Chapitre 11 : La cendre nettoyante

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- Il faut que je vous explique, intervint le Maître avant que les deux garçons ne se disputent plus longtemps. À Hemera, il n'y a qu'une seule langue. C'est un peu particulier... En fait, tout le monde se comprend, peu importe d'où nous venons.

- Ah, fit Hugo, très surpris par cette information. Olivier, excuse-moi, je ne voulais pas te traiter de menteur, je...

- Ce n'est rien, assura le grand garçon. Tu ne pouvais pas deviner, il n'y a aucun soucis, je t'assure.

Hugo s'en voulait quand même d'avoir mal parlé à ce garçon, qui paraissait bien aimable malgré son apparence et son élocution très spéciales.

- Où as-tu été blessé, jeune humain ? enchaîna le Maître.

- Au dos et aux avant bras, expliqua Hugo en remontant les manches de son sweet shirt.

- Enlève ton haut, je vais t'appliquer une lotion spéciale pour soigner tout ça.

Le jeune blessé s'exécuta sans discuter, tandis que la créature du feu enfila d'épais gants noirs.

- Grâce à ces gants, tu ne sentiras par la chaleur de ma peau, expliqua-t-il.

Il montra alors à Hugo une petite fiole remplie d'un liquide jaunâtre.

- Dans notre monde, le venin de la vipère hémérienne permet de soigner les brûlures. Tu verras, bientôt ces larges traces rouges sur ta peau ne deviendront que de simples cicatrices.

- Pare qu'il restera des cicatrices ? s'inquiéta Hugo.

- Oui, malheureusement rien n'est totalement effaçable.

Le Maître appliqua alors la lotion sur le dos du jeune garçon, qui sursauta lorsque la lotion très froide entra en contact avec la brûlure. Heureusement, le liquide ne piquait pas. Il aurait en effet été gêné d'avoir à se plaindre de la douleur devant l'autre garçon. Même s'il se doutait bien qu'Olivier n'était pas du genre à se moquer, Hugo aimait paraître courageux devant n'importe qui.

Peu à peu, il se rendit compte que le venin de ce serpent inconnu l'apaisait. La douleur de la brûlure s'estompait rapidement.

Quand le Maître eut terminé, il reboucha le flacon et ôta ses gants noirs.

- Il faut maintenant vous laver, déclara-t-il en sortant un bocal de cendre. L'américain, tu vas commencer. Nous allons sortir dans le couloir, avec le jeune français, afin de respecter ton intimité.

***

Hélène hésita à rappeler la femme afin de lui demander davantage d'explications, mais n'osait pas.

Elle resta immobile de longues minutes, à se demander si elle avait bien compris les instructions. Valait-il le coup de demander confirmation à la femme avant de faire quoi que ce soit ? Terrifiée à l'idée de vexer la sympathique Maître, Hélène décida de faire confiance aux indications qu'elle lui avait données.

Elle s'approcha du bocal et tendit doucement sa main. Elle effleura la matière grisâtre. Devait-elle réellement s'enduire intégralement de cette substance poussiéreuse ?

Elle saisit une petite pincée et l'étala sur le dos de sa main. Soudain, au contact de sa peau, la cendre s'illumina... et disparu, laissa le dos de sa main propre. Encore plus propre que le reste de sa main, d'ailleurs.

Stupéfaite, Helene recommença, et appliqua la cendre sous ses ongles, cette fois-ci. La poussière grise s'illumina à nouveau puis se volatilisa, laissant apparaître de beaux ongles bien transparents, dépourvus de la moindre crasse.

Alors elle ôta progressivement tous ces vêtements, et s'amusa à faire s'illuminer la mystérieuse cendre partout sur son corps. Elle laissa tomber une grosse poignée dans ses cheveux, consciente de leur état effroyablement gras et collants. Le miracle de la cendre de produit à nouveau, et ses cheveux châtains, désormais lisses et soyeux, retombèrent délicatement sur ses épaules toutes propres.

Elle inspecta le bocal et découvrit qu'elle en avait utilisé plus de la moitié. Inquiète à l'idée d'en avoir trop gaspillé, elle cessa sa toilette et songea à se rhabiller. Elle saisit en premier les sous vêtements neufs qu'on lui avaient passé. En guise de soutient gorge, on lui avait laissé quelque chose ressemblant à une simple brassière de sport. Un peu étonnée, Hélène l'enfila tout de même et réalisa qu'elle était à sa taille. C'était déjà un point positif. Elle déplia ensuite les vêtements fournis par la Maître.

Hélène les trouva atroces. Le tissu irritait la peau et la couleur grise lui donnait un teint très triste. De surcroît, il s'agissait d'une simple tunique lui arrivant aux genoux, aux manches courtes. Elle trouva également un pantalon noir taillé très grossièrement, qu'elle dut maintenir serré à sa taille grâce à une ceinture. Enfin, elle enfila des sortes de chaussures, qui ressemblaient à des chaussons de gym, noires avec de fins lacets.

Heureusement, le bureau ne comportait pas de miroir. Hélène se sentit affreuse dans cette tenue, mais supposa qu'elle n'avait de toute manière pas le choix.

Elle s'approcha de la porte et frappa doucement.

- Tu as fini ? demanda la femme derrière la porte. J'arrive.

Celle-ci entra et observa Hélène.

- Je me doute bien que ces vêtements ne correspondent aux à la mode de ton monde, mais le règlement exige que tous les humains portent cette tenue. Je suis désolée pour ça...

- Ce n'est pas grave, assura Hélène, polie. Et mes anciens vêtements ?

- Nous les gardons dans une réserve, au cas où... Au cas où tu en aurais besoin plus tard.

- Très bien.

- J'ai une toute dernière question à te poser... Portes-tu des bijoux ?

Hélène montra ses poignets.

- Ce sont des bracelets faits en quelle matière ? demanda la femme Maître.

- Heu, du toc.

- Je suis navrée, tu n'as pas le droit de garder ce genre de bijoux. Tu peux les déposer avec tes anciens vêtements, ils ne seront pas perdus, je te le promets. Mais possèdes-tu des vrais bijoux ?

Étonnée d'une telle question, Hélène baissa les yeux vers son cou.

- C'est un médaillon de naissance, expliqua-t-elle. Il fait un peu bébé, mais je l'aime bien quand même. Il est en or, je crois.

En forme de cœur, la fine médaille présentait en son centre une petite fleur dont le cœur était serti d'une minuscule pierre précieuse bleue.

- C'est une très jolie médaille, complimenta doucement la femme. Quelle est la pierre ?

- Un saphir, il me semble.

- Tu as le droit de le garder, assura la femme. Le règlement autorise chaque humain à porter sur lui un bijoux maximum, à condition qu'il comporte une pierre précieuse véritable.

Cette déclaration fit plaisir à la jeune fille. Elle n'avait en effet pas l'habitude de se séparer de son collier, ni pour dormir, ni pour se doucher.

- C'est étrange comme règlement, remarqua Hélène.

- Oui, en effet. Il y a une raison précise à cela, assura la femme rouge avec un sourire complice. Mais hélas, il m'est interdit de la dévoiler.

Hélène Et Le Monde D'en Bas [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant