Grogne-cœur ~ Terminé

Chapitre XV : Rendez-vous de grogne-cœur

     Après qu'il ait - beaucoup - insisté, j'ai suivi les indications de Bidule - pardon, Mikkel, ça a vraiment du mal à rentrer - et me suis donc préparée. Donc, j'ai échangé mon débardeur et mon jean contre une chemise ample et un pantalon taille haute, j'ai choisi une teinte plus vive de rouges à lèvres et j'ai attaché en chignon mes cheveux. Je ne vois pas pourquoi je devrais faire plus d'efforts.

     Pourtant, quand j'arrive dans le salon, je remarque tout de suite qu'il est très satisfait de ma tenue. J'aurais peut-être dû prendre le collier avec l'émeraude, et la jupe crayon qui met parfaitement en valeur mes jambes, et mettre un peu plus de crayon sur mes paupières, et pourquoi pas mon parfum préféré, et...

     Je chasse ces idées de ma tête, mais prends quand même note de ce nouveau comportement. Bien, maintenant, se concentrer sur la suite des événements.

   - Alors, Monsieur le nisse, qu'avez-vous prévu ? Un dîner romantique ? Une balade dans le parc ? Une séance de cinéma ?

    Il arrête tout de suite de m'admirer et me jette un regard presque... amoureux. Mince, j'y suis allée trop fort ? Il faut normalement y aller par pallier et ne pas sortir le grand jeu le premier soir ? Mais pourquoi personne n'en parle jamais dans les livres et dans les films ?!

    Remarquant sûrement que j'ai perdu un peu de mon assurance, il se penche vers moi et dépose un léger baiser sur le bout du nez.

   - Ne t'inquiète pas, tu es magnifique.

   - Je sais que je suis magnifique. Je me demandais juste si je n'y allais pas un peu trop fort pour te faire tomber amoureux de moi.

     En réponse, un rire silencieux secoue sa cage thoracique pendant que ses yeux pétillent de malice. Puis, il me souffle doucement :

   - Non, ne change rien du tout. Tu es juste parfaite comme ça. Tu avais une paire de talons hauts précis ou...

   - Les blancs recouverts de dentelle.

     Oui, je sais, des chaussures blanches avec un peu de tissu, c'est très salissant. Sauf qu'avec la malédiction que j'ai posé, elles garderont leur éclat pendant encore plusieurs années.

     Il repart à grands pas vers l'armoire dans l'entrée et ne met qu'une ou deux minutes pour trouver la paire d'escarpins voulus. Puis il revient et commence à s'accroupir devant moi. Oh non, ne me dites pas...

   - Bi... Mikkel, je ne suis pas sûre que ça soit une si bonne idée. J'ai appris depuis longtemps à faire ça toute seule et...

   - Et ?

     Sans faire attention à mes grognements d'ours mal léché, il attrape délicatement mon pied et le soulève lentement, me laissant le temps de rétablir à chaque fois mon équilibre. Puis, il l'insère dans le soulier et referme la lanière de ce dernier. J'aurais pu essayer de me dégager, mais l'application qu'il met dans cette tâche me touche énormément. Peut-être ce geste a-t-il une plus grande importance que ce que je pensais. Il doit faire partie de ces situations où le garçon fait sentir à sa petite amie qu'elle est une princesse.

     Une fois son travail terminé, il part chercher une paire de mocassins et l'enfile à son tour en chantonnant. Eh bien, il n'en faut pas beaucoup pour le mettre de bonne humeur. D'ailleurs, est-ce que j'aurais dû l'aider moi aussi avec ses chaussures ? Je veux dire, je n'ai presque vu jamais une femme rendre la pareille à un homme dans ce genre de situation. Est-ce qu'il l'aurait apprécié ? Ou cela aurait-il été un affront à son orgueil de mâle ?

   - Je ne sais pas à quoi tu penses, et je suis sûr que c'est quelque chose de très intéressant, mais je pense qu'on devrait mieux partir avant de passer tout notre après-midi dans le salon. Alors après vous, mademoiselle.