Partie 3 : Chapitre 3

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Quelques semaines plus tard, trois jours avant l'anniversaire de Stella, Hans se leva au milieu de la nuit et quitta la chambre. Je descendis peu après, demeurant silencieusement au pas de cette porte d'où s'échappait un mince filet de lumière. 

Je le trouvai dans la cuisine, accompagné de Ralph. À la lueur d'une bougie, le jeune Allemand écoutait avec attention, la mine sombre et grave. 

Parfois, un rire terrible venait étreindre Hans, aussitôt noyé dans une gorgée d'eau-de-vie. Les yeux brillants, il parlait sans discontinuer, bien que difficilement,livrant pour moi d'inintelligibles confidences. 

Ralph baissa bientôt la tête et se leva. Il se retourna, une main sur la bouche avant de vomir. Accoudé à la table, Hans alla enfouir son visage entre ses mains, de violents sanglots agitèrent ses épaules. 

Je reculai. 


Au matin, j'allai aider ma mère aux champs après avoir confié Stella à Siméon. Il jouait dans l'herbe avec elle, derrière la maison, usant de ces nouveaux chevaux de bois que Ralph lui avait construits. Je les écoutais rire, inventer de nouvelles histoires comme nous retournions la terre ; j'écoutais les babillages de ma petite fille. 

— Alors, demanda maman, est-ce qu'il t'a parlé ? 

Je caressai Maréchal et secouai négativement la tête. 

— Il a parlé à Ralph hier soir, je les ai surpris. 

— Tu as entendu quelque chose ? 

— Non, répondis-je, ils parlaient trop bas. 

— Et trop allemand. 

J'acquiesçai, amère, cessai bientôt de bêcher. 

— Il te faut plus de caractère, Béate, force-le à parler. 

— Je sais, oui. 

À la vérité, j'avais peur de l'entendre ; qu'avait-il pu dire cette nuit, pour provoquer chez Ralph une telle réaction ? Qu'avait-il pu vivre, pour plier sous les spasmes et les soubresauts ? 

— Quelle chaleur, reprit ma mère, s'épongeant le visage à l'aide de son jupon. 

Découvrant ainsi ses bas, puis sa vieille culotte, je me mis à rire. 

— Maman..! 

— Enfin, s'offusqua-t-elle, il n'y a personne. 

Je souris devant son manque d'affectation, appuyée sur le manche dont les dents rouillées mordaient la terre humide. 

— Et papa ? Est-ce qu'il arrive à dormir ? 

— Pas beaucoup, ses jambes le font souffrir. 

Elle reprit sa bêche, retournant hargneusement le sol. Un instant, j'observai ses joues brunes et son visage qu'un soudain afflux de sang venait de rougir. 

— Maman, je vais emmener la citerne aux Allemands, comme ça tu pourras te reposer, d'accord ? Je vais demander à Hans s'il peut nous trouver de la morphine. 

Elle cessa de s'agiter, épongeant son front en sueur, puis hocha la tête. 

J'allai la prendre dans mes bras. 


* * * 


Il me fallut marcher près de quarante minutes sous un soleil de plomb,accompagnée du seul Maréchal qui peinait à tracter cette citerne harnachée derrière lui. La tâche se compliqua lorsque nous parvînmes à ce chemin de terre, où les roues de la charrette allèrent s'engager dans les trous et dénivelés. 

LiebchenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant