J'ai eu tellement peur que ma poitrine s'est compressée comme si tout l'air de mes poumons s'était vidé. Il est probable que mon cœur ait raté un battement. Je pense même que le monde s'est arrêté, seulement un millième de seconde peut être. Mais je crois bien que tout s'est arrêté. C'était terrifiant. Plus encore que si j'avais vu la mort. J'aurais préféré voir la mort. J'aurais préféré mourir. Ce n'était pas physique, comme peur je veux dire. Il a juste prononcé quelques mots. Pourtant, je crois que j'ai eu plus peur que si j'avais été obligée de sauter dans le vide sans parachute. Je crois que le pire dans tout ça c'est que j'avais raison d'avoir peur.
Il est parti si vite. Comme si tout ce qui était arrivé n'avait été qu'un rêve. Comme s'il n'avait été qu'un souffle dans ma vie. Il est parti comme un courant d'air. Vous savez, ce courant d'air qui vous rend malade parce que vous étiez en débardeur. Ce genre de petite maladie qui vous embête une semaine. Il est parti aussi vite. Mais la douleur n'a pas été qu'une simple gène. Et elle a duré bien plus d'une semaine.
Je me suis écroulée nombre de fois, je ne compte même plus les nuits interminables où même la lune ne m'apaisait pas. Les larmes amères qui brulaient mon visage étaient parfois préférable à cette sensation de vide infini et incomblable qui me prenait à nombre de moments. Si vous comptiez toutes les fois où j'ai cru que le monde ne trouverait plus jamais le chemin pour recommencer à tourner rond. Si vous saviez comme je me suis sentie vidée. Plus rien ne faisait sens. Je voguais à mes occupations sans songer au pourquoi du comment j'agissais.
Il n'était plus là, et mon âme était parti avec lui. Il ne laissait qu'une douleur. Sourde, aveugle, et cuisante. Une douleur qui ne se crie pas, ou qui se crie si fort que l'on perdrait la voix.
Je l'ai attendu. Longtemps. J'ai attendu comme jamais je n'avais attendu. J'avais patienté avec tant de douleur, et tant d'espoir aussi. Je crois qu'au plus profond de moi j'attends toujours.
Mais désormais, je sais sourire.*
Si un seul mot pouvait décrire mon état, je dirais simplement : épuisée. Ou extenuée. Peut être même plus.
J'ai l'impression d'avoir traversé un désert à pied, sans eau ni nourriture, sous quarante degrés. Et de m'être battue avec une centaine de millier de soldats surentrainés, à main nue.
Les deux en même temps. Je pense que si un tracteur avait fini par me rouler dessus, j'en serais au même niveau de fatigue qu'actuellement.Ca doit faire deux bonnes heures que Jason est parti, s'il n'avait pas passé deux nuits à dormir sur une vieille chaise d'hôpital je crois que je me serais inquiétée. Mais étant donné les circonstances, je crois que son lit l'a accueilli avec beaucoup plus de douceur qu'une chaise en plastique.
Je lâche un rire, l'imaginant allongé en étoile de mer sur son lit, bavant dans son oreiller.*
Les jours passent, j'alterne entre le sommeil, les traitements, les visites de Jason et parfois, mon envie de sortir de ces quatre murs me prend si fort que je suis obligée de serrer sa main jusqu'à m'endormir.
-Je crois que ce que je déteste le plus quand je ne peux plus respirer, c'est que je ne meurs pas.
-T'es consciente que ce que tu dis est absolument horrible ?
-Non, enfin si. C'est assez triste d'un point de vue extérieur, mais c'est réellement ce que je ressens.
-Alors ce que tu ressens est horrible.
-Surement. Mais, tu vois, c'est une douleur tellement puissante que je crois que je ne voudrais plus jamais vivre ça.
-Pourquoi est ce que tu t'es battue alors ? Je ne dis absolument pas que tu n'aurais pas du, mais pourquoi l'as tu fait si être entre la vie et la mort te terrifie ?
-Parce que je ne veux pas mourir sans avoir été libre au moins une fois.
Ce n'est pas l'entière vérité, je crois qu'il le sait, mais après tout, il y a bien des choses que l'on ne peut pas dire.
-Enfin, je ne le serais jamais totalement, parce que j'ai un cancer. Et que j'aurais toujours ce foutu respirateur accroché à moi. Mais j'aimerais, un jour, me sentir libre.
-J'ai à la fois envie de te dire 'viens on y va, on se casse' pour que tu te sentes libre enfin. Et en même temps, j'ai envie de t'enfermer à double tour, pour que tu te battes très longtemps avant d'aller au paradis.
-Au paradis ?
-Sérieux, je dis ça et le seul truc que tu relève c'est le mot "paradis" ?
-Oui. Tu crois au paradis toi ?
-Oui et non. Mais je crois qu'il y a quelque chose après la mort. Pas toi ?
-Non. Je pense qu'on sombre dans l'oubli, comme un sommeil interminable.
-C'est super triste comme pensée.
-Je trouve pas, ça me permet de ne rien attendre de la vie. Si on finit tous dans les abîmes, on a aucune raison de paniquer. Tu crois pas ?
-Je sais pas trop. Je préfère penser qu'il y aura quelque chose après. Sinon, pourquoi on est là ? Ce serait horrible qu'il n'y ait rien ensuite.
-T'as peut être raison.
-Seulement peut être ?
-Oui. Seulement peut être.
Il sourit, le regard empli de douceur. Ce doit être pour ce genre de moment que nous vivons.
*
-Alwena, Jason ? Il faudrait qu'on parle.
-Salut Cheryl. Alwe dort, tu veux que je la réveille ?
-Non, ce n'est pas nécessaire, elle n'a pas besoin de mauvaises nouvelles pour l'instant.
-Mauvaises nouvelles ?
-Je suis pas en droit de te dire ça. Secret médical.
-Oh, oui bien sur... Dis moi qu'elle va bien, ou du moins qu'elle ira mieux.
-Jason, elle est malade. Vraiment malade. Son temps est compté. Je sais que c'est terrifiant mais, les tumeurs sont là. Et elles la détruisent jour après jour. On fait tous tout ce qui est en notre pouvoir pour l'aider, mais, malgré qu'elle se batte si fort, ce sont ses poumons qui lui permettent de vivre, et le fait est, qu'elle est en train de les perdre.
-Je sais, je sais ça... Je le sais depuis la première fois que j'ai entendu le terme "cancer des poumons". Je sais que ses jours sont comptés et je sais que j'aurais pas la vie que je veux avec elle.
-Je suis désolée. Tellement désolée.
Elle l'enlaça, comme une mère enlacerait son enfant. Leur désespoir résonnaient, plus fort encore que n'importe quel hurlement.
*
-Allô ?
-Alwe, c'est moi.
-Sans blague, Jason je peux reconnaître ta voix même si c'est au téléphone.
-Haha. Elle est drôle. Dis, tu voudrais être prête pour 19 heures ce soir ?
-Comment ?
-Et passe demander à Cheryl de te donner le truc de Jason.
-C'est à dire ?
-Bisous trésor !
*
and if time is short, we will take it by surprise.
et si le temps est compté, on le prendra de court.*
me voici de nouveau là ;)
alors, ce chapitre ?
à très vite.ju