Pestilence réintégra son corps en sentant quelque chose glisser le long de son cou. Il se crispa. C'était doux. Avec précaution, il garda les paupières fermées, analysant l'endroit où il se trouvait avec ses autres sens. Il n'était plus sur la plage. On l'avait balancé dans un endroit qui puait le renfermé, l'humidité, et les moisissures. Il était allongé sur une surface dure. Un cachot, à n'en point douter.
Quelle erreur.
Il allait décimer cet endroit, rien que pour avoir osé espérer pouvoir l'enfermer. Pestilence ne serait jamais un prisonnier.
Au loin, il entendait des voix qui chuchotaient. Un humain parlait.
— Il faut se débarrasser de lui, Lorna. Aide Brelan à le soulever. Je vais creuser.
Sur l'intérieur de son poignet, Conquête faisait frissonner sa peau, envieux de sortir et de courir à perte de vue, tapant du sabot.
Imperceptiblement, Pestilence bougea les poignets. Ils n'étaient pas attachés. Pareil pour ses chevilles.
Personne ne parviendrait à se débarrasser de lui. Beaucoup avaient essayés, tous avaient échoués.
Puis il sentit quelque chose lui toucher la tempe, plus doucement encore que la première fois.
Sans crier gare, il ouvrit les yeux.
Une femme se trouvait agenouillée en face de lui. Il attrapa la main tendue vers lui d'un geste trop rapide pour des yeux humains, serrant presque jusqu'à lui briser les os. Où avait-elle caché son arme ? Personne ne le touchait sans essayer de le tuer. Tenter de faire cela à mains nues était aberrant de stupidité.
L'humaine semblait terrifiée, ses yeux clairs écarquillés. Son visage blêmit. Aucun son ne sortait de sa bouche. Sous ses doigts, sa peau était glaciale, tremblante. Une mèche de ses cheveux sombres serpentait le long de sa clavicule, probablement coincée entre ses seins.
Sans la lâcher, il fut sur ses pieds en une seconde, l'entrainant brusquement dans le mouvement.
D'un coup d'œil, il sut que ce lieu n'était pas un cachot. C'était un trou creusé sous terre, où des inconscients tentaient de se cacher pour échapper aux Cavaliers. Combien de terrier comme celui-ci avait-il dézingué, depuis qu'il foulait la terre ? Beaucoup trop pour les compter !
Un homme et une femme soulevaient un truc lourd roulé dans un drap pourri, comme pour le déplacer. Vu l'angle raide du tissu, un corps était là-dedans, et il était mort. Tout, ici, puait la mort. Il ricana intérieurement. Un de moins.
Il aperçut, couchée sur une minable paillasse, une femme, morte elle aussi. Vu son état, Pestilence en était pour quelque chose. Ses pouvoirs s'étaient manifestés, même dans son inconscient. Il en ressentit un pincement de satisfaction, droit au cœur. Sa curiosité piquée, il voulait jeter un coup d'œil à l'intérieur du drap.
Inspirant profondément, il expira pour diffuser de nouveau ses spores empoisonnées. Il était un poison à lui-seul.
Il jeta un regard à la femme, qu'il tenait toujours du bout du bras. Pourquoi n'était-elle pas à l'agonie ? Ou mieux, déjà morte ? Il fronça les sourcils.
Un choc étrange, inhabituel et perturbant, le transperça plus violemment encore qu'une épée, quand elle entrouvrit les lèvres pour lui chuchoter :
— Attention, vous allez rouvrir vos blessures.
Quoi ?
— Quoi ?
Sa voix, rauque et bourrue, sembla mettre le feu aux poudres.
Tous les regards se braquèrent sur lui.
Le temps sembla s'arrêter.
Les personnes qui transportaient le corps le lâchèrent soudain, probablement de peur, et Pestilence imagina parfaitement le bruit que fit la tête du mort en touchant le sol dur. Ils l'observèrent, les yeux ronds.
Plus aucun son ne se fit. Chacun l'observait, comme s'ils n'en croyaient pas leurs yeux. Eh oui, je suis en vie, bande de trou du cul.
— Bien essayé, leur lança-t-il.
La femme posa sa main libre sur celle de Pestilence, sur celle qui entourait l'autre. Comme pour le rassurer. Pestilence eut presque envie de la lâcher. Par tous les dieux, que faisait-elle ? Était-elle complètement inconsciente ? Pourquoi le touchait-elle volontairement, lui, le Cavalier tueur d'humain ? Ne savait-elle pas qu'un simple contact entre eux était mortel ?
— N'ayez pas peur, vous êtes en sécurité ici. Vos blessures étaient impressionnantes, vous devriez vous rallonger, monsieur. Les sutures pourraient se déchirer si vous bouger trop.
Mais qu'était-elle en train de raconter ? D'un mouvement de poignet, il l'incita à s'agenouiller en lui tordant le bras en arrière. La fille hoqueta de douleur, et, alors qu'il allait leur annoncer qu'ils allaient tous périr, une humaine se dandina droit vers lui. Elle lui offrit son plus beau sourire, auquel il manquait deux dents sur le côté, et déclara :
— Me trouvez-vous belle ? Je suis prête à accueillir vos enfants en moi, si vous le souhaitez. Je suis Irma, de Sap. Bonjour.
L'humaine que Pestilence tenait glapis, et un regard noir suffit à la faire taire. Pourquoi n'était-elle pas en train de convulser ? Elle devrait déjà ne plus être de ce monde ! La Maladie devrait déjà parcourir ses veines, or, Pestilence n'en sentait aucune trace. Elle était en parfaite santé, la sorcière. Ses grands yeux bleus étaient trop clairs pour être réels.
Mais où avait-il atterrit, bordel ? Pestilence était sur un autre monde, c'était certain. Un endroit où on ne le reconnaissait pas, un endroit où les humaines voulait fonder une famille avec lui, où ses pouvoirs étaient réduits au néant.
— Alors ? pressa la pauvre femelle. Voulez-vous de moi ?
— Non.
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Quand les Cavaliers semèrent l'Apocalypse - tome 1
Fantastique"Le pouvoir leur fut donné sur le quart de la terre, pour faire périr les hommes par le glaive, par la famine, par la mortalité et par les bêtes sauvages de la terre." C'est de cette manière qu'on annonça les Quatre Cavaliers qui débarquèrent sur Ne...