Chapitre 17

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Eldria se réveilla en sursaut. Son dos la faisait atrocement souffrir à force de dormir à même le sol. Grâce aux rayons de lune visibles sur un mur de la cellule d'en face, elle parvint à déduire que c'était à peu près le milieu de la nuit. Cela faisait sept jours qu'on l'avait enfermée de nouveau et, contrairement à ce qu'elle avait redouté, on l'avait laissée tranquille jusque-là. Seul le soldat blond venait lui rendre visite tous les midis pour lui glisser sous la grille un plateau avec de la nourriture et de l'eau tiède. Elle avait tenté de communiquer avec lui, de lui demander par exemple si Dricielle allait revenir ou bien si on comptait au moins la faire sortir à un moment ou un autre, mais l'homme se contentait souvent de lui intimer de se taire, ou alors ne faisait des fois tout simplement pas attention à elle, se contentant de lui jeter sa pitance comme il le ferait avec un chien.

Le temps s'écoulait extrêmement lentement entre ces murs, aussi passait-elle le plus clair de celui-ci à somnoler. Mais cela n'était pas non plus une sinécure : dès qu'elle fermait les yeux, son subconscient lui faisait revivre les horribles évènements des jours précédents. Et pour couronner le tout, elle ne ressentait même plus l'envie de jouer avec son propre corps, comme elle aimait normalement à le faire en étant seule. Sa peau et ses mains étaient si crasseuses qu'elle se dégoûtait elle-même. Jamais de sa vie elle ne s'était sentie aussi sale, isolée, et humiliée. Parfois, elle se mettait à sangloter dans un coin de sa cellule, repensant à sa vie à la ferme qu'elle avait laissée derrière elle. Elle se disait que plus rien ne serait jamais comme avant à cause de cette fichue guerre. Mais parfois encore, la partie la plus courageuse d'elle-même reprenait le dessus et tentait d'entretenir les flammes vacillantes d'un espoir de moins en moins vivace. L'armée du Val-de-Lune allait peut-être venir les sauver en apprenant que leurs filles et leurs femmes étaient violentées et violées en bandes organisées par les forces ennemies. Et puis après tout, cette guerre ne pouvait pas durer éternellement !

Elle repensait à Jarim, à son oncle Daris, au père de Salini et à tous les autres partis guerroyer plus d'un an auparavant et dont ils n'avaient plus jamais eu de nouvelles. Etaient-ils encore en vie ? Savaient-ils que deux jeunes femmes de la ferme de Soufflechamps avaient été enlevées et séquestrées ? Et que feraient-ils s'ils l'apprenaient ? Abandonneraient-ils leur poste pour tenter de venir à leur rescousse ?

Le reste de la nuit, Eldria le passa accroupie, perdue dans ses pensées. Elle n'arrivait pas à dormir car elle savait ce qui l'attendrait lorsque le soleil se lèverait. Sept jours s'étaient écoulés et on viendra bientôt la chercher pour la "débauche hebdomadaire", comme elle avait pris l'habitude de l'appeler dans sa tête. Bien sûr, elle était absolument terrifiée à l'idée d'y retourner, mais elle faisait de son mieux pour voir les choses du bon côté : elle allait au moins pouvoir retrouver Salini et Karina, prendre un bain, et revoir ne serait-ce qu'un peu la lumière du jour qui lui manquait tant, et dont elle n'avait jamais de sa vie été privée aussi longtemps.

Comme prévu après quelques heures, les portes grinçantes menant au couloir de sa cellule s'ouvrirent et le soldat blond, dans son éternelle tunique rouge, émergea devant elle, un grand sourire au lèvre. Il déverrouilla la grille qui la retenait prisonnière et daigna cette fois-ci lui adresser la parole :

– C'est l'heure ma jolie, tu sais ce qui t'attend. Je me demande si je ne vais pas essayer de te retrouver parmi la foule tout à l'heure, j'ai bien envie de revoir ce qui se cache sous ce pagne...

Eldria pâlit à l'idée que ce serait peut-être cet homme qui lui ôterait sa virginité par la force dans quelques heures à peine. Malgré tout, elle puisa au fond d'elle-même la force de lui jeter un regard noir. Il la fit passer devant lui et la guida dans les dédales qui menaient à la grande salle de bain. Alors qu'ils marchaient, elle sentait le regard de son geôlier se poser avec insistance sur ses formes. Celui-ci émettait d'ailleurs régulièrement des sifflement appréciateurs. Puis, sans crier gare, il agrippa le pagne de sa captive et le souleva sans ménagement, exposant une culotte qui avait viré au beige à cause de la saleté.

Eldria - T.1 - L'Enfer RoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant