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28/08

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Jocelyn Flores - Xxxtentacion

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Dad's:

Je comptais écrire toute une page pour lui.
Comme je n'ai rien à faire aujourd'hui, je présume que c'est le bon moment.

Mon père est le cliché vivant de l'adolescent de trente ans qui s'excite encore à la sortie d'un nouveau manga. Il n'a pas l'air d'un geek pour autant. Fan incontesté de Marylin Manson, il a fallut des années à mes grands-parents pour l'éloigner de son eyeliner et de son look aussi sombre que mes yeux.

Papa a toujours eut l'art dans le sang. Petit, selon une légende de famille, il dessinait des fleurs sur son berceau. Info ou intox ? Seul le Diable le sait. Dès ses premiers pas au lycée, il a décidé de suivre sa passion grandissante pour la peinture et a finit, va savoir comment, aux Beaux-Arts. D'où il s'est enfui en rencontrant ma mère.

Selon ses dires, ma mère avait tout d'une petite fille rangée. Son look de Pin-up lui donnait des papillons au fond de l'estomac et elle savait, d'après lui, parler le langage des couleurs.
Secret d'Artiste que je ne suis pas en mesure de comprendre.

Quand je lui ai demandé une description physique d'elle, tout ce qu'il m'a répondu était qu'elle était éblouissante comme un champ de tournesols en été et aussi belle de nuit que de jour.
À partir de là, les maîtresses en petite section me faisaient les gros yeux parce qu'à chaque fois qu'on nous demandait de dessiner nos mamans lors de la fête des mères, je leur rendait un tournesol.

Il paraît qu'après ma naissance, elle est partie. Elle n'est pas morte. Elle s'est simplement volatilisée de l'hôpital dans lequel j'ai poussé mes premier cris.

Papa m'a avoué récemment que ce n'était pas parce qu'elle me détestait. Mais parce que maman est une femme accro à sa liberté. S'engager pour elle est signe d'oppression et d'aliénation. Cependant, elle aimait profondément mon père. Et d'après lui, j'en suis la preuve.

Sauf que moi, je ne vois pas en quoi.

Lorsque l'on me demande qui sont mes parents, je dit toujours qu'elle est morte. Parce qu'au fond c'est un peu vrai. Elle est un spectre dans le cœur de papa. On en parle au passé et je n'ai jamais eu la chance de la connaître.

À quoi cela servirait d'évoquer son existence ?

Sam:

Il était dans la cuisine lorsque je suis allé y prendre du chocolat tout à l'heure.
Je me suis assis sur une partie du plan de travail pour l'observer. Il galérait à faire le dîner.
Comme toujours.

"- Un peu d'aide ne me ferait pas de mal !

- Dommage que tu n'aies personne sous la main."

Il m'a supplié avec la moue d'un chiot abandonné, je l'ai tout bonnement ignoré en déchirant l'emballage de ma tablette de chocolat. Il s'est mis à bouder comme le gamin qu'il est puis a recommencé à essayer de couper ses oignons.

Mon père est doué pour pleins de chose, mais la cuisine n'en fait évidemment pas parti. Si je n'étais pas là, il se nourrirait de pizzas et de ramens jusqu'à la fin de ses jours. Un complexe qu'il ne supporte pas. Raison pour laquelle, il s'était pris une femme. Et à son plus grand malheur, c'était une pétasse.

Au fond, je crois que Samuel, mon père donc, n'a jamais voulu avoir d'enfant. J'ai été un imprévu et j'en suis pleinement conscient.
Je peux encore voir ses yeux briller lorsqu'il parle de sa carrière ratée de peintre. Il aurait bien aimé peindre maman. En faire son tableau parfait et se faire connaître.
Il a "le coup de poignet" mais malheureusement des factures à payer. Et avec un gosse sous le bras, il ne peut pas claquer son stable boulot d'infographiste indépendant pour une carrière qui pourrait peut-être aboutir à une impasse.

J'arrive à me demander ce que le monde aurait été sans moi.
Mes parents seraient sûrement ensemble à l'heure qu'il est, à descendre du champagne sous la tour Eiffel.

"- À quoi tu penses gamin ?

- À rien qui te concerne le vieux."

Physiquement, nous sommes pareils. À part mes yeux qui sont bizarres. Nous partageons les mêmes traits stoïques et les mêmes cheveux bruns clairs. Les miens partent dans tout les sens et les siens lui tombent sur les yeux, rasés sur les côtés.
Papa n'a pas du tout vieilli, si on compare avec ses photos d'enfance. Tout ce qui montre son âge sont les deux ridules qui ont pris place au coin de son sourire.
Note ressemblance est tellement importante que j'arrive à me demander si cet homme ne m'a pas accouché tout seul et m'invente une mère pour que personne ne découvre qu'il est capable d'enfanter.

"- Tu ne vas pas chez le docteur Lydie ? Vous n'avez pas rendez-vous ?

- Bof.

- Tu fais comme tu veux.

- Tu m'as inscrit au lycée ou t'as oublié ?

- Euh..aucune idée. Laisse moi vérifier ça. Si c'est pas fait, t'iras tout seul comme un grand. Et comme ça, tu pourras choisir le lycée où tu veux aller.

- Roh..."

Il est aussi adorable que franchement épuisant.

J'ai sourit quand il a brûlé le dîner.
De toute façon, je voulais une pizza.

𝐒𝐞𝐥𝐨𝐧 𝐓𝐨𝐦 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant