus, dominant un village de paysans.

Ils étaient si immobiles qu'on aurait pu les prendre pour des statues magnifiquement dangereuses. Les chevaux aussi faisaient preuve d'une patience innée. Seule la vapeur qui se formait devant leurs naseaux au gré de leur respiration calme témoignait de leur vigilance.

En contrebas, le village était éclairé par quelques braseros, installés çà et là. La lueur dorée était suffisamment forte pour ce que les cavaliers avaient à voir.

Ils assistèrent à plusieurs scènes, et aucune ne leur donna espoir de changer la destinée, la raison de leur présence.

Quelque peu après leur arrivée, ils observèrent un mari traîner par les cheveux sa femme dans l'arrière-cour, avant de la jeter au sol pour la rouer de coups. Il lui hurlait des insanités tandis qu'elle essayait de se justifier. Elle était allée dans la couche du fermier voisin car cet homme travaillait trop pour la baiser convenablement.

Au même instant, deux maisons plus loin, un homme et une femme s'adonnaient à des actes sexuels avec un cheval.

Les montures des cavaliers renâclèrent devant cette scène, montrant des signes d'agacement. Un des chevaux, le plus fougueux, traça de son sabot une profonde ligne dans la terre, créant des étincelles. Un simple claquement de langue suffit à les rappeler à l'ordre.

Quand les Cavaliers semèrent l'Apocalypse - tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant