Elle sautillait en rond, toute joyeuse, sa fausse épée coincée en travers de sa robe. Elle avait un grand sourire. Ses cheveux brillaient, et il y avait parfois des dessins dessus. C'était les lunes qui faisaient ça, avec l'ombre des feuilles. Chad en était certain.
Quand il l'entendit rire en projetant des grimaces dans sa direction, Chad fut certain d'autre chose. Sa maman était la plus belle des mamans. Et la plus COOL.
Sans attendre, il bondit dans sa direction, épée en avant. Il fronça les sourcils pour se donner un air méchant, mais son énorme sourire ne devait pas rendre tout ça réaliste. Alors il abandonna son air terrible pour ne garder que son sourire. Maman adorait son sourire, elle le lui avait confié plusieurs fois. Alors il souriait DE TOUTES SES DENTS. Avec un peu de chance, le stratagème allait marcher, et maman allait perdre ! Hart disait que quand il avait encore ses dents, il avait plein de femmes. Que c'était séduisant, d'avoir des dents. Lui, il avait des trucs tout noirs qui sentaient pas bon.
Chad ne lui avait pas dit, mais il était bien content d'avoir toujours ses dents.
Aryha et Chad jouèrent ensemble pendant longtemps. Ils déclarèrent forfait, et se laissèrent tous deux tomber au sol. Couchés par terre, leurs ventres montaient et descendaient au gré de leurs respirations saccadées.
— On a bien rit, c'était génial, maman ! s'exclama Chad en s'asseyant, déjà prêt pour un nouveau jeu.
— Oui, mon lapin, on s'est bien amusé, répondit Aryha en posant une main sur ses côtes. J'ai tellement ri que j'en ai mal au ventre !
— Même si mon bâton était meilleur que le tien, tu t'es bien débrouillée quand même, tu sais, titilla Chad en faisant tourner ledit bâton au-dessus de sa tête.
Aryha écarquilla grand les yeux en se redressant sur les coudes.
— Comment ça ? C'est le mien qui était le meilleur !
— C'est faux ! insista le garçon.
— C'est vrai !
— Puisque je te dis que c'est FAUX, maman !
En une seconde, Chad fut sur ses pieds. Aryha leva les mains devant elle.
— Pause pour moi.
En voyant que l'enfant allait essayer de contrer son intervention, elle précisa :
— Je suis une vieille. D'accord, je me rends. Ton bâton était mieux.
Chad fit la moue, puis haussa les épaules.
— D'accord, comme tu veux, je vais continuer tout seul, mais tu peux revenir si t'as envie. T'auras le droit.
— Merci, mon chéri, sourit Aryha.
La jeune femme bailla. Ils étaient dehors depuis longtemps, et le feuillage des arbres ne permettaient pas de voir quelles lunes se trouvaient dans le ciel. Il devait être tard.
Elle allait annoncer à Chad qu'il était temps de rentrer, quand il se passa deux choses.
La première, ce fut que Chad prononça quelque chose d'interdit.
— Je vais t'avoir, Cavalier ! cria-t-il en sautant sur un rocher. Ta pourriture me fait pas peur ! Tu vas mourir !
La seconde, ce fut le passage d'une troupe de soldats à proximité. Le cliquetis régulier de leurs armures indiquait qu'ils marchaient au pas. Elle entendit un rire. Quelqu'un hurla une boutade qu'elle ne comprit pas mais qui fit rire grassement ses camarades. C'était une troupe de contrôle, ils ne s'étaient pas fait repérer.
Épouvantée, Aryha écarquilla les yeux et se précipita sur son fils. Elle plaqua aussitôt une main sur sa bouche pour le faire taire, et elle se baissa pour les faire entrer dans une des niches que formait les racines. Chad pointa du doigt son bâton resté près du rocher, ses yeux s'humidifiant.
Aryha retira progressivement ses doigts, posant son propre index contre ses lèvres, faisant comprendre au garçonnet qu'il fallait rester silencieux. Il acquiesça, et la mère tendit le bras pour attraper une autre branchette, qu'elle lui présenta en essayant de sourire. Elle ne voulait pas l'inquiéter.
Chad fit la moue, mais l'accepta. Son premier bâton était exceptionnel, il était doux, robuste, avec un trou en plein milieu ! Et il sentait bon l'arbre. Il baissa les yeux sur le nouveau, celui-ci était... tordu, frêle et râpeux, avec une feuille morte. Il l'approcha de son nez. Complètement nul.
Aryha se dressa sur les genoux, pestant quand les feuilles bruissèrent sous elle. L'unité se rapprochait. Ils venaient droit par ici. Et leurs armures étaient aussi noires que la suie. Par les lunes, non !
Un énorme poids était en train de lui écraser la poitrine, l'empêchant de respirer correctement. Non ! Non, non, non ! Son cœur était sur le point de s'échapper de sa poitrine, et sa gorge était si serrée qu'elle ne parvenait même plus à penser correctement. Si elle avait été seule, elle aurait tenté de courir, de se cacher d'arbre en arbre en attendant que la voie soit libérée, mais avec Chad... elle ne pouvait pas prendre le risque qu'ils se fassent prendre.
Elle se tourna vers Chad. Plus sèchement que l'enfant le méritait, elle dit :
— Ne fais aucun bruit.
L'enfant, conscient de la terreur de sa mère, hocha la tête en silence. Il avait peur. Mais juste un petit peu. Il trouva une position confortable sur ses fesses, appuya son épaule contre l'écorce... et ne bougea plus. Il aurait bien aimé récupérer son super bâton, quand même. Mais tant pis.
Aryha priait pour que les racines de l'arbre soient suffisantes pour faire une bonne cachette. Elle se plaqua contre son fils, l'enroulant de son corps. Elle posa son menton sur la tête de son bébé. En fermant les yeux, elle inspira profondément, le nez dans ses cheveux emmêlés par leurs jeux. Il sentait si bon.
Les pas des soldats se rapprochaient de plus en plus. Ils étaient tout proche. À quelques mètres. Aryha, roulée en boule autour du garçon, retenait sa respiration. Elle sentait que Chad faisait la même chose. Était-il conscient du danger, ou cherchait-il simplement à l'imiter ? Pour le rassurer, elle fit glisser son pouce sur son épaule en une minuscule caresse silencieuse. L'enfant se serra un peu plus contre sa mère.
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Quand les Cavaliers semèrent l'Apocalypse - tome 1
Paranormal"Le pouvoir leur fut donné sur le quart de la terre, pour faire périr les hommes par le glaive, par la famine, par la mortalité et par les bêtes sauvages de la terre." C'est de cette manière qu'on annonça les Quatre Cavaliers qui débarquèrent sur Ne...