Itami

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Comme si rien ne s'était passé. Le cheval se tenait sur sa patte et s'y appuyait, sans aucune trace de douleur ou de blessure. Il était difficile de croire, qu'en à peine une nuit, son entorse s'était soignée miraculeusement. Et, tout comme les autres, j'en fut plus que surpris en le découvrant ainsi ce matin là. J'avais voulu parler à Nikolaï, après son tour de garde, mais celui-ci s'était simplement éloigné, et avait commencé à se préparer pour reprendre le chemin. Bon, l'ambiance n'était pas des plus conviviales. Je décidais de préparer les chevaux et moi-même afin que nous repartions aussi tôt que possible. Selon les dires de Nikolaï, nous devrions quitter le royaume de Grimeris et de ses terres glaciales, dans la journée. Enfin, si rien ne nous retardait comme hier. Le camp levé, et nos montures sellées, nous étions enfin prêts à partir. Nikolaï connaissant le chemin, restait donc naturellement en tête, je me trouvais toutefois juste derrière lui, suivi de mes compagnons. Alors que je grimpais sur ma monture, je crut  remarquer du coin de l'œil que Nikolaï avait plus de mal à réaliser cette action simple. Action qu'il avait parfaitement réussie hier même.  Mais il s'installa si rapidement que je fut prit d'un doute. Peut-être s'était-il fait mal suite à l'accident d'hier? Je préférais ne pas le questionner sur cela. Si je me trompais, il m'enverrais très probablement balader. Tout compte fait, même si j'avais raison, il le ferait.
Ce sont sur ces bonnes réflexions que nous reprenions alors la route.

Cette deuxième journée de voyage se passa relativement bien. Nous n'avions rencontrés aucun obstacle majeur. Et comme convenu, nous étions sortis des territoires de Grimeris. Et dire que nous avions mis quatre journées rien que pour le traverser, lorsque nous étions confrontés à nous-mêmes. Avoir quelqu'un qui connaissait les lieux était bien utile. Les terres se réchauffant, les populations commençaient à réapparaître un peu partout, que ce soit de petits villages ou bien même quelques marchands qui nous saluaient sur la route. Aussi, ce soir-là, fut-il décidé que nous nous reposerions dans l'enceinte d'une auberge. Ainsi pourraient se reposer sans préoccupations, notre équipe et nos montures. Nous étions en ce fin de journée, à deux jours du royaume de Vraethia, dans les terres de paix autour de celui-ci. Une modeste bâtisse avait attirée notre attention pour cette nuit, nous semblant amplement suffisante. L'intérieur était éclairé et de la fumée s'échappait d'une cheminée en pierres noires. Nous faisions halte devant le bâtiment et descendions de nos montures. Je confiais mon cheval à l'un des membres de l'équipe et rentrait dans le bâtiment. Un homme, la taille scinte d'un tablier en cuir, se tenait derrière un comptoir en briques, semblant réarranger sa tenue. En me remarquant, il me sourit et m'invitait à approcher jusqu'à lui. Je lui expliquais la situation et demandais à réserver plusieurs chambres. Il s'excusa et m'avoua que par ces temps, le nombre de chambres libres se réduisait. Je réservais donc quatres chambres de deux personnes. L'homme me fit un sourire éclatant et me confia quatres petites pierres noires, ornées de runes. Je le remerciais et sortait retrouver mes camarades. Un écuyer vint à notre rencontre et prit nos montures pour les emmener dans les écuries. Je demandais à mes compagnons de faire des groupes de deux et leur confiait une pierre. Les duos constitués, ces-derniers ne s'attardaient pas plus longtemps dehors et rentrait dans la bâtisse. La dernière pierre en main, je la fit sauter avant de la rattraper et regardais Nikolaï, appuyé contre le mur de l'auberge, les bras croisés.
- Bon... Et si on allais jeter un coup d'œil à notre chambre ? Déclarai-je alors.
Il ne me répondit que d'un simple grognement. Comprenant sa réponse, je soupirais et décidais de partir à la recherche de ladite chambre. Je finit par en trouver la porte. Celle-ci se trouvait être en bois d'acacia, et en son centre était gravée une rune semblable à celle de la pierre. Dans un coin de la porte se trouvait une petite fente. J'y plaçais la pierre délicatement. La rune s'illumina d'une lumière bleue et peu de temps après, la porte s'ouvrit sur une grande pièce. J'y rentrait en premier et l'examinait du regard. De chaque côté de trouvait un couchage fait de bois et d'oreillers. Je tournais la tête vers la porte, là où se tenait Nikolaï. Il jetait un bref regard sur la pièce avant d'émettre un claquement de langue.
- Je sors, lâcha t-il simplement avant de tourner le dos et de s'en aller.
Je restais coi quelques instants. Finalement, je décidais de le laisser agir comme bon lui semble. Il était adulte, après tout. La chambre était simple, et ne possédait que le strict nécessaire : de quoi dormir et se décrasser un peu. C'est d'ailleurs ce que je fit, afin d'être propre au minimum. Je ne m'attardais ensuite pas plus longtemps et me couchais assez tôt après avoir mangé un morceau.

Le lendemain matin, les premiers rayons chauds du soleil se frayant un chemin à travers la fenêtre me tirèrent de mon état de sommeil. Je me redressais dans mon lit, et je fut surpris de trouver le reste de la pièce, vidée de présence. Je jettais un coup d'œil au lit face au mien. Il était vide, et refait. Je ne put retenir un soupir et me levais afin de me préparer. Je descendait une dizaine de minutes plus tard.

Dans la taverne de l'auberge se trouvaient, d'ors et déjà, l'ensemble de mes camarades. Mis à part un. J'examinais la salle du regard mais aucune trace de Nikolaï. Je m'approchais de mes compagnons de route, pour les interroger. Ces-derniers m'affirmèrent qu'ils l'avaient entre-apercu dans les couloirs, sans pour autant lui adresser la parole. Je les remerciais et me dirigeais vers l'extérieur de l'auberge.
Debout dans la cour, je regardais autour de moi silencieusement. Je finis par apercevoir  sa silhouette au niveau des écuries. Je le rejoignais donc. Visiblement occupé à s'occuper de son cheval, je prenais la décision de ne pas le déranger et m'appuyais contre l'une des fondations, patientant tranquillement. Le silence n'était qu'interrompu, par les divers hénissements des chevaux, ou par le son du foin qui s'affaisait lorsqu'ils le piétinait. Surprenamment, aucun bruit ne résultait des déplacements de Nikolaï, qui s'occupait de vérifier les fers de son cheval ou de démêler sa crinière.
- Et sinon, rester planté là comme un poteau, c'est une habitude ? Lâcha finalement Nikolaï, pendant qu'il vérifiait le fer arrière gauche de sa monture.
- Et sinon, disparaître comme un voleur, c'est une habitude ? Rétorquai-je, avec une pointe d'amusement.
Il changea de patte.
- Je fais encore ce que je veux, à ce que je sache. Je ne vous dois rien, si je veux partir, je part. Ce qui n'est pas le cas, puisque je me retrouve là à parler à un poteau mal brossé.
- On a pas déjà parlé de ce terme magique qu'est la "sociabilisation"? M'enfin bon, retournons en aux faits. Si nous voulons arriver dans les plus brefs délais à Noctisia, nous devons passer au cœur même de Vraethia.
- Non.
- Non? Répetai-je, circonspect. C'est bien là le moyen le plus rapide d'y accéder, et sans soucis, qui plus est.
Il reposa la patte de son cheval et se saisit d'un bâton près de lui. En remarquant qu'il traçait diverses lignes sur le sol, je m'approchais, m'accroupissant près de lui. Le plan n'était pas tout à fait précis, à ma connaissance, mais je reconnaissais sans méprise, les quatres royaumes et leurs environs. Il désigna notre position approximative d'une croix.
- Nous pouvons contourner le royaume de Vraethia par l'ouest. Si nous partons directement pour le plein centre de Vraethia, nous serons, certes, arrivés plus tôt. Mais le chemin ne sera pas protégé d'ambuscades ou de chasseurs de primes qui passent par là.
Je l'écoutais attentivement, mettant le nouveau trajet en place dans mon esprit.
- Oui, cela me semble correct... Cela nous prendra, quoi, peut-être une demi-journée en plus?
- Une entière, en réalité. Enfin, dans des conditions défavorables. Étant donné qu'il a plût dans les environs il y a quelques jours, le sol risque d'être toujours glissant. Il faut faire attention pour les chevaux.
- En parlant de ça ! Comment va notre ancien blessé ?
- Il va bien, il n'a plus rien.
- Mmh... C'est quand même surprenant, non? Comment est-ce qu'il a pu se remette aussi vite?
Je lui jettais un petit regard en coin, observant ses faits et gestes. Il ne répondit pas et se releva. Je fit de même.
- Va plutôt chercher les autres. On ne va pas rester là jusqu'à ce soir.
- À vos ordres, Capitaine.
- Ne m'appelle pas Capitaine.
- Bien sûr, pardon, Capitaine.
Il me lança l'objet qui lui était le plus proche, et qui se trouvait être un fer plutôt rouillé. Je l'évitais sans trop de peine, un petit rire m'échappant.
- D'accord, d'accord, j'y vais de ce pas, j'y cours.
Je quittais donc l'écurie, avant de ne recevoir un fer au milieu du front.

Tᚺᛖ ᚺᛖᚨᚱᛏ ᚲᛖᛖᛈᛖᚱ The Heart KeeperOù les histoires vivent. Découvrez maintenant