11. Tête à tête

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En média "part-time lover" de Stevie Wonder

Comme samedi dernier, Manoé me fait monter dans le bus et ne me lâche la main qu’une fois arrivés devant le pavillon de banlieue qui lui sert de maison. Il a eu raison de me garder prisonnière de ses doigts parce que depuis que j’ai compris quel était le lieu de notre destination, je balise grave. Comme s’il avait perçu mon trouble et surtout ma réticence à pénétrer dans sa demeure, il m’enferme dans ses bras, au moment même où je me décide à tourner les talons.

_ Tu comptes t’enfuir où comme ça, Petite Abeille ? me susurre-t-il à l’oreille en déclenchant une envolée de petits insectes dans mon ventre. 

_ Pas moyen que tu me fasses mettre un pied à l’intérieur ! refusé-je catégorique.

_ Et pourquoi ça ? Tu as accepté de passer l’après-midi avec moi, Mélissa. Je ne vois pas où est le problème. T’as peur de moi ? Que je te fasse un sale truc ? J’suis pas ce genre de mec ! me lance-t-il blessé en desserrant soudainement sa prise autour de moi comme si mon contact le brûlait.

_ Non… non, c’est pas ça ! tenté-je de le rattraper alors qu’il recule d’un pas, me laissant une sensation de vide.

_ Alors c’est quoi le problème ? demande-t-il sur la défensive.

_ Le problème ? Il est justement devant nous ce fichu problème, lui réponds-je en indiquant la bâtisse du doigt. Tu te rends compte que je sèche mes cours de l’après-midi pour me retrouver dans la maison de la CPE ! Y’a pas comme un hic selon toi ? 

_ Alors ce n’est que ça ? me sourit-il canaille en rapprochant mon corps du sien. Tu as conscience que la maison de la CPE comme tu dis est aussi la mienne ? Je te promets que tu ne risques rien ici. Personne n’aura idée de venir te chercher dans cette baraque. C’est toi et moi pour le reste de l’après-midi, Petite Abeille. Ne me le refuse pas s’il te plaît ! Je te rappelle que c’est mon anniversaire aujourd’hui et de ce fait, tu me dois un cadeau.

_ Quel vilain manipulateur tu fais avec ton chantage au cadeau, ris-je devant sa fausse mine de chien battu. Je te rappelle qu’aujourd’hui c’est surtout la fête des amoureux donc…

_ Mais ton cadeau est là, très chère, m’indique-t-il en ouvrant les bras. Il ne tient qu’à toi de le déballer. Comme cadeau, moi, je ne te demande qu’à passer ce petit moment avec toi.

_ Manipulateur et charmeur ? Tu cumules les vices Beauchamp ! Mais plus sérieusement, tu n’as pas peur que ta mère rentre plus tôt du travail ? Que ta bande de potes débarquent à l’improviste pour s’amuser avec toi, que….

_ Chuuut ! Me fait-il taire d’un langoureux baiser. Tu réfléchis trop ! Pour répondre à tes nombreuses questions : non, ma mère a un conseil d’administration ce soir donc elle rentrera certainement tardivement et se rattrape en m’offrant, justement, sans trop de difficulté, cette après-midi sans cours ; non, mes potes ne viendront pas car je leur ai bien fait comprendre qu’après avoir mouchardé à tout le bahut la date de ma naissance, je voulais juste ma paix pour le reste de la journée ; et non, rien ni personne ne nous empêchera de passer un agréable moment rien que tous les deux.

_ Je n’avais pas posé de troisième question, lui dis-je mutine.

_ J’anticipe juste, me répond-il du tac au tac.

Puis, mon Valentin du jour m’entraîne à l’intérieur de la maison et referme aussitôt derrière nous. 

Il a tort : quand il presse son corps ferme contre le mien, que ses mains se perdent dans mes cheveux, caressant du bout du doigt l’abeille sur ma nuque avant de capturer mes lèvres de la plus délicieuse des façons, je ne réfléchis plus. Doutes, réticences, craintes, tout me quitte et je m’abandonne à ce baiser, dans les bras de ce garçon qui réussit à faire battre mon coeur au rythme d’un galop effréné.

Bee my loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant